Il est grand temps de lire ou relire René Char.
Voici le cauchemar que jai fait cette nuit :
« Les Etats-Unis venaient de mettre
en branle leur stratégie de vengeance.
Ils avaient trouvé un nom percutant
pour ce programme : Justice sans limite.
Devant bien sortir de chez moi pour aller
gagner ma croûte,
je rasais les murs,
je baissais la tête et les yeux pour
ne pas croiser les regards de ceux qui, fièrement, adoptaient
un port altier et hautain,
celui de ceux qui, sûr de leur droit
et de leur jugement,
donnaient totalement raison aux Américains
de venger leffroyable tuerie perpétrée par
des fous dun Dieu que personne ne pouvait joindre,
pas même sur internet.
Un grand gaillard me barra soudain la
route.
Il revêtait une tenue kaki et portait
un pistolet à la ceinture.
- Pourquoi tu marches la tête
basse, me demanda-t-il ?
- Eh bien ! je ne sais pas vraiment,
je suis très perplexe, je me demande si la Camarde ne serait
pas la seule à trouver son compte dans ce drame
- Je comprends rien à cque
tu dis, de qui parles-tu ? cest une Musulmane avec un nom
comme ça. Sois plus clair !
- Cest que je vais être
en retard à mon boulot
. Balbutiais-je, cherchant
une issue de secours.
- Tiras plus jamais à
ton boulot si tu réponds pas !
Tes
pas au courant ?
Moi,
je fais partie de la milice, créée par le gouvernement
que les Américains ont installé à Vichy et
je dois surveiller et éliminer tous ceux qui marchent la
tête basse.
Je me dis que ce nétait pas possible, que je rêvais, que je cauchemardais, que tout ça navait ni queue ni tête.
Mais le gars me posa une énorme
main poilue sur lépaule.
- Alors, tu te décides ou je
te descends tout de suite ?
Il tenait, de lautre main, son arme pointée sur ma tempe.
- Attendez, ne tirez pas, je suis
de votre côté,
dailleurs,
je travaille
pour une boîte Américaine et ils vont sinquiéter
de mon retard et vous en aurez la responsabilité.
Le grand gars, déguisé en GI, me laissa partir avec des excuses.
Je me réveillais baignant dans
un bain de sueur.
Je bus un coup deau, allumais un clop
et pris un bouquin de Gweltaz pour me changer les idées.
Je me rendormis très vite, car je
travaille dur pour gagner mon pain quotidien.
Le décor avait changé,
je me trouvais à présent sur
le coteau dune montagne, au milieu du maquis.
René était allongé
sur mon flanc droit,
il pointait une énorme mitraillette
sur un convoi GI qui cahotait sur le chemin de chevrier en contrebas.
- Faut pas tirer, seulement si on
peut pas faire autrement,
on ne
doit pas les alerter car lavion ravitailleur ne va pas tarder
et on a absolument besoin des vivres et des armes quil transporte.
Autant vous dire que jatteignais des abysses de perplexité.
- Tiens, regarde ce gros GI, là, derrière le camion, il est en train de pisser, jai bien envie de lui couper la zigounette me dit René.
- écoutes, René jai comme un trou, je narrive pas à rassembler mes souvenirs, tu peux mexpliquer ?
Comment savais-je quil sappelait René ? Mystère et boulle de chewing gum !
- Ouais, cest normal, après
le coup que tas reçu sur la tête hier.
Nous
on est les bons, les maquisards,
eux,
ils sont venus nous envahir et nous dicter leur loi,
cest
les méchants. Heureusement il y a `mousse au chocolat
fils dune marque de machine à laver` qui nous soutient,
cest
un de ses avions quon attend.
Et
quand on aura gagné cette putain de guerre, on sra
tous des héros,
on
créera un vrai gouvernement Islamiste,
on
priera dix fois par jour,
on
construira des mosquées,
on
voilera nos femmes,
on
fêtera lAïd el Kebir,
on
changera de langue,
et
surtout,
nous,
les maquisards,
on
aura les meilleurs portefeuilles au gouvernement.
Je me levais dun bon dans mon lit.
Ma femme eut peur et poussa un cri.
Je lui demandais de remettre immédiatement
son foulard qui venait de glisser sur ses épaules
dans son mouvement incontrôlé.