Le concierge du Château l'accueillit sur le palier de la porte. Son chien Blackie montra les dents, fit le tour du détective en humant ses odeurs, revint s'étendre sur la galerie, fixant Boudedieu. Le concierge était un homme grand, solidement charpenté, taillé sur le modèle athlétique. De son bermuda orange sortaient des jambes solides, fortes. Le visage était robuste: nez arqué , yeux bleus bien vivants sous leurs arcades assombries et quelque peu plissées. Le front large, vagué de rides, s'estompait sous les cheveux blonds et grisonnants, par mèches. Les lèvres étaient larges, bien découpées.
- Com'ça, c'é vous l'détective Boud'dieu, demanda l'homme. Appelez-moi Henry.
- C'est bien moi! répondit Boudedieu. C'est beau, votre pays, complimenta le visiteur en faisant un geste vers le paysage qui en cette journée dégagée de nuages, laissait voir l'étendue du fleuve jusqu'aux rivages de Kamouraska. On y respire un air frais, un air marin, à vrai dire, qu'on ne retrouve pas à Québec.
- C'est-y la première fais qu'tu viens par icitt' ? demanda le convierge. T'en aurais des chos's à voir! C'est une maudit' bell' plac' !
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L'homme parlait vite, escamotait des syllabes. Son langage pittoresque décrivait les personnes et la région qu'il semblait connaître comme le fond de sa poche.
Boudedieu l'écoutait, regardait les grands gestes qu'il esquissait pour indiquer le lieux dont il parlait. Ses regards étaient vastes, semblables aux paysages qu'il décrivait...
- C'est icitt' dit l'homme en faisant un geste précis de la main.
Un long mur bas de pierres grises bordait la haute haie de lilas qui entourant la propriété. Des parterres ovales, ronds ou carrés s'épanouissaient dans un décor rafraichissant.Des bosquets asymétriquement disposés décoraient la cour intérieure et amenaient les regards vers la llongue galerie de façade recouverte d'une véranda que les fenêtre à encorbellement perçaient. L'hôtel comptait trois étages. L'inspiration architecturale trahissait la conception anglo-saxonne de l'aménagement...
- C'est pas neuf, ce manoir. Y'a été bâti ben avant l'Manoir Richelieu, expliquait Henry du ton d'un guide touristique. Les Anglais v'naient y passer l'été. D'ailleurs, si tu regardes en montant la côte, tu voiras que toutes les maisons sont riches et bien entretenues. Les américains viennent respirer l'air pur durant l'été. Ici, l'été, c'est l'temps d'l'argent... Tout l'monde travaille.
Le chien Blackie suivait son maître, un peu à l'écart,errant de temps à autre parmi les branchailles, à la recherche de l'ombre car la journée se faisait chaude.
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