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Un Monde Sans Argent : Le Communisme
VIII. Proletariat et Communisme



LÉNINE

Lénine à la suite de Kautsky disait que les prolétaires n'étaient capables, par leur propre force, que de se hisser à une conscience trade-unioniste. Ils ne peuvent songer qu'à se vendre plus chers et non à révolutionner la société. Lénine avait tort. Les prolétaires sont incapables d'accéder à une claire conscience de leurs intérêts économiques. Les prolétaires sont des marchandises mais ils sont aussi de piètres marchands. Dans la lutte et la négociation les prolétaires montrent sans cesse qu'ils ne savent pas ce qu'ils veulent et qu'ils embrouillent et confondent les réalités économiques et humaines.

C'est une infériorité car en ce qui concerne la défense de ses intérêts économiques le prolétariat est bien moins efficace que la bourgeoisie. Mais on ne peut juger le prolétariat à un étalon bourgeois.

Lénine a raison de souligner la discontinuité entre la conscience trade-unioniste et la conscience révolutionnaire. La seconde n'est pas l'exacerbation de la première. Elles sont dos à dos. Mais la conscience révolutionnaire, et pour nous c'est la conscience communiste, n'a pas à être importée de l'extérieur, n'est pas le produit des intellectuels en tant que couche sociale. Le point de vue de Lénine n'est pas stupide, comme le croient certains défenseurs du peuple, mais il ne rend compte que d'un mouvement apparent. Mouvement que contredit immédiatement une période de révolution.

Le prolétariat montre quotidiennement qu'il est déjà au-delà de l'économie. Son inefficacité, ses illusions naïves sont le revers négatif et passager de son humanité. Dans la lutte et indépendamment du caractère nécessairement borné de ses revendications il manifeste de maintes façons et par maints lapsus son humanité et son aspiration au communisme.

Ce qui importe ce n'est pas ce que le prolétariat est ou paraît être quand il travaille, quand il défile le 1er mai, quand il répond à des sondages d'opinion. Sa situation fondamentale lui imposera et lui impose déjà de se conduire de façon communiste.

En période normale le prolétaire pour survivre doit chercher à compenser par les mille moyens qu'on lui offre cette privation fondamentale. Il se trouve des intérêts, des patries, des drogues dans le spectacle. Il essaie de revivre à travers la puissance de son entreprise ou de son syndicat. Le capital ne peut abolir la prostitution généralisée, mais il peut distraire ceux qui se prostituent. Il verse du baume en permettant de "se réaliser" et de s'engluer dans des marchandises et des images.

Le prolétariat n'est pas l'incarnation positive du communisme au sein du capitalisme. Il n'est pas non plus intégré en permanence et pour l'éternité au système qui lui pompe sa sueur et sa vie. Sa réalité est fondamentalement contradictoire. Il semble intégré même s'il balbutie le communisme. Soudain une brèche se forme. Il s'y engouffre et l'élargit. Les conséquences de ses actes le poussent en avant. Il découvre sa force et fait ce qu'il n'aurait jamais osé rêver de faire.



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