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Un Monde Sans Argent : Le Communisme
VIII. Proletariat et Communisme



EN ATTENDANT GODOT

Que proposent les révolutionnaires en attendant le soir du grand soir ?

Nous n'avons pas de solution miracle pour faire passer le temps ou une conduite idéale à défendre. Les communistes sont englués comme les autres dans la mélasse capitaliste et ne peuvent pas mettre en oeuvre une stratégie pure et universelle qui ferait abstraction des intérêts, des capacités et des conditions particulières. De toute façon nous ne proposons pas pour les "masses" ce que nous refuserions pour nous-mêmes, et vice versa. Nous ne pouvons que constater des différences de comportement.

Nous ne sommes pas des puristes et nous acceptons les améliorations même limitées si elles sont réelles. C'est déjà faire preuve de rigueur en un temps où l'on parle de grande victoire lorsque l'on est payé avec du vent.

Nous ne sommes pas des puristes et nous acceptons d'agir à la base avec des gens qui n'ont pas nos opinions, à partir du moment où les perspectives d'action sont claires.

Il convient d'être souple au niveau pratique afin de profiter des situations changeantes et des imprévus. Il faut savoir faire des compromis et surtout reconnaître les compromis que l'on fait. Nous n'avons pas de recettes à fournir et nous plaignons ceux qui en ont besoin. Pas de téléguidage.

Ceux qui agissent avec l'obsession de la récupération sont récupérés au départ et radicalement. Le sectarisme est d'abord une manière de se protéger contre ses propres incertitudes. Au contraire, lorsque l'on a des certitudes profondes, non idéologiques, l'on peut innover, improviser, composer sans se sentir menacé dans sa pureté. L'erreur ? Ce n'est pas en serrant contre soi à l'étouffer la vérité que l'on n'en préserve.

Cette souplesse pragmatique doit s'accompagner d'une grande rigidité et disons même, pour effrayer les "esprits libres", d'un dogmatisme doctrinal. La clarification et l'assurance théoriques sont essentielles. Il faut savoir où l'on va et le faire savoir.

Notre époque est celle des comportements rigidifiée et de la pensée gélatineuse. Il s'agit de rompre avec ça. Les idées n'ont d'intérêt que si elles fournissent des repères suffisamment sûrs.

Question classique : faut-il participer aux syndicats ? Tout dépend des circonstances, des bonshommes concernés. Mais les syndicats sont intégrés ! ? Ce peut être une raison pour y participer. Soit on utilise les avantages que cela procure aux organisations syndicales. Soit on démontre les limites de ces avantages. Eventuellement l'on se fait vider et la contradiction entre le contenu révolutionnaire et la forme syndicale apparaît au grand jour.

Si la participation aux syndicats est acceptable, la conquête des appareils pour les redresser dans un sens révolutionnaire est à rejeter.

Dans la lutte, dès qu'apparaissent des possibilités pour s'organiser de façon plus large et moins spécialisée, les syndicats doivent être rejetée. La forme syndicale peut être utilisée dans une situation de repli mais ne doit pas entraver le développement et l'approfondissement de la lutte. A l'action par et pour la classe ne doit pas s'opposer l'action par et pour une organisation de spécialistes de la revendication et de la négociation. De toute façon il est sûr que tant que les travailleurs resteront des marchandises dont le prix est à négocier, les appareils syndicaux conserveront une raison d'être.

Ce n'est pas en renonçant à des combats limités que l'on se prépare à la lutte finale. Ce n'est pas en méprisant les questions salariales que l'on fait avancer l'abolition du salariat. L'irréductibilité économique manifeste la capacité de résistance et peut devenir dangereuse pour le système menacé au coeur, c'est-à-dire à la caisse. Malheur à ceux qui veulent distraire les prolétaires de ces questions avec de la fumée idéologique. Renoncer à se battre parce que "le jeu n'en vaut pas la chandelle" n'est souvent que l'expression d'une passivité plus générale.

Tombons-noua dans le piège de l'efficacité pour l'efficacité, dans l'économisme ? Non, mais nous croyons que l'action de classe tend à faire jaillir son propre contenu. C'est pour cela que les pouvoirs de toute nature cherchent à la museler.

Partisans de la pression et de la réaction la plus immédiate et la plus variée possible de la classe, nous nous méfions fort des objectifs revendicatifs qui se dissocient des possibilités et du rapport de force immédiats. Même et surtout lorsqu'il s'agit d'un programme de transition à la sauce trotskyste. Ces représentations qui auraient pour but d'unifier et d'éclairer le prolétariat ne font que lui boucher la vue.

Autant il est juste de lutter, et sous les formes les plus généralisables possibles, pour réduire le tempe passé à travailler, autant il est malsain de fixer des objectifs sur la durée hebdomadaire du travail ou l'âge de la retraite. On ne fait que reprendre à son compte, qu'intérioriser les limitations et les séparations capitalistes. Le choix est entre le temps de travail et le temps libre, la condition de bagnard ou d'assisté pour les vieux. On canalise le combat. Le communisme latent est stérilisé.

La seule perspective défendable c'est le communisme. Ce n'est pas une abstraction lointaine mais la solution humaine à tous les problèmes. Il s'agit de rendre manifeste le sens du mouvement prolétarien, de montrer la puissance dont il dispose.

Souvent les luttes non déclarées : absentéisme, coulage des cadences, sabotage, perruque et fauche... sont les plus efficaces. Nous ne les fétichisons pas. Le capital peut les tolérer et en faire une soupape de sûreté. Elles ne peuvent remplacer un combat plus général. Mais elles entretiennent un moral combatif, développent l'initiative et procurent des satisfactions saines et immédiates.

Il s'agit de populariser des moyens d'action qui tout en faisant pression immédiatement sur les exploiteurs annoncent le monde communiste. Souvent il est possible, en cachette mais aussi massivement et de façon ouverte, de distribuer gratuitement des produite et de faire fonctionner des services. Les travailleurs des postes pourraient ne pas affranchir le courrier, ceux des chemins de fer ne plus contrôler les billets. Si les travailleurs les plus engagée sont licenciée il reste pour les faire réintégrer des possibilités de sabotage.

Notre stratégie peut s'exprimer ainsi : moins de baratin, moins de spectacle, mais que la classe ouvrière utilise les nombreux moyens qu'elle a à sa disposition pour se faire respecter et pour préparer l'avenir. Un peu moins de sérieux revendicatif et un peu plus de sourires narquois et satisfaits.

A l'échelle historique la révolution communiste est imminente. Nous n'écrivons pas pour les générations futures.

En l'affirmant nous savons bien que de nombreux révolutionnaires l'ont déjà proclamé et se sont trompés. Régulièrement on a sous-estimé les possibilités d'adaptation du système. Il nous semble qu'aujourd'hui, par réaction, on fait l'inverse. La dernière carte du capital n'est-elle pas d'avoir ancré dans toutes les cervelles l'image de sa puissance et de son immortalité ?

Ayant développé le machinisme au seuil de l'automation, ayant unifié la planète, il est au summum de sa puissance, mais il a aussi atteint ses limites historiques. Il ne peut plus répondre à la destruction du tissu social et à la détérioration de l'environnement qu'il engendre. Il ne peut plus éliminer ses excès de graisse. C'est sa propre puissance, sa concentration qui se mue en faiblesse.

La crise de la civilisation économique s'est progressivement précisée comme une crise économique. Juste retour des choses ! Mais la phase actuelle ne peut être réduite à un moment de difficultés économiques.

Pour sortir de la crise il faut augmenter le taux de plus-value, redresser la rentabilité défaillante du capital. Il y a bien des obstacles techniques, écologiques et humains. Cela ne peut passer que par des bagarres et des bouleversements énormes. Le prolétariat montre déjà de mille manières qu'il ne laissera pas les choses as faire sans lui. Il montre aussi qu'il n'est pas prêt à adhérer à une solution réformiste. Solution qui ne pourrait consister qu'à s'assurer as complicité pour le vaincre et l'enterrer d'une façon pire que n'ont été le stalinisme et le fascisme.



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