[ mardi 27 août ] [ 22:31 ] [ capricieuse ]

Je n'aimais pas beaucoup l'atlantique
je n'aimais pas beaucoup le coca-cola
je n'aimais pas beaucoup les bougies
les gens n'étaient pas assez bien
pour moi
ni ces chansons-là
je ne les aimais pas.

Je n'aimais pas beaucoup ses silences
ni l'immobilité de nos dimanches
je ne voulais pas de sa présence
tout le temps
je ne voulais pas de sa bienveillance
tout le temps.

Je n'aimais pas beaucoup cette fenêtre
je la trouvais trop petite
pour moi
la vue de là.
Je n'aimais pas beaucoup me pencher de ce côté-là.
Mais je passais la tête au dehors
et respirais à pleins poumons
mon insoumission.

Lorsqu'il était là je serrais les poings
pour ne pas qu'il me vole
cette chère Liberté.

Lorsqu'il était là
je repliais mes genoux entre mes bras
pour ne pas me faire voler
cette liberté-là.
Celle de ne pas beaucoup aimer le coca-cola
la liberté de dire je n'aime pas
trop
l'atlantique ni ce vent-là.

Lorsqu'il était là
je disais noir s'il disait blanc
je disais pile s'il disait face
il disait
tout se construit
je disais
tout s'efface.
Tout le temps. Tout le temps.

Je n'aimais pas cet endroit
je n'aimais pas ces mots-là
je n'aimais pas regarder la télévision
et je ne veux sortir nulle part, non.
Je ne voulais pas qu'il me prenne
et m'enferme
et me retienne
prisonnière
de cette affection
pour moi infection.

Je m'étais offert le beau rôle de celle qui dit non
celle qui a toujours raison
celle qui sait mieux
celle qui voit mieux
ce que ça vaut
tout ça
rien de bon.
Je m'étais offert le beau rôle de celle qui refusait
qui n'aimait pas
ne voulait pas
elles semblaient toujours si petites
toutes ces choses-là
pour moi.

J'avais oublié
je m'étais oubliée
je nous avais oubliés.
Alors je nous ai gâchés.
C'était tellement plus facile
de ne pas aimer.
Et puis je me suis rappelé.

Mon ami n'a pas rappelé.

[ 14:01 ] [ links ]

Je reprends le goût de lire. Pour ne pas perdre ma journée, j'ai trouvé ça.

[ 01:02 ] [ le livre ]

J'ai roulé, beaucoup. J'ai marché, un peu. Je n'ai pas parlé du tout.
J'ai pensé, un peu. Ressassé des bribes, encore. J'ai souri, à peine.
Je suis passé dans la rue de mon ancien appartement. Devant l'abribus j'ai allumé une cigarette, et j'ai continué à marcher. En l'allumant ici, elle est toujours terminée arrivée devant l'entrée. Alors j'ai continué à marcher. Encore une cigarette, comme on dit pour la postérité.
En chemin je me suis fait dépasser par une jeune fille en robe bleue, bleu marine au-dessus du genou, les cheveux blonds et lisses à peine plus longs que les miens. Je l'ai vu me dépasser, elle marchait à grand pas, ne courait pas, mais volait presque. J'ai ressenti comme elle se sentait légère, légère à virevolter sous le soleil du jour de de ses vingt-deux ans. Mais le soleil d'avril. Mais le soleil d'avril. Cette fille-là n'était que moi, une autre année en avril, un autre moi dans une vie qui ne m'appartient plus. Devant l'abribus elle n'avait pas allumé de cigarette. Pas aujourd'hui, il était déjà tard, elle avait rendez-vous, on l'attendait, là-bas devant l'entrée, elle avait rendez-vous. Elle souriait. Marchait légère au-milieu de la route. Les chaussures blanches ouvertes ne faisaient pas de bruit. Au mois d'avril d'une autre année elle m'a dépassée. Elle ne le savait pas. Elle ne m'avais pas vu arriver. Je pouvais presque la détailler, jamais la rattraper. Non, moi j'étais sur le trottoir en jeans serré et baskets de vernis gris. Non, moi je n'avais pas rendez-vous là-bas devant l'entrée. J'avais allumée une cigarette. Pour la postérité.
J'ai failli sortir les clés. Et rentrer à la maison. Les yeux rivés sur les pavés, je l'ai suivie un peu, la jeune fille tellement plus gaie. Je l'ai vu embrasser un garçon, juste là devant l'entrée. Et puis sortir ses valises, un peu plus tard s'en aller.
J'ai failli sortir les clés. Et rentrer à la maison. Les yeux rivés sur les volets fermés, je lui en ai voulue un peu, à la jeune fille qui s'en était allée.

Il lui avait dit, peu de temps après j'ai mal de regarder vers ta fenêtre si tu n'es plus derrière.

J'ai trouvé le livre. Je ne me m'y suis pas trouvée, ni retrouvée. Ni dans le fond ni dans la forme. Mais j'ai ramené avec moi le livre. Je n'ai toujours pas compris, ce message que l'on m'a écrit. Où l'on me parle de ce que je ne suis pas, de ce que je suis un peu, de ce que je suis peut-être, de ce que j'écrit, de ce que je n'écrit pas. Je n'ai pas compris. Mais j'ai lu ce soir le livre. Ne sais ni pourquoi, ni aujourd'hui, mais j'ai fini de lire le livre. Et puis j'ai souri. Mais des messages à la mer, non, je n'ai toujours rien compris.

Peut-être ne suis-je encore qu'une petite fille qui vaillament fait ce qu'on lui suggère en en tirant le plaisir simple de faire bien les choses. Peut-être ne suis-je tout de même qu'une petite fille sage qui se laisse guider sur n'importe quel chemin pourvu que ça ressemble à un chemin, pourvu que ça ressemble à un geste, pourvu que ça ressemble à un signe de vie. Voir des signes à tout prix. Comme aujourd'hui. Aujourd'hui j'ai roulé, marché, pas parlé, et puis j'ai lu le livre. Et j'ai souri. Mais le lien entre tout celà, je ne l'ai toujours pas compris.

Besoin d'incidence, de concordance, et toujours d'un brin de ma démence. Tant que je peux lier le fil de ma vie à celui d'autres destins, par un mot, un regard, par un rien. Tant que je peux recevoir et répondre, tant que je peux prendre, seulement lorsque je le désire, tant que je peux donner, seulement lorsque je le désire. Tant que s'emmêlent mes actes à ceux des autres, même de loin, même d'un rien, que je sois l'élément brut ou bien le produit d'une interaction, tant que j'emmêle mes pas à ceux des autres, tant que je peux confondre mes choix à ceux des autres. Je crois que je suis vivante. Pas morte encore. Pas encore.

Je suis calme, du calme du funambule sur son fil. Je suis calme, dans un silence parfois dérangeant. Impassible devant les choses et les gens. Je mène une vie intérieure qui ne ressemble en rien à la vie extérieure, celle que je vois derrière le rideau de mes cils, celle à laquelle je fais semblant d'appartenir.
Je me tais souvent maintenant. Plus de pulsion, d'excès de cris de passion, plus de lutte acharnée entre mes doigts et l'oreiller.
Je me tais souvent maintenant. Si je parlais, je crois, le film recommencerait. C'est physique, c'est vocal, ce mal-être en bocal. Mais j'ai mis sur pause et je me tais.
Je fume beaucoup et la respiration me manque. J'ai l'impression qu'il n'y a qu'ainsi que ce soit supportable. Lorsque je suis prête à suffoquer tout semble tellement plus facile à supporter. Je ne mange plus depuis des jours et je vacille. Mais encore lorsque la vue se trouble il est tellement plus facile de ne rien savoir, lorsque l'on ne peut rien voir. Lorsque les ressources s'épuisent, plus je me sens devenir petite plus j'espère que les souvenirs seront moins grands. Ils n'auront plus de place, plus de place en moi.
J'ai déjà été là, au sommet de mon chaos, c'était il y a longtemps. J'avais soigneusement choisi mes médicaments, et aucun de ces chers si chers amis n'en avaient fait partie.
Nous en parlions il y a un peu plus d'un an. Il disait et durant tout ce temps tu ne m'avais rien dit, il disait pourquoi n'étais-tu pas venue jusqu'à moi, dis-moi, lorsque tu avais besoin de moi. Il s'était tû tout le long du chemin qui ramenait jusque chez moi, les yeux brillants parce qu'au milieu des nuits où je m'étais rongé le corps et l'esprit, lui, mon meilleur ami, n'avait pas été là. Je lui disais c'est rien, je lui disais c'est fini maintenant je vais bien. Et j'avais haussé les sourcils, esquissé un sourire. Il avait essayé de m'embrasser. Il essayait toujours de m'embrasser. Et je tournais la tête en soupirant. Je faisais toujours ça.
Je lui disais je vais bien et il essayait de m'embrasser. Et je tournait la tête en soupirant.
Je lui dis je me noie, même si c'est pas grave, même si ça passera, peut-être, et je sais qu'il ne saurait m'embrasser. Et il tourne la tête en soupirant. Il fait toujours ça, maintenant.
Il ne m'en voudra plus de ne lui avoir rien dit. Quand j'étais si mal, quand j'étais si lasse d'exister. Il ne s'en voudra plus de l'ignorer, peut-être à peine d'en être la cause cette fois-ci.

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