Amoureuses
Elles ont les épaules
hautes
Et l'air malin
Ou bien des mines qui déroutent
La confiance est dans la poitrine
À la hauteur où l'aube de leurs seins se lève
Pour dévêtir la nuit
Des yeux à
casser des cailloux
Des sourires sans y penser
Pour chaque rêve
Des rafales de cris de neige
Et des ombres déracinées.
Il faut les croire
sur baiser
Et sur parole et sur regard
Et ne baiser que leurs baisers
Je ne montre que
ton visage
Les grands orages de ta gorge
Tout ce que je connais et tout ce que j'ignore
Mon amour ton amour ton amour ton amour.
Par une nuit nouvelle
Femme avec laquelle
j'ai vécu
Femme avec laquelle je vis
Femme avec laquelle je vivrai
Toujours la même
Il te faut un manteau rouge
Des gants rouges un masque rouge
Et des bas noirs
Des raisons des preuves
De te voir toute nue
Nudité pure ô parure parée
Seins ô mon
coeur
Yves
Tanguy
Un soir tous les
soirs et ce soir comme les autres
Près de la nuit hermaphrodite
À croissance à peine retardée
Les lampes et leur venaison sont sacrifiées
Mais dans l'œil calciné des lynx et des hiboux
Le grand soleil interminable
Crève-cœur des saisons
Le corbeau familial
La puissance de voir que la terre environne.
Il y a des étoiles
en relief sur une eau froide
Plus noires que la nuit
Ainsi sur l'heure comme une fin l'aurore
Toutes illusions à fleur de mémoire
Toutes les feuilles à l'ombre des parfums.
Et les filles des
mains ont beau pour m'endormir
Cambrer leur taille ouvrir les anémones de leurs seins
Je ne prends rien dans ces filets de chair et de frissons
Du bout du monde au crépuscule d'aujourd'hui
Rien ne résiste à mes images désolées.
En guise d'ailes
le silence a des plaines gelées
Que le moindre désir fait craquer
La nuit qui se retourne les découvre
Et les rejette à l'horizon.
Nous avions décidé
que rien ne se définirait
Que selon le doigt posé par hasard sur les commandes d'un appareil
brisé.
Belle
et ressemblante
Un visage à
la fin du jour
Un berceau dans les feuilles mortes du jour
Un bouquet de pluie nue
Tout soleil caché
Toute source des sources au fond de l'eau
Tout miroir des miroirs brisé
Un visage dans les balances du silence
Un caillou parmi d'autres cailloux
Pour les frondes des dernières lueurs du jour
Un visage semblable à tous les visages oubliés.
Maison
déserte...
Maison déserte
abominables
Maisons
pauvres
Maisons
Comme des livres vides.
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