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L’extase d’un baiser

Au point que j’expirais, tu m’as rendu le jour,
Baiser, dont jusqu’au cœur le sentiment me touche,
Enfants délicieux de la plus belle bouche
Qui jamais prononça les Oracles d’amour.

Mais tout mon sang s’altère, une brûlante fièvre
Me ravit la couleur et m’ôte la raison;
Cieux! J’ai pris ;a la fois sur cette lèvre
D’un céleste Nectar et d’un mortel poison.

Ah ! Mon Ame s’envole en ce transport de joie!
Ce gage se salut, dans la tombe m’envoie;
C’est fait! Je n’en puis plus, Elise, je me meurs.

Ce baiser est un sceau par qui ma vie est close;
Et comme on peut trouver un serpent sous des fleurs,
J’ai rencontré ma mort sur un bouton de rose.


Ma douce amour……

Ma douce amour, ma plaisance chérie,
Mon ami cher, tout ce que puis aimer,
Votre douceur m’a de tous maux guéris.
En vérité, je vous peux proclamer
Fontaine dont tout bien me vient,
Qui en paix comme en joie me soutient
Et dont plaisirs m’arrivent à largesse,
Car vous tout seul me tenez en liesse.

L’âcre douleur qui en moi s’est nourrie
Si longuement d’avoir autant aimé,
Votre bonté l’a pleinement tarie
Or je ne dois me plaindre ni blâmer
Cette fortune qui devient
Favorable, si elle se maintient;
Mise m’avez sur sa vie et adresse,
Car vous tout seul me tenez en liesse.

Ainsi l’amour, par toute seigneurie,
A tel honneur m’a voulu réclamer,
Car dire puis, sans nulle flatterie,
Qu’il n’est meilleur même en déca des mers
Que vous, m’amour, ainsi le tient
Pour vrai mon cœur qui tout à vous se tient
Et vers rien d’autre son penser ne dresse,
Car vous tout seul me tenez en liesse.



Le bruit des berceaux

Ô le doux bruit des berceaux
Que bercent les mères,
Comme les brises légères
Bercent les roseaux!
Ô les songes doux, peuplés de chimères,
Que ce bruit joli fait épanouir!
Au bruit des berceaux que bercent les mères,
Les anges du ciel doivent s’endormir.

Ô le doux bruit des berceaux
Que bercent les mères,
Comme le vent des clairières
Berce les oiseaux!
La douce chanson que, par les nuits claires,
A l’entour de moi j’écoute frémir…
Au bruit des berceaux que bercent les mères,
Tous les cœurs humains devraient s’endormir!

Ô le doux bruit des berceaux
Que bercent les mères,
Comme les vagues amères
Bercent les vaisseaux!
La peur de l’orage et l’horreur des guerres
Hantent les berceaux et les font gémir…
Au bruit des berceaux que bercent les mères,
La haine et les flots devraient s’endormir!