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A la mère de l’enfant mort

Oh! Vous aurez trop dit au pauvre petit ange
Qu’il est d’autres anges là-haut
Que rien ne souffre au ciel, que jamais rien n’y change,
Qu’il est doux d’y rentrer bientôt;

Que le ciel est un dôme aux merveilleux pilastres,
Une tente aux riches couleurs,
Un jardin bleu rempli de lis qui sont des astres,
Et d’étoiles qui sont des fleurs;

Que c’est un lieu joyeux plus qu’on ne saurait dire,
Où toujours, se laissant charmer,
On a les chérubins pour jouer et pour rire,
Et le bon Dieu pour nous aimer;

Qu’il est doux d’être un cœur qui brûle comme un cierge,
Et de vivre, en toute saison,
Près de l’enfant Jésus et la sainte Vierge
Dans une si belle maison!

Et puis vous n’aurez pas assez dit, pauvre mère,
A ce fils si frêle et si doux,
Que vous étiez a lui dans cette vie amère,
Mais aussi qu’il était à vous;

Que, tant qu’on est petit, la mère sur nous veille,
Mais que plus tard on la défend;
Et qu’elle aura besoin, quand elle sera vieille,
D’un homme qui soit son enfant;

Vous n’aurez point assez dit à cette jeune âme
Que dieu veut qu’on reste ici-bas,
La femme guidant l’homme et l’homme aidant la femme,
Pour les douleurs et les combats;

Si bien qu’un jour, ô deuil! Irréparable perte!
Le doux être s’en est allé!...
Hélas! Vous avez donc laissé la cage ouverte,
Que votre oiseau s’est envolé!


Loin de la mère

En la lumière et dans le mouvement, longtemps
Porté sur mon épaule ainsi qu’un poids d’amphore…

Mais il veut seul s’en aller, mon enfant…
Attends

Encore, ô sans retour! Que depuis les demeures
D’antan de mon ventre, t’en vas toutes les heures
Plus loin de moi! Plus loin que de mes longues mains
Le rêve te portant, d’où s’est-il dit peut-être que
Tu verrais longtemps lentement apparaître
Les éternels phantasmes des muant Demains!

Mais il veut seul s’en aller, mon enfant…
Attends

Ô ! dont le pied sur le pantèlement de Vivre
Ne se pose pas sûr, ô toi! Qu’un délivre
Essentiel pour éternellement à moi
Retient!...Attends, tu ne sais pas si dans l’émoi
De soirs, tu ne souhaiteras dans les dolences
De ma Matrice

Rentrer! Et si, aux silences
Emplis pourtant d’une angoisse d’atomes, les planètes ne souffrent
de, vers leurs étoiles soleils, ne s’emporter hors des ellipses!...


Quand je pense a ma mère


Sa belle ombre qui passe à travers tous mes jours,
Lorsque je vais tomber, me relève toujours.
Et je voudrais lui rendre aussi l’enfant vermeil
La suivant au jardin, sous l’ombre et le soleil,
Ou couchée à ses pieds, sage petite fille,
La regardant filer pour l’heureuse famille.
Je voudrais tout un jour, oubliant nos malheurs,
La contempler, vivante, au milieu de ses fleurs!
Je voudrais, dans sa main qui travaille et qui donne,
Pour ce pauvre qui passe aller puiser l’aumône.
Elle a passé! Depuis mon sort tremble toujours,
Et je n’ai plus de mère où s’attachent mes jours.