Le Bébé (seul) : Ouain ! ! ! ….Ouain ! ! !…
Jackie : Ouais…Ben, on s'obstine à aller au théâtre,….On s'emmerde toujours.
Mlle Agnès : ….Ouais, mais….Oh ! Mon bébou ! ! ! Alors ! ! ! !
Jackie : Alors ! T'as bien regardé si le poisson rouge a été sage ?
Mlle Agnès : Tu sais j'étais quand même inquiète… Je le laisse plus seul une deuxième fois.
Jackie : Oh….C'est rien….T'as pas fumé hein ?….T'as pas fumé !….Tu sais c'est quand tu auras fait tes dents !
Mlle Agnès : …Arrête tes bêtises…Oh ! Bébou….Viens on va mettre la musique…
Ding…Dong…Ding…Ding…
Jackie : …Ah !…Ah ! y'a quand même des mégots dans le lapin….
Le Bébé : …

 

PAS SI VITE

 


Les Grecs anciens étaient bien avisés, ils appelaient pédagogue celui qui conduisait les enfants à l'école.
Mais le pédagogue n'entrait pas à l'école, il restait à la porte.

Mlle Agnès : Arreuh ! ! !
Jackie : Si t'es pas gentil, je t'emmène chez le pédagogue !
Le Bébé : …

Sommes-nous plus avisés que les Grecs ?… Car nous autres, avons fait entrer le pédagogue à l'école… Et on peut se demander si ce ne sont pas les enfants qui sont restés à la porte.

La pédagogie est censée rendre le savoir accessible, elle ne cesse de faire des médiations entre le savoir et ceux qui l'apprennent… Aussi, on ne sait pas très bien si les enfants apprennent ces médiations ou le savoir lui-même.

Mlle Agnès : ….Ah ! Faudra penser à lui faire réviser ses médiations !
Jackie : …Ah…Pas ce soir, y'a un match avancé…de la troisième journée de la ligue des champions !…
Le Bébé : …

Et ainsi, la pédagogie, loin de rendre le savoir accessible aux enfants, rendrait les enfants inaccessibles à ce savoir.
Mais, ce qui est vrai à l'école… L'est aussi au dehors !

Jackie : …Oh, même l'école buissonnière, c'est plus ce que c'était.
Mlle Agnès : …Que c'est bô, ça ! ! ! !…
Le Bébé : …

Nous sommes au siècle de la médiation et la société entière est une vaste pédagogie.
Tout doit être à notre portée… vulgarisé… enseigné…
On ne peut même plus se promener en montagne sans qu'on nous propose un stage de sensibilisation à la meilleure façon de marcher !

C'est pour cela qu'il n'y a pas lieu d'opposer l'école à la télé… Rien que des médiations !
Céline disait de la cour de son immeuble…

Mlle Agnès : Tu l'as revois celle-là ?
Jackie : …Mais non ! Céline, l'écrivain…


…Il n'y a plus d'air… Rien que des odeurs.
Dans la cour de la pédagogie, il n'y a plus de choses, rien que des médiations.
La meilleure manière d'empêcher quelqu'un de comprendre c'est de lui expliquer.

Mlle Agnès : …Et tu vois, tu plies le petit gilet comme ça……. Et après, tu fais les manches…
Jackie : Tu lui montres ce qu'il faut pas faire !
Mlle Agnès : …Ouais, mais c'est à toi que je parle !
Jackie : …ben……..Moi, c'est trop tard !
Le Bébé : …

La pédagogie est une nouvelle forme d'obscurantisme, plus pernicieuse que l'ignorance.
Elle atteint les âmes et les prive de savoir… par le savoir lui-même.
Pourtant, nous aurions bien besoin de pédagogie ! !
Celle qui emmènerait les enfants à la porte de l'école et qui leur apprendrait que la meilleure part d'eux-mêmes, résiste à toute pédagogie.

Une pédagogie qui rendrait aux choses leur fureur primordiale… L'occasion indifférente d'une expérience…

Une pédagogie qui girait d'un sourire énigmatique d'un gardien de musée, et non dans le bavardage qui fait taire le silence.
Une pédagogie qui mettrait en circulation des objets étranges, inéchangeables, dignes… Et non celle qui, d'une manière pudique et convenable, transforme toute chose en marchandise.

Mlle Agnès : …Mais où la trouver cette pédagogie ?

…On l'a trouve chez Rousseau !

La Pédagogie y est toute négative… Elle enlève les médiations… Elle n'ajoute rien… Elle soustrait tout ce qui sépare un être de ce qu'il apprend.
Et arrivée à son terme, elle se soustrait elle-même.
Bref !… Elle rapproche, elle amenuise les distances, elle conduit à la porte de l'expérience cruciale… et se retire discrètement…
Elle ne fait pas la morale avec des mots, des formules ou des histoires… Mais avec un potiron qui pousse ! !

Mlle Agnès : …Eh, oui ! Ben il va falloir qu'on se trouve un petit potager !
Le Bébé (mange et regarde en l'air) : Miam…Miam…
Jackie : …Oh ! Mais il regarde passer les voisins !
Mlle Agnès : (Rires) !

Elle va de la chose aux mots et non des mots à la chose. Elle laisse mûrir l'enfance dans l'enfant !

Pour ma part, je ne vois pas d'autre moyen pour qu'un avenir soit possible, laisser mûrir l'enfance dans l'enfant.
Je suis bien le seul, puisqu'on pourrit l'enfance dans l'enfant, en voulant l'adapter le plus vite possible, à un monde dont toute âme bien née, ne voudrai pour rien au monde.

 

 

 


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