Jackie (qui téléphone
sur son mobile) : ….Oui…C'est sur le réseau
!
Mlle Agnès (qui lui fait voir la
facture) : ….C'est cher là ! … Ce mois
ci….
Jackie : Ouais ! C'est normal….
C'est le mois des charges ! ….
RYTHME...
Nous sommes rapides et superficiels !
Nous, c'est l'homme moderne, nous sommes des zappants hallucinés
!
Notre caverne, c'est l'image sous toutes ses formes ! … Même,
ses formes écrites !
Elle est au point notre caverne !
On s'y sent bien, n'est-ce pas ?
Le Bébé : Oui
!
Mlle Agnès : Ben, oui, oui
! On s'y sent bien… Ca c'est sûr ! … Vu le prix
du loyer !
Face à nous autres, rapides, superficiels, zappants et caverneux…. Il y aurait quelque chose de lent, profond, captivant et lumineux : l'Etude… Et en particulier l'Etude de la Philosophie !
Cette opposition a des accents beaucoup trop moralistes pour
être honnête !
Se présenter comme une gouvernante acariâtre et verjus,
fait les malheurs de Sophie !
La philosophie ne fera peut-être pas son bonheur….
Mais, après tout, s'agit-il de cela ?
Jackie : Oui, après tout, faut savoir de quoi on parle !
A ce sujet, je voudrais citer quelques mots de Hegel…
Mais tout en vous disant cela, je me demande comment je vais le
faire !
Parce que, n'est-ce pas, Hegel est un auteur très difficile
! … Alors, tout en vous parlant, je me dis :
Bon, il faudrait faire une petite introduction… Rendre les
choses accessibles… Mais attention ! !
Accessibles… Et dignes !
Jackie : Ben oui, il s'agit pas de bêtifier !
Les plus impatients d'entre vous bondissent !
Mais qu'il en parle de Hegel, au lieu de se demander comment il
va faire !
Je m'incline devant vous, impatients et d'autant plus que Hegel,
lui-même, était impatient !
Et la préface de la "phénoménologie de l'esprit " commence comme cela :
" Il ne peut y avoir
de préface
à la philosophie
ni de préambule
ni de préliminaire… "
Prenons une phrase : DIEU EST BON
Mlle Agnès : Ca c'est vrai qu'il est bon ! … J'en reprendrai bien un morceau !
Si j'écris : DIEU EST BON… EST du verbe être
est à la droite de DIEU… Tandis que BON est à
la droite de EST…
Mais d'où vient le prédicat : BON…?
Sans doute de très loin, de telle sorte que dire : DIEU
EST BON… Ou l'écrire, c'est rapprocher l'adjectif
BON de DIEU !
Ainsi la phrase écrite a deux mouvements simultanés et en sens inverse.
L'un qui va de Dieu à la bonté (mouvement de
gauche à droite : DIEU >>>>>>EST<<<<<
Maintenant, prenons une autre proposition d'aspect plus philosophique
:
…DIEU EST L'ETRE…
Mlle Agnès : Ben tiens
en parlant de lettre… Là !….. T'as du courrier
!
Jackie : T'as l'intention de nous
faire un petit jeu de mot à chaque fois ?
Mlle Agnès : Oui, ben si tu
veux, avec toutes ces factures là, j'ai besoin de me détendre
un peu !
Le mouvement ne peut pas être le même que pour
DIEU EST BON !
L'ETRE ne peut pas venir à DIEU, comme le bleu vient au
ciel !
Ni même comme la bonté venait à DIEU !
Des lors, on ne pourra pas dire que l'ETRE est un prédicat de DIEU !
DIEU et l'ETRE, au contraire, s'identifie !
Il n'y a pas de différence entre DIEU et l'ETRE !
Bien plus, si tout à l'heure, DIEU recevait ferme et immobile
la bonté, ici il semble vaciller, se répandre vers
l'ETRE…. S'y verser…. Et l'ETRE épuiser DIEU
!
Mlle Agnès : Ben oui
hein ! …. On sait, c'est épuisant les enfants !
Jackie : Les enfants ?
Mlle Agnès : Ben oui ! Si
l'Etre est l'enfant de Dieu !
Jackie : Ah ! Donc on continue de
rigoler !
Une proposition telle que : DIEU EST L'ETRE a une forme de
point de vue de la forme :
DIEU est le sujet, L'ETRE le prédicat !
Il y a toujours une différence entre un sujet et un
prédicat.
Le ciel est bleu ! … Oui, mais le ciel n'est pas le bleu
!
D'un autre point de vue, il ne peut avoir de différence
entre DIEU et L'ETRE !
Il y a donc un conflit entre ces deux points de vue, l'identité détruit la différence !
Mlle Agnès : C'est pour
ça que les différents veulent des papiers d'identité
?
Jackie : Oui ! …
Hegel compare ce conflit à celui qui se produit dans
le rythme entre le mètre et l'accent.
L'étude de la philosophie est pour lui une affaire de rythme
!
Qui a dit que le rythme devait être nécessairement lent et profond ?
Le Bébé : Je sais pas !