LES COMMENTAIRES d'Eric
Dupin
dans FRANCE-SOIR
du mois d'octobre 1998
- Le sondé et le manifestant (14 octobre)
- Le couple infernal Chirac-Séguin
(16 octobre)
- Génération Jospin (21 octobre)
- L'Italie à l'heure du compromis historique
(23 octobre)
- Des Verts français un peu verts (29
octobre)
- Pourquoi votre droite est muette (30 octobre)
LE
SONDE ET LE MANIFESTANT
Les Français sont-ils satisfaits de Lionel Jospin ? Globalement
oui, si l'on en croit les sondages. Sont-ils contents de la politique gouvernementale
? Dans le détail non, à en juger par les grèves et
les manifestations qui se succèdent. Bizarre. Mais pas illogique.
Cet automne 1998 ressuscite, sous une forme nouvelle, la vieille opposition
entre "pays légal" et "pays réel" qui rythme la vie politique
française.
Quinze mois après l'alternance de 1997, le "pays légal"
a plutôt bonne mine. Le pouvoir reste crédité d'une
volonté de bien faire qui explique sa popularité. Le premier
ministre a ainsi immédiatement pris au sérieux les violences
qui ont paralysé certains transports publics la semaine dernière.
Surmontant son tempérament provocateur, Claude Allègre a
même reconnu qu'il "comprenait" la protestation lycéenne.
Mais le "pays réel" se laisse difficilement réconforter
par ces bons sentiments. De nombreux secteurs d'une société
française de plus en plus éclatée sont en proie à
l'angoisse, ou même au désespoir. Ils souffrent des effets
cumulés de vingt années de crise. La colère de la
jeunesse dépasse les réelles difficultés matérielles
de son présent. Elle exprime aussi, et peut-être surtout,
la peur d'un avenir que la fragile reprise économique laisse très
incertain.
Or, pour un gouvernement, les mobilisations de la jeunesse
scolaire sont toujours périlleuses. Le monde lycéen et étudiant
est une plaque sensible révélatrice de l'état et du
moral d'une société. Sans remonter à mai 1968, de
nombreux dirigeants politiques l'ont appris à leurs dépens.
Jacques Chirac a sans doute perdu l'élection présidentielle
de 1988 pour avoir violemment réprimé le mouvement lycéen
de décembre 1986. Edouard Balladur a plongé dans les sondages,
en février 1995, alors qu'il rechignait à ôter son
CIP (contrat d'insertion professionnelle) conspué dans les rue par
les jeunes.
La popularité des gouvernements est généralement
atteinte par les mobilisations sociales. Ceux qui croient que nous vivons
dans une "démocratie d'opinion" où le sondé fait la
loi se trompent. Ce sont les grandes grèves de décembre 1995
qui ont précipité Alain Juppé dans un rejet dont il
ne s'est jamais remis. Lionel Jospin lui-même a subi une sérieuse
érosion de son soutien populaire pendant le "mouvement des chômeurs"
de janvier 1998.
C'est dire si l'on aurait tort, à Matignon, de sous-estimer
l'actuelle détérioration du climat social. Comme atout, le
gouvernement dispose d'une capacité d'écoute qui tranche
avec la surdité de son prédécesseur. Mais il est terriblement
handicapé par la rareté des moyens financiers dont il dispose.
Il y a quelques mois, Jospin justifia son refus d'augmenter les minima
sociaux par la hausse des impôts que cela entraînerait. Une
manière de s'appuyer sur l'électeur contre le manifestant.
Mais la mobilisation des chômeurs était alors très
limitée. Il serait autrement plus difficile au chef du gouvernement
de répondre de la sorte à une protestation sociale d'envergure.
LE
COUPLE INFERNAL CHIRAC-SEGUIN
(16 octobre 1998)
La scène se déroule à l'Elysée
un an après la dissolution ratée de juin 1997. «Si
la droite avait remporté les législatives, j'aurais dû
nommer Séguin à Matignon; elle a perdu et j'ai choisi Jospin»,
explique Jacques Chirac à un spécialiste de gauche de la
communication. Et d'ajouter: «Franchement, vous ne trouvez pas que
Jospin, c'est mieux que Séguin, au moins pour l'Europe !»
L'anecdote est révélatrice de la détestation
réciproque que se vouent le président de la République
et celui du RPR. Loin de se réduire à une simple incompatibilité
d'humeur, ce problème handicape terriblement la droite. Plus encore
que la gauche, elle a besoin d'un chef. Et pas de deux !
Or le couple Chirac-Séguin est incomparablement
plus bancal que celui que forment le chef de l'Etat et celui du gouvernement.
La cohabitation repose sur un partage relativement clair des responsabilités
de chacun. A l'inverse, le duo formé par le leader naturel de la
majorité présidentielle et celui du principal parti de la
majorité baigne dans la confusion.
Pour dire les choses crûment, aucun ne
peut déloger l'autre. Tant que Chirac trône à l'Elysée,
personne ne peut le remplacer comme chef de file de la droite. Le chef
de l'Etat ne domine pas seulement la citadelle élyséenne.
Chirac reste aussi le fondateur du RPR, et adulé comme tel. Séguin
n'a pas oublié l'ovation chiraquienne qui a fait vibrer les assises
extraordinaires du RPR du 1er février 1998. Il a alors mesuré
son incapacité à faire tourner à ce parti la page
chiraquienne.
A la rente de situation de Chirac correspond l'absence d'alternative
dont profite Séguin. Le député des Vosqes est parvenu
à la tête du RPR dans la débâcle législative
de 1997. Il garde son siège, conquis au hasard d'un heureux concours
de circonstances, par manque de candidat de rechange. Entre les dinosaures
comme Charles Pasqua et les loups encore verts comme Nicolas Sarkozy, Séguin
est aujourd'hui difficilement remplaçable.
Est-il pour autant un bon chef pour le RPR ?
Passons pudiquement sur son caractère acariâtre qui le rend
parfois insupportable à ses propres amis. Plus grave, en face d'un
Chirac sympathiquement opportuniste, Séguin n'est pas l'homme de
conviction que l'on a longtemps imaginé. Ses positions varient allègrement
au gré des circonstances. L'ancien ministre du Travail de Chirac
fût l'apôtre des «petits boulots» et du partage
du travail avant d'expliquer que la croissance est finalement le seul vrai
remède au chômage. Sur l'Europe, les revirements de Séguin
sont encore plus flagrants. L'ancien croisé anti-Maastricht s'est
curieusement mué en partisan de la ratification du traité
d' Amsterdam.
Qui est vraiment Séguin ? Il n'est pas
un authentique libéral sur les questions économiques mais
se garde bien de plaider désormais la cause d'un Etat fort. Il n'est
pas un conservateur sur les questions de société mais n'ose
plus défendre des positions tolérantes. Pris au piège
de ses propres contradictions, Séguin se contente de répéter
un discours d'opposition systématique auquel il ne croit pas vraiment
lui-même.
GENERATION
JOSPIN
(21 octobre 1998)
On se pose en s'opposant. Un vrai problème. Contre qui
la jeunesse scolarisée manifeste-t-elle ? Le bouillant Claude Allègre
sert de tête de turc aux contestataires en mal d'imagination. Mais
les lycéens peuvent difficilement prendre pour cible un gouvernement
qui, de Lionel Jospin à Ségolène Royal, les assurent
de sa compréhension. Le ministre de l'Education nationale "soutient"
avec une dose de sincérité un mouvement dont il espère
qu'il facilitera ses réformes. Quant à la principale organisation
lycéenne, la FIDL, elle est animée par des socialistes, assurément
plus radicaux que ceux qui siègent au gouvernement, mais appartenant
au même parti...
Contre les profs ? Pas simple quand le principal syndicat
enseignant des lycées, le SNES, rejoint le cortège lycéen.
Là encore, le soutien adulte aux jeunes n'est pas désintéressé.
Cette organisation compte bien tirer quelques dividendes budgétaires
de cette agitation. Contre la société ? La petite fraction
anarchisante de manifestants ne saurait faire illusion. La majorité
des lycéens veulent s'insérer dans la société,
et non la dynamiter. Les casseurs, par leurs pillages, se révèlent
même, à leur manière, adeptes de la "société
de consommation" dénoncée naguère.
Contre quoi alors ? Les disputes entre les diverses organisations
et coordinations lycéennes sont moins révélatrices
de leurs rivalités politiques, traditionnelles en pareilles circonstances,
que de l'extrême diversité du mouvement. D'un lycée
à l'autre, les problèmes varient du tout au tout. Si la misère
matérielle domine les récriminations, le désarroi
pédagogique est profond. Ces multiples handicaps matériels
et moraux sont d'autant plus mal vécus que l'efficacité de
l'effort scolaire, en termes d'avenir professionnel, est sérieusement
mise en doute.
C'est finalement contre la réalité sociale actuelle
que les lycéens se révoltent. Plus ou moins confusément,
c'est cette société inégalitaire, atomisée
et angoissante qu'ils ne supportent plus - à défaut de la
contester ouvertement. Mais comment se battre contre le mur du réel
? On peut exiger une rallonge budgétaire ou casser une cabine téléphonique,
aucune réponse simple n'est satisfaisante.
Chaque génération entre en politique grâce
aux mobilisations scolaires. Celle de 1968 a été vaccinée
contre le conservatisme culturel. Dans les années soixante-dix,
les jeunes s'affrontaient à l'autoritarisme de la droite. En 1986,
il était encore facile de crier: "Chirac, matraque, t'es pas un
démocrate !"
Que découvriront les jeunes d'aujourd'hui dans
le bouillonnement d'un mouvement qui fait éclore les discussions
et casse les routines ? Peut-être rompront-ils avec le fatalisme
qui caractérisait jusqu'alors les générations montantes
? A force de ne plus supporter l'insupportable, ils pourraient comprendre
qu'une société n'est jamais figée. Et que la jeunesse,
première victime en son sein des "fractures sociales", est précisément
là pour la bouger, la bousculer au nom des valeurs de solidarité.
Voilà qui rendrait un fier service à la gauche pépère
au pouvoir.
L'ITALIE
A L'HEURE DU COMPROMIS HISTORIQUE
(23 octobre 1998)
Des Français en rêvent, les Italiens l'ont fait.
Un gouvernement allant du communisme à la droite modérée?
Ce qui vient de naître au-delà des Alpes a de quoi séduire
ceux de nos compatriotes qui aimeraient tant que la droite et la gauche
s'équilibrent au lieu de se combattre. La popularité de notre
"cohabitation" exprime, d'une certaine manière, ce désir
d'unité nationale.
L'Italie n'a certes pas succombé aux charmes de l'unanimisme.
Mais elle vit désormais à l'heure du "compromis historique".
Un événement considérable. Le nouveau gouvernement
formé mercredi par Massimo D'Alema compte significativement autant
de ministres issus de l'ancienne Démocratie Chrétienne que
de membres du PDS, l'héritier du Parti Communiste Italien.
Le rouge et le noir. Peppone et Don Camillo. L'Italie a longtemps
vécu l'affrontement politique et culturel de deux grande forces:
le communisme et le catholicisme. A la fin des années soixante-dix,
alors que le pays s'enfonçait dans la pauvreté et le terrorisme,
le communiste Enrico Berlinguer osait prôner un "compromis historique"
entre elles pour résoudre les problèmes. Le démocrate
chrétien Aldo Moro en était un chaud partisan. Il en est
mort, assassiné après 55 jours de captivité, le 9
mai 1978, par les "Brigades Rouges".
Vingt ans après, ce projet fou se réalise. Un
ancien responsable communiste dirige le nouveau gouvernement, s'est ému
le quotidien du Vatican. Mais le Pape s'est empressé d'échanger
poignées de mains et propos amicaux avec D'Alema, devenu un sage
social-démocrate. Le président du patronat italien a même
fait part de sa "satisfaction" après la constitution de la nouvelle
équipe.
Le remplacement, au pouvoir, du démocrate-chrétien
de gauche Romano Prodi par l'ancien communiste Massimo D'Alema n'est pas
un virage à gauche. D'un côté, le Parti des Communistes
Italiens (PDCI) fait son entrée au gouvernement avec trois ministères
dont la Justice. La France n'est plus le seul pays occidental à
abriter des ministres communistes. Mais, de l'autre, l'Union Démocratique
pour la République (UDR), dont le leader est un dignitaire de la
droite de feu la démocratie-chrétienne, décroche deux
maroquins.
Cette réconciliation tardive des héritiers du
communisme et du catholicisme, sur le dos de la puissante nouvelle droite
dominée par Silvio Berlusconi, est-elle une bonne chose pour l'Italie
? Pas si sûr. Un responsable de la majorité a comparé
ce gouvernement à "un avion dans lequel monteraient des passagers
ayant en tête des destinations différentes". Cet épisode
marque, en tous cas, le retour aux anciennes moeurs politiques des alliances
nouées dans le dos des électeurs. Ceux de l'UDR avaient quand
même voté pour l'opposition de droite... Et tout indique que
le nouveau gouvernement poursuivra la politique de l'ancien. Les poids
lourds de l'équipe Prodi gardent leurs postes. D'Alema a déjà
annoncé qu'il reprendrait le projet de budget... qui avait provoqué
la chute de son prédécesseur.
DES
VERTS FRANÇAIS UN PEU VERTS
(29 octobre 1998)
Les écolos sont-ils des zozos ? Les Verts français
ont toujours peur de ne pas être suffisamment pris au sérieux.
Une crainte ravivée par la récente consécration ministérielle
des écologistes allemands. Dominique Voynet, le verte solitaire
du gouvernement français, a immédiatement jalousé
ses cousins d’Outre-Rhin. Là-bas, les écologistes peuvent
se flatter d’avoir hissé trois des leurs au banc des ministres.
Leur chef de file, Joschka Fischer, est en charge des Affaires étrangères
et vice-chancelier. Pas moins.
En France, les écologistes sont encore préposés
à l’Environnement, même si Dominique Voynet a également
la haute main sur l’aménagement du territoire. La mouvance écologiste
a ici longtemps souffert d’une image folklorique : celle du baba barbu,
buveur de jus de carottes bio, qui gare sa chèvre en double file
dans les ruelles d’un village du Larzac… Sa réputation a ensuite
été ternie par le sectarisme d’Antoine Waechter – un temps
pompeux pape des Verts – et par l’opportunisme de Brice Lalonde – basculant
inopinément de gauche à droite.
L’alliance avec les socialistes a sauvé les Verts de
la déshérence. Mais les amis de Dominique Voynet ont pris
goût au pouvoir. Ils sont bien décidés à utiliser
les élections européennes de 1999 pour imposer une nouvelle
donne à leur puissant allié. D'où l'importation d’Allemagne
de Daniel Cohn-Bendit. Les "Grünen" ne sont pas forcément désolés
de se débarrasser de l’ancien leader de mai 68, décidément
trop français à leur goût. "Dany" a passé 17
de ses 53 printemps en France, où il s’est marié en août
dernier.
Le choix de cette figure charismatique comme tête de
liste ne garantit pourtant pas le succès aux Verts. Même s’il
"a le soutien des médias" comme le constate, avec un brin d’agacement,
Dominique Voynet. Les performances des écologistes allemands sont
le fruit d’un maturité politique qu’on chercherait en vain chez
leurs homologues français. Si Cohn-Bendit a trois ans de plus que
le vice-chancelier Fischer, les Verts ont au moins dix ans d’expérience
de moins que les "Grünen". Les premiers ont émergé aux
législatives de 1993, les seconds à celles de 1983. L’ancien
révolutionnaire Fischer a été ministre de l’Environnement
de l’Etat de Hesse dés 1985 et l’ex-agitateur Cohn-Bendit adjoint
au maire de Francfort en 1989 alors que nos écologistes n’ont accédé
que ces dernières années à de véritables responsabilités.
Notons, sans cruauté aucune, la différence de savoir-faire
politique entre le très subtil renard qu’est devenu Fischer et la
talentueuse apprentie qu’est encore Voynet.
Le scrutin européen sera une épreuve de vérité
pour les Verts. Il devront concilier l'aspiration de leurs dirigeants à
la respectabilité avec les exigences de radicalité de leur
base. "Dany le Rouge" s’est mué, avec le temps, en écologiste
très modéré, infiniment plus proche de Michel Rocard
que d’Arlette Laguiller. Mais pour doubler le PCF – le véritable
objectif des écologistes – les Verts n'auront d'autre choix que
de draguer les électeurs à la gauche du PS. En prenant modèle
sur le sage vice-chancelier Fischer ?
POURQUOI
VOTRE DROITE EST MUETTE
(30 octobre 1998)
«Décomposition», soupire Raymond
Barre. «Crise de crédibilité», lâche
Edouard Balladur. La France a mal a sa droite. Ses leaders l'admettent
volontiers. Pourquoi peine-t-elle à accomplir son «devoir
constitutionnel» d'opposition, selon le mot récent de Philipppe
Séguin ?
On peut, bien sûr, invoquer les rivalités
de personnes qui la minent. L'élection du président du Sénat
en a été la dernière illustration. Ou encore ses divisions
entre partis rivaux. Si «l'Alliance» chapeaute théoriquement
les formations fondées par Jacques Chirac et Valéry Giscard
d'Estaing, elle ne saurait faire oublier que l'opposition dite républicaine
a éclaté en quatre formations distinctes: le RPR de Séguin,
«Démocratie libérale» d'Alain Madelin, l'UDF
de François Bayrou et «la Droite» de Charles Millon.
Il y a plus grave. L'opposition est déchirée
par des orientations stratégiques divergentes. La question des rapports
avec le Front national révèle des clivages qui vont du refus
radical de l'UDF à l'accord tacite de «la Droite». Mais
ces divisions ne sont que le reflet de l'absence d'orientation cohérente.
Le discours de la droite est inaudible tout simplement parce qu'il n'est
pas clair. L'opposition a certes réagi avec vigueur au PACS. Mais
après avoir hésité à s'attaquer à ce
projet et au prix d'une argumentation contradictoire, allant du conservatisme
de Christine Boutin au juridisme de Patrick Devedjian.
Une ligne claire. Voilà ce que manque
cruellement à l'opposition. Imaginons une droite sans complexe mais
soucieuse d'être entendue. Elle serait pleinement libérale
au plan économique. Crûment dit, elle relaierait au niveau
politique les idées du «parti de l'entreprise» que forme
désormais le MEDEF (ex-CNPF). De quoi contenter certaines élites.
Pour faire bon poids, et s'assurer une assise populaire, la droite conjuguerait
simultanément conservatisme et défense des traditions sur
les questions de société.
Cette droite de droite n'est pas pour demain.
Le libéralisme économique authentique effraie une large partie
de l'électorat conservateur - des agriculteurs à certaines
franges du patronat. Il est, au demeurant, rejeté par le courant
centriste de l'opposition. D'autre part, le libéralisme économique
et le conservatisme sociétal se marient difficilement en France.
Nos libéraux sont souvent modernistes tandis que nos conservateurs
se méfient fréquemment du libéralisme. L'espèce
des libéraux-conservateurs pur jus est très minoritaire dans
l'opposition.
Le cas de Millon est symptomatique. C'est précisément
ce créneau politique qu'il vise. Avec un succès pour le moins
mitigé. Car l'influence acquise par le Front national mine le terrain
de ceux qui voudraient bâtir une droite sans fard. Le FN occupe l'espace
de la droite dure, en lui rajoutant l'odeur nauséabonde que l'on
sait. Sa force d'attraction empêche aujourd'hui toute vraie clarification
idéologique à droite. Celle-ci en est réduite à
espérer que la crise actuelle du parti frontiste lui rende une pleine
liberté de parole et d'action.
LES COMMENTAIRES DE NOVEMBRE 1998