Les deux traités de délimitation de frontière, de 1864 et de 1926 n’ont pas établis les limites de chaque État dans une bande de l’Alentejo coïncidant avec le Territoire d’Olivença, resultat du réfus du Portugal à reconnaître la souveraineté espagnole dans la région et du fait que l’Espagne continue à ajourner la rétrocession de cette partie du Portugal. Le Projet de Centre d’Etudes d’Architecture Transfrontalière, créé à Olivença en 1995, contient l’affirmation suivante, révélatrice de toute cette question : «D’un point de vue diplomatique, Olivença est une matière en ouvert entre les deux Etats, au point que la Comission Internationale chargée de la vérification des limites frontaliers entre les deux Pays laisse toujours sur la table la mise en place des bornes de frontière dans la région d’Olivença».
Pour que le silence portugais ne puisse point être compris comme
une reconnaissance tacite de l’occupation espagnole, la diplomatie du Portugal
rappelle périodiquement à l’Espagne que nous sommes en
droit à récupérer Olivença.
Si l’Espagne aurait un quelquonque argument valide pour justifier son occupation du Territoire d’Olivença elle le justifierait par le biais du Traité de Badajoz de 1801. En fait, ce traité
et avec lui le Traité de Madrid de la même année, a
perdu sa valeur juridique, il est nul et dépourvu d’éfficacité.
«Les Plénipotentiaires des trois Puissances belligérantes ayant agréé entre eux, ils ont accordé a faire deux Traités, sans que dans la partie essentielle ils soient plus qu’un seul, puisque la garantie est réciproque et il n’y aura pas de validité dans aucun des deux quand on vienne a constater une infraction à un quelquonque des articles qui y sont énnoncés». Renforçant le principe de l’unicité des Traités de Badajoz et de Madrid et donnant fondament aux reivindications portugaises sur leur nullité, il y a l’Article IV qui stipule le suivant : «Dans le cas d’avoir infraction à cet article ou à un autre, on donnera comme nul le Traité qui maintenant s’établit entre les trois Puissances, incluant la garantie mutuelle, selon ce qui s’exprime dans les Articles du présent». La réciprocité de la validité ou invalidité des 2 traités est clairement exprimé dans l’Article VIII du texte français, quand on affirme que «toute infraction à ce Traité sera regardée para le Premier Consul comme une infraction au Traité actuel» c’est-à-dire, chaque infraction au traité franco-portugais serait une infraction au traité hispano-portugais, puisque les deux traités ne faisaient qu’un seul. Il y a plusieurs raisons pour la nullité du Traité de Badajoz. Hormis l’inobservance, par la France, de l’échéance de ratification, en observance de ce qui stipulait l’Article IX, ce qu’entraîna la signature du Traité de Madrid du 29 septembre 1801, les causes de la nullité du Traité de Badajoz sont les suivantes :
Le Portugal a signé ledit Traité, non pas dans l’exercice de sa pleine liberté mais sous menace de force.
«Il y aura paix, amitié et bonne correspondence entre Son Altesse Royale le Prince Régent du Portugal et des Algarves et Sa Majesté Catholique le Roy d’Espagne, par mer et par terre, en toute l’extension de ses Royaumes et Domaines». Agressé et envahi par des forces franco-espagnoles, sans autre motif que sa décision de se refuser à abandonner son alliance avec la Grande-Bretagne, le Portugal a dû se soumettre à accepter la Paix dans des conditions déshonorantes et humiliantes. En échange de l’acceptation de la Paix, qui se vérifia sous la menace des plus grandes représailles, le Portugal a obtempéré aux exigences et de l’Espagne et de la France, entre lesquelles se trouvait la reconnaissance de la possession d’Olivença par l’Espagne. Selon stipulait l’Article IV du Traité de Badajoz, la violation de la Paix aurait comme conséquence inévitable la nullité du même Traité. C’est ce qui arriva en 1807, quand l’Espagne et la France signent le Traité de Fontainebleau, selon lequel le Portugal serait partagé en trois parties ; ce projet connait sa mise en œuvre quelques mois après, avec l’invasion du Pays. Si l’Espagne pourrait citer en sa faveur un quelquonque droit à la possession du Territoire d’Olivença, elle l’aurait perdu irrévocablement quand elle a rendu nul, par sa seule responsabilité, le seul document de valeur juridique sur lequel elle pourrait fondamenter sa souveraineté sur ce morceau de terre de l’Alentejo.
Suite à l’invasion du Portugal par des forces franco-espagnoles,
qui motiva le transfert au Brésil du siège de la Monarchie
Portugaise, Jean, le Prince Régent, fait publier, en date du 1er
mai 1808, un Manifeste selon lequel les Traités de Badajoz et de
Madrid de 1801 étaient déclarés «nuls
et sans effets».
Le 30 mai 1814 le Traité de Paris est signé ; il rend nuls les Traités de Badajoz et de Madrid de 1801. L’Article nº 3 déterminait : «Bien que les traités, conventions et actes conclus entre les deux puissances antérieurement à la guerre aient été rendus nuls, de facto, par l’état de guerre, les hautes parties contractantes ont, non-obstant, considéré convenable de déclarer encore une fois et expressément que lesdits traités de Badajoz et Madrid de 1801 et la convention signé à Lisbonne en 1804, sont nuls et d’aucun effet, en ce qui concerne le Portugal et la France et que les deux couronnes rennoncent mutuellement à tout droit et se dégagent de toute obligation qui en puisse résulter». Quoique le Traité de Paris n’oblige directement que la France, l’Espagne en est concerné puisque les deux traités ne font qu’un seul, comme dans leur propre texte est ineffaçablement exprimé. De cet Article Aditionnel on infère, également, la doctrine juridique selon laquelle l’état de guerre qui découle du Traité de Fontainebleau, rendait nul, par lui seul, les Traités de Badajoz et de Madrid, ce qui confirme l’inexistance de tout fondament qui puisse justifier la domination de l’Espagne sur Olivença.
Porte du Calvair (17ème siècle)
Si le Traité de Paris de 1814 a commencé le processus de paix, seul le Congrès de Vienne, dont les travaux démarrent le 27 septembre de la même année, vient tenter de résoudre la multitude de problèmes pendants. Parmi les questions d’importance majeure pour le Portugal, on trouvait celle de la frontière de la Guianne Française et celle de la rétrocession d’Olivença. L’Espagne, avec des promesses peu solides de restitution du territoire, essaya de dissuader le Portugal de présenter la Question d’Olivença au Congrès de Vienne. Le Portugal, se méfiant des intentions espagnoles, opta pour saisir le Congrès de cette affaire. Ayant confiance dans la possibilité d’une rétrocession d’Olivença, le Portugal tenta d’obtenir l’annulation du Traité d’Alliance anglo-portugais de 1810, selon lequel le Portugal cédait Bissau et Cacheu à la Grande-Bretagne, pour une période de 50 années, en échange de l’appui de ce pays à la rétrocession du territoire oliventanien. Les représentants portugais au Congrès — Pedro de Sousa Holstein, António Saldanha da Gama et Joaquim Lobo da Silveira — non seulement ont obtenu satisfaction en ce qui concerne ledit Traité d’Alliance, comme ils ont réussi à établir le droit du Portugal à la réincorporation d’Olivença, ce qui est précisé dans l’Article 105ème du traité : «Les Puissances, reconnaîssant la justice des réclamations formulées par Son Altesse Royale, le Prince Régent du Portugal et du Brésil, au sujet de la ville d’Olivença et des autres territoires cédés à l’Espagne par le Traité de Badajoz de 1801 et considérant la restituition de ces objets comme une de ces mesures adéquates a assurer entre les deux Royaumes de la Péninsule cette bonne harmonie, complète et stable, dont le maintien en toutes les parties de l’Europe a été le but permanent de leurs négotiations, formellement s’obligent à employer par des moyens conciliatoires leurs plus efficaces efforts afin que se réalise la rétrocession des dits territoires, au profit du Portugal. Et les Puissances reconnaissent, dans ce qui dépent de chacune d’elles, que ce pacte doit avoir lieu le plus brèvement possible.» Le Plénipotentiaire espagnol, D. Pedro Gómez Labrador, s’est réfusé, le 9 juin 1815, à souscrire le Traité de Vienne, dressant un acte de protestation envers plusieurs délibérations du Congrès, dont celle qui concernait la restitution d’Olivença.
L’Espagne accepta finalement le Traité et le Comte de Fernán
Nuñez le signa le 7 mai 1817, reconnaissant ainsi les droits portugais
sur Olivença et s’engageant dans sa rétrocession,
ce qu’elle n’a pas, en date, encore accompli.
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