QUELQUES CLEFS POUR ACCORDER NOS TIQUINS ...
Ci-après quelques messages fort intéressants de Siva Nataraja sur des clefs primordiales de l'idéographie chinoise (repris de nzn.fr.langue.chinois):
Honneur à l'une des premières clefs : 一 yi, « un »
Selon
certains, 一 représente le ciel ou l'horizon, mais les pictogrammes anciens
montrent bien qu'il s'agit de l'index tendu.
La clef 一 sert à former 雨,
yû, « pluie », un nuage accroché au faîte du ciel, faîte du ciel protégeant
l'homme qui se tient au dessous dans 天, tian, « ciel ».
Le sens de « ligne
d'horizon » se retrouve dans 旦, dàn, « aube », le soleil au dessus de
l'horizon.
La clef 一 entre dans la composition de 1559 caractères
traditionnels, et 796 caractères simplifiés.
Symbole de l'unité, de
l'absolu, 一 prend ses lettres de noblesse dans la leçon 42 du 道德經 / 道德经 / dào dé
jing :
道生一 / 道生一
/ dào sheng yi
一生二 /
一生二 / yì sheng èr
二生三
/ 二生三 / èr sheng
san
三生萬 / 三生万
/ san sheng wàn
« Le Dào engendre le un, le un
engendre le deux, le deux engendre le trois, le trois engendre les dix mille
»
C'est-à-dire (une lecture possible) :
« Le Dào engendre l'Unité
primordiale
L'Unité primordiale engendre les Contraires
Les Contraires
engendrent l'Equilibre
L'Equilibre engendre la Multitude ».
On voit
dans ce texte 一 se métamorphoser : se dédoubler d'abord (clef 二) puis
réapparaître entre les Contraires (一 entre les deux traits de 二) . C'est
avant tout l'Unité à part entière et l'Unité entre les extrêmes,
c'est-à-dire
l'Equilibre.
La deuxième clef indiquée par les dictionnaires est
丨gùn.
C'est vraisemblablement un simple bâton, voire à l'origine
une branche sans feuilles. Ce caractère n'est utilisé qu'en composition, et son
sens premier disparaît au profit d'autres sens plus symboliques.
On le
trouve bien évidemment dans 中 zhong, « centre », et dans ce cas, il représente
une flèche frappant le centre d'une cible. On retrouve cette flèche dans 引 yîn,
« tendre », posée auprès d'un arc, à moins que ce ne soit simplement la corde de
cet arc. Enfin, dernier exemple, 串 chuàn, « lier », représente une navette
unissant deux objets.
Une clef, somme toute, fort peu intéressante...
Mais qui entre dans la composition de plus de 968 caractères traditionnels, pour
549 simplifiés. Ces chiffres s'expliquent facilement lorsque l'on se souvient
que 丨, à
l'instar de 一, est un des traits de base formant les
caractères.
[ Parenthèse ouverte par 老李 Lao Li - Laurent
Je me
branche sur cet article pour ne pas interférer dans le fil "[u8] Quelques clefs
(1)" tout en vous indiquant comment améliorer la précision des autres
articles "[u8] Quelques clefs (n)".
- Article "[u8] Quelques clefs (2)"
-
La deuxième clef indiquée par les dictionnaires classiques est
丨gùn.
L'adjectif « classique » permet de conserver à cette phrase sa
véracité, il n'est pas nécessaire, sans doute, de définir cet adjectif dans
l'immédiat.
Nous évitons ainsi qu'un utilisateur du dico Han Fa Cidian
(le fameux bleu-blanc-rouge de You Feng) ne croie voir là une erreur, puisque
pour lui c'est la 3e clé.
En librairie chinoise ou même Extrapole, vous
trouvez une feuille cartonnée expliquant ces légères divergences d'un dico à
l'autre (une autre possibilité est « La deuxième clef indiquée par les
dictionnaire [Nom du dico] est 丨gùn. »).
Je me demande si la phrase « On
le trouve bien évidemment dans 中 zhong, « centre », et dans ce
cas, il
représente une flèche frappant le centre d'une cible. » ne risque pas de laisser
croire que 'zhong' n'est pas lui-même une clé (la 105e dans le HFC) ?
et
cette phrase est si parlante qu'il faut peut-être la laisser telle quelle...
Elle est quasi calligraphique, et c'est avec peu d'effort que l'on imagine déjà
la façon de dessiner ce caractère.
J'ai bien dit « Je me demande ». Un
forum n'a-t-il pas pour intérêt de laisser la place à des questions ?
Du
coup, un doute s'insère dans mon esprit sur l'exactitude du décompte (549
simplifiés). Vous me direz que 549 ne signifie rien d'autre que « beaucoup » et
que personne ne retiendra ce nombre. Mais puisque le HFC n'a que 6 caractères «
dépendant » de 丨 pourquoi utiliser un décompte ? Non seulement c'est
donner une vision douteuse de l'arithmétique (je veux dire, laisser entendre que
le décompte de caractères n'obéit pas aux mêmes règles que le décompte d'autres
objets) mais encore priver le forum d'un possible débat (Pourquoi 549
ici et
6 là ?).
... et prolongée par JV Gruat:
Le numérotage des clefs, nous en avions, barbes bleues sinophiles, déjà vaguement traité.
Certaines différences tiennent en fait plus au vocabulaire qu'à l'orthographe - les clefs "à un trait" sont par définition des traits de base dont nous (moi) ignorais-ions qu'ils cachaient un sens.
Combinés les uns aux autres, ces traits deviennent clefs, ou racines, et l'on groupe en 214 et parfois quelques familles pour permettre une recherche avec chances raisonnables de succès. Certains vocables demeurent regroupés, sans autre famille en somme, sous les rubriques des "clefs-trait". Une petite centaine d'idéogrammes pour 7 éléments de base ainsi privilégiés (sur les 20 répertoriés) y compris certains caractères relativement complexes dont il n'est pas évident d'aller les chercher là où les tableaux de dictionnaires autrement de bon faiseur nous les classent.Un exemple: le corbeau, 乌, wu, se trouvera classé
sous la clef n.4 (dictionnaire chinois-français d'usage répandu, le
bleu-blanc-rouge de couverture, édition 1990)丿, pié *, et non sous la clef dite
de l'oiseau,
n.152, 鸟, niao, parce qu'il manque un oeil à la bête, et qu'on
ne compte pas de clef négative à partir du radical (honteux d'être confus, mais
parlant de corbeau ...).
[Siva, suite]
Voici le troisième épisode de l'histoire
(très rapide) des clefs, ou radicaux, du chinois.
En fait, il
s'agit dans cet épisode de la première clef, 丶diân (ou zhû), point
».
Ce n'est qu'une goutte, mais lorsque les chinois ont remplacé le
calame de bambou par le pinceau, son tracé s'est adapté aux nouvelles
possibilités offertes par cet outil génial.
La clef 丶n'est pas toujours
référencée dans les dictionnaires : c'est en effet l'un des traits de base
servant à tracer les caractères. Il faudrait alors référencer une très grande
partie du corpus des sinogrammes chinois si
l'on voulait prendre en compte
tous ceux qui l'utilisent.
Certains caractères, cependant, méritent que
l'on s'attache à analyser le sens du point qu'ils comportent.
C'est le
cas de 主 zhû, « maître », pictogramme [il faudra un jour rédiger un message
expliquant quelles sont les sortes de sinogrammes existant :
pictogramme,
idéogramme, phonogramme etc.] représentant une lampe surmontée d'une flamme,
stylisée par le point. Le maître est donc celui dont le savoir éclaire les
hommes, celui qui les illumine de sa bonté.
Sur ce même 主 sont bâtis deux
dissyllabes intéressants : 主义 / 主義 zhû yì, doctrine »et 主角 zhû jué, «
protagoniste, rôle principal ». Le premier se compose du maître suivi du
sinogramme pour « justice ». La doctrine est la parole juste du maître, son
enseignement. Quant au second, il est composé de 主 suivi du sinogramme pour «
rôle ». Le premier rôle, c'est tout simplement le « rôle en chef », celui qui
est joué par le meilleur des acteurs.
Enfin, 丶 se retrouve aussi dans 丹
dan, « cinabre », le sulfure de mercure, d'une couleur rouge soutenue. On peut y
voir le caractère 井 jîng, « puits, mine », quelque peu modifié. Il fallait
chercher cette matière dans les
entrailles de la terre, minuscule point au
fond de la mine. Le cinabre était l'un des corps les plus recherchés par les
alchimistes chinois -- une pierre philosophale, en sorte --, car il entrait dans
la composition de philtres de
longue vie. L'alchimie chinoise s'est longtemps
passionnée pour les méthodes permettant d'accroître la durée de vie. Le
caractère 丹 est d'ailleurs utilisé dans l'expression 丹田 dan tián, « champ de
cinabre », c'est-à-dire un
point situé sous le nombril, l'un des réceptacles
de l'énergie (ou 氣 / 氣 qì, « souffle »). Le 丹田 est le centre d'où, dans le
太極拳 / 太极拳 tài jí chuán (tai chi chuan), tout mouvement part, toute énergie
circule. Le travail sur la respiration ventrale et l'accumulation d'énergie dans
le 丹田 est prépondérant pour ceux qui pratiquent le 太極拳 / 太极拳 tài jí chuán (tai
chi chuan). Le 氣功 / 气功 qì gong (chi kong), connu sous le nom de « gymnastique
chinoise », travaille lui-aussi beaucoup la circulation d'énergie via le 丹田 . Ce
n'est
pas non plus pour rien que le seppuku japonais, connu en occident sous
le nom -- vulgaire -- de « harakiri », le suicide rituel, consiste en une
incision ventrale : il s'agit en fait de détruire le 丹田 , source principale
d'énergie vitale dans le corps humain. Toute cette symbolique provient en fait
de l'alchimie chinoise : contrôler son champ de cinabre permet tout autant que
l'ingestion de philtres magiques d'accroître la durée de vie (le 太極拳 / 太极拳 tài
jí chuán (tai chi chuan) est aussi appelé « art de longue vie ») ; celui qui
étudie et pratique le 太極拳 / 太极拳 tài jí chuán (tai chi chuan) est comparable au
sage ayant découvert un champ de cinabre, trésor en soi et source inépuisable
d'énergie.
La quatrième clef indiquée par mon dictionnaire est 丿bié (ou pié
ou piê) :
Ce n'est qu'une ligne oblique et rien de plus. Son
introduction au rang de clef est une erreur commise par 康熙 Kang Xi (1661--1722 ;
second empereur des 清 Qing [1644--1911]) dans son 康熙字典 Kang Xi zì diân,
dictionnaire comportant quarante mille caractères rangés sous 214 clefs. Ce
grand travail de classification des sinogrammes, bien que parfois imparfait et
fautif, est considéré comme le plus scientifique et le plus beau. Notons au
passage que le 康熙 classait les clefs non pas par nombre de traits comme on le
fait de nos jours, mais selon une classification assez poétique -- et
relativement arbitraire.
Pour en revenir à 丿, il est admis qu'il
représente une lame de couteau tranchant quelque chose ; 丿est donc souvent lié
sémantiquement à la valeur de « retrancher quelque chose ».
Beaucoup de
caractères semblent utiliser cette clef. Comme on l'a vu, c'est une erreur, car
丿n'est pas réellement un radical.
Dans 別 / 别 bié, « partie », le rapport
avec le sens du pseudo-radical est évident : c'est ce qui reste lorsque l'on a
retranché quelque chose au moyen d'une lame. Kang Xi a classé ce sinogramme sous
la clef 丿, alors qu'en fait la clef est 刂,la forme en composition de 刀 dao, «
couteau », dont le sens est cependant proche.
Il semble d'autre part que
眉 méi, « sourcils », utilise aussi cette clef. Les dictionnaires le classent
pourtant sous le radical 目 mù, « œil ». Le sinogramme pourrait représenter les
poils qui dessinent l'arcade supérieure de l'œil.
Dans 刈 yì, « faucher »,
la clef est double, deux lames qui se croisent telles des ciseaux. Le caractère
est parlant, puisque la deuxième partie est encore 刀 dao sous sa forme
réduite 刂. Deux lames qui se croisent suivies d'un couteau, le sens est aisé à
garder en mémoire. Pour les dictionnaires modernes, 刈 se range sous 刀.
Un
dernier exemple de caractère utilisant le pseudo-radical 丿: c'est 殺 / 杀 sha, «
tuer », sinograme où l'on voit les deux lames au dessus de l'arbre, 木 mù ; la
mort sépare brutalement l'homme de la Terre, tel l'homme qui coupe un arbre ;
quand la mort les frappe, les deux s'abattent au sol. L'iconographie occidentale
n'en est pas éloignée, avec sa camarde munie d'une faux...
C'est tout
pour aujourd'hui...
Siva /
月影
Le truc de Michel
Parent ...
" Si les clefs ou radicaux vous intéressent, voici une mini
introduction et deux tableaux en format *gif pour débutants:
http://pages.infinit.net/mrp/chinois/faq/faqradicaux.html
http://pages.infinit.net/mrp/chinois/radlist/radlist214.html
http://pages.infinit.net/mrp/chinois/radlist/radlist01.html
"
... et la réponse du Compilateur:
Merci beaucoup pour ces liens. Je sens que nous allons beaucoup nous enrichir à votre contact, sans honte parasitaire. Le "troisième lien" m'a conduit à l'adresse http://deesse.univ-lemans.fr/~prevost/chinois/
dont je ne puis que regretter de ne pas l'avoir fréquentée plus tôt. Tout ce que j'avais toujours voulu savoir sur les clefs ...
Mais
connaissez-vous les spécificatifs ?
PS. Un Chengyu de derrière les fagots
"N'oubliez pas de ranger sur vos étagères ce précieux 口是心非 que le Noble Amphigourix nous pinyinisa
de mémoire ( kou shi xin fei, bouche être coeur non, dire le contraire de ce que
l'on pense)."