Un site Web consacré à Henri Guybet…
Est-ce bien raisonnable ?

La bonne raison #1

Il y a longtemps que je voulais consacrer un site Web à un acteur ou à une actrice francophone.

La bonne raison #2

J'ai un faible pour les grands acteurs de composition, pour ces magiciens qui ont le pouvoir de me surprendre dans presque tous leurs films même s'ils jouent le plus souvent des rôles de second plan. Quelques-uns de mes préférés : John Turturro, Ian Holm, Joan Cusack, Judy Davis, Pierre Fresnay, Michel Simon, Jeffrey Jones, Robert Stephens, Paul Muni, Flora Robson, Helen Mirren, Alec Guinness, Ralph Richardson, David Warner, John Hurt, Robert Newton et, bien sûr, Henri Guybet.

La bonne raison #3

Henri Guybet est encore sous-représenté sur le Web. Et, quand on y parle de lui, c'est souvent pour le dénigrer. Même un défunt site Web, qui lui était consacré et qui a trépassé avant que je ne puisse le consulter, ne le prenait pas très au sérieux et l'appelait "le roi de la poilade et de la rigolade". C'est vrai qu'il est très drôle, mais j'ai pensé que son talent de comédien méritait mieux.

J'ai découvert Henri Guybet avec Le Pion, sorti au Québec en 1979. Certes, je l'avais déjà aperçu dans quelques comédies avec Pierre Richard, Miou-Miou, Louis de Funès et Jean Lefebvre, mais je ne me rappelle plus du tout ce que je pensais de lui avant de voir Le Pion. Je suis presque certaine que je ne connaissais pas son nom...

Grâce à un copain français, j'ai revu Le Pion en février 2001… Il m'a beaucoup émue. Ce film, sans être un chef-d'œuvre, m'avait aidée à survivre à une période très difficile de ma vie (j'avais alors 13 ans). Je m'étais fortement identifiée au personnage du prof fou de littérature, un peu farfelu, sensible et persécuté, et grâce à lui, je m'étais sentie un peu moins seule au monde…

La même année, j'avais vu un autre film avec une sorte de pion "British", Ragtime Summer (pas un monument du septième art non plus), qui mettait en vedette David Warner.

On peut dire que j'étais gâtée !

Je me dois de préciser que j'ai depuis toujours les films qui se passent dans un milieu scolaire en horreur. Le Pion et Ragtime Summer sont les deux exceptions qui confirment la règle.

J'ai donc adoré Barabi et Buchanan plus pour leur personnalité que pour leur profession. Ils étaient tous les deux intègres, anticonformistes, courageux, sensibles, romantiques, intelligents et un peu excentriques. Persécutés par les adultes de leur entourage, ils ne renonçaient pas à leurs idées ni ne recouraient à l'hypocrisie pour autant. Éternels adolescents, ils comprenaient bien leurs élèves et les aimaient vraiment. De plus, ce n'était ni des athlètes ni des machos. Je crois que j'ai vu en eux à la fois des âmes-sœurs et, même s'ils n'étaient pas des Adonis, des hommes très désirables. Le rêve quoi.

Un rêve très mièvre, certes, mais un rêve qui convenait parfaitement à la petite adolescente romantique que j'étais alors.

Au cours des vingt années suivantes, je n'ai jamais perdu ma tendresse pour MM. Guybet et Warner même si je ne pensais que très, très rarement à eux. J'étais toujours très contente de les voir à la télévision. C'était le plus souvent tard le soir. En errant de chaîne en chaîne, il m'arrivait de les apercevoir et de penser : "Tiens, Henri Guybet (ou David Warner)." Je regardais le film cinq minutes, et puis je fermais le poste avant d'aller me coucher.

En décembre 1997, j'ai vu Titanic, dans lequel David Warner incarnait "le méchant valet du méchant fiancé." J'ai voulu savoir ce qu'il avait fait au cours de toutes ces années… J'ai beaucoup aimé découvrir l'acteur brillant par ses films et (un peu) l'homme très attachant par ses interviews. En août 1998, j'ai créé un site Web qui lui rend hommage. Quelques-uns de ses films les plus célèbres : Morgan, fou à lier (Karel Reisz, 1966), Les Chiens de paille (Peckinpah, 1971), La Maison de poupées (Losey, 1974), La Malédiction (1976), Providence (Resnais, 1977), C'était demain (1979), Tron (1982)...

En novembre 2000, j'ai revu Les Aventures de Rabbi Jacob, dans lequel Henri Guybet donne vie au personnage de "Salomon, le chauffeur". C'était la première fois que je pensais à lui depuis 1995 (cinq minutes d'une comédie, très tard un soir)... Je me suis demandé ce qu'il était devenu depuis toutes ces années (le film le plus récent que j'avais vu avec lui, Est-ce bien raisonnable, datait de 1981)...

Au cours de mes premières recherches sur Internet, j'ai été consternée par quelques pages Web qui traitaient M. Guybet de "ringard" et/ou de "crétin". J'ai voulu savoir ce qu'il avait fait pour se mériter une réputation pareille… et s'il la méritait vraiment.

J'ai d'abord loué quelques vidéos. Pour vous dire la vérité, je ne m'attendais pas à grand chose… Je me disais que les chances qu'Henri Guybet soit un comédien aussi talentueux que David Warner devaient être quasiment nulles.

Et bien, je me trompais… même si c'est vrai qu'Henri Guybet a eu beaucoup moins de chance avec sa carrière cinématographique que David Warner (le métier d'acteur est souvent injuste). Néanmoins, pendant mon "festival Guybet", j'ai eu beaucoup de plaisir à voir ou à revoir une vingtaine de ses comédies. Un plaisir le plus souvent très kitsch, mais un plaisir tout de même et qui m'a fait revivre un peu de mon enfance ! Par ailleurs, j'adore les films qui ont un brin de folie et les grands et moyens crus de la "franchouille" (j'utilise le terme avec affection) sont fous à souhait... C'est vraiment trop dommage que trop de navets infects aient nui à la réputation des comédies made in France.

Le talent et la versatilité d'Henri Guybet ont rarement été exploitée à leur juste valeur au cinéma. On lui demandait trop souvent de faire rire à partir d'un scénario indigent ou avec un personnage mal écrit et caricatural. La plupart du temps, il s'en tirait avec honneur, mais, en regardant certains de ces films, j'ai eu l'impression d'assister au combat d'un lion avec le néant... tant d'énergie et de talent gaspillés !

Si seulement un bon réalisateur lui avait confié un bon rôle dramatique dans un bon film dramatique, cela lui aurait donné ses lettres de noblesse en tant que comédien aux yeux des critiques et d'un certain public de snobs. Mais on ne sait jamais ! Tant qu'il y de la vie...

En conclusion : c'est vrai, il a tourné dans quelques trucs ringards comme On n'est pas sorti de l'auberge et incarné, avec beaucoup de talent, quelques idiots comme Tassin de La Septième ou le CRS dans La Cloche en or. Mais on ne devrait pas croire qu'Henri Guybet est ringard ou con pour autant… Sous-estimé, mésestimé, cet excellent comédien mérite grandement d'être découvert ou redécouvert. Et c'est presque garanti qu'il va vous faire rire.


Bertrand Barabi
dit Le Pion ou Bergerac


Henry Buchanan
dit That British Teacher?!?

Des images
très différentes


Le méchant de Titanic


Le sympathique garagiste
du Voyageur de l'an 2000

Un autre petit texte
est disponible sur
le très joli site
de Bouray-sur-Juine,
un pittoresque
village de l'Essonne.

Si Henri Guybet avait eu un talent moindre,
je ne lui aurais pas consacré un site Web, nostalgie ou pas.
Que voulez-vous, la nostalgie ne pèse pas lourd quand son objet est sans intérêt…

©Cinéphilia, 2001. Tous droits réservés.

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