LE PIC-BOIS 

Les pics ont en commun plusieurs caractéristiques qui les distinguent des autres familles d'oiseaux. La plupart des particularités de leur anatomie sont reliées à leur capacité de creuser le bois. Le bec, droit et en forme de burin, est constitué d'un os massif recouvert d'une pellicule dure et assez large au niveau des narines pour répartir la force des coups donnés par l'oiseau. Les narines sont recouvertes de plumes pour empêcher les copeaux et la sciure d'y pénétrer. Les os du bassin sont larges, de sorte que les muscles qui s'y attachent peuvent mouvoir et raidir la queue, ce qui est si important pour grimper. Les pics ont une autre particularité anatomique, soit une longue langue couverte de barbillons qui leur permet d'aller chercher la nourriture dans les crevasses et les fentes. Les glandes salivaires sécrètent une substance visqueuse et gluante qui recouvre la langue et en fait, avec les barbillons, un outil efficace pour capturer les insectes.

Il existe 198 espèces de pics dans le monde, dont 13 vivent au Canada. Le Pic mineur, Picoides pubescens, est la plus petite et peut-être la plus connue des espèces canadiennes. Il ressemble au Pic chevelu, Picoides villosus, qui est plus gros. Tous deux sont noirs et blancs, avec une large bande blanche au milieu du dos qui s'étend des épaules au croupion. Les ailes ont un carrelage noir et blanc qui se voit du dessous; la poitrine et les flancs sont blancs. La couronne est noire, tandis que les joues et le cou sont marqués de lignes noires et blanches. Le mâle des deux espèces a une petite tache écarlate en forme de pompon rouge à l'arrière de la couronne.

Malgré leur forte ressemblance, le mineur et le chevelu possèdent des caractéristiques qui les distinguent. Les rectrices externes du Pic mineur, contrairement à celles du chevelu, sont striées de noir au lieu d'être toutes blanches. Du bout du bec au bout de la queue, Le Pic mineur mesure de 15 à 18cm, soit 6cm de moins que le chevelu. Son bec est plus court que sa tête, tandis que celui du Pic chevelu est aussi long, sinon plus.

Le Pic mineur mâle a à peu près la même taille que la femelle et son poids varie entre 22 et 33g. Chez la femelle, la queue est plus longue et le bec, un peu plus court.

Comme la plupart de ses Congénères, le pic mineur est un grimpeur. Ses courtes pattes, munies de deux doigts orientés vers l'avant et de deux autres vers l'arrière, permettent à l'oiseau de s'agripper solidement. Pour grimper, il s'appuie sur ses rectrices rigides et pointues en progressant d'une patte puis de l'autre. Le corps rivé au tronc ou à la branche, balançant la tête, l'oiseau peut grimper, redescendre en spirale et sauter prestement de côté à une vitesse incroyable.

Répartition géographique

Répartition géographique du Pic mineurLe Pic mineur habite le continent nord-américain presque en entier jusqu'aux États qui bordent le golfe du Mexique. Au Canada, la limite septentrionale de son aire atteint Terre-Neuve, la baie James, le nord des provinces des Prairies, le sud du district du Mackenzie, les territoires du Nord-Ouest, le nord de la Colombie-Britannique et le Yukon. Les pics qui vivent dans le nord de l'aire migrent vers le sud en hiver, mais ces déplacements sont assez irréguliers et dépendent de la disponibilité de la nourriture.

 

Habitat

Les pics vivent là où il y a des arbres. Le Pic mineur est chez lui dans divers milieux boisés: forêts mixtes du nord ou forêts décidues du sud, petits boisés, forêts-parcs, vergers, même dans les parcs et les avenues des villes et des villages. Il préfère les endroits où les feuillus comme le peuplier, le bouleau et le frêne laissent passer la lumière entre les conifères. Il affectionne aussi l'orée et les lisières des forêts plus denses. Dans l'ouest, on en trouve aussi dans les peuplements d'aulnes et de saules. D'autres espèces de pics partagent ces habitats avec lui, mais comme chacune se distingue par sa nourriture et l'emplacement de son nid, elle occupe une place définie dans la nature, que l'on appelle ² niche écologique ».

Reproduction

Il arrive souvent que les couples de Pics mineurs retournent nicher leur vie durant dans le même territoire, d'une superficie d'environ 2 ha. Le mâle et la femelle font parfois chambre à part dans un tronc d'arbre et peuvent même choisir les loges qu'ils avaient creusées lors d'une saison précédente.

Dès février ou mars, ils prennent possession de leur territoire en le parcourant en tous sens et en tambourinant de leur bec sur des branches sèches ou d'autres objets sonores éparpillés çà et là. Ce tambourinage sert de moyen de communication entre eux et informe les autres pics que le territoire est occupé. Le répertoire des Pics mineurs est varié. Ils lancent souvent un tique-tchique-tchérique et, à l'époque des amours, ils y ajoutent un cri aigu plaintif.

Pendant la saison de reproduction, le Pic mineur défend son territoire contre ceux de sa propre espèce qui s'y aventurent. Les rencontres avec les intrus donnent lieu à des manifestations d'hostilité: bec grand ouvert, plumes hérissées et ailes entièrement déployées, tournant sur eux-mêmes comme des moulinets, les adversaires se pavanent l'un devant l'autre. Ce sont toujours deux adversaires du même sexe qui s'affrontent, tandis que leurs partenaires suivent le spectacle. Ces engagements, peuvent durer quelques heures, mais ils se terminent rarement par un véritable combat. Généralement, l'intrus est chassé ou quitte simplement les lieux.

Après avoir établi son territoire, le couple se met à la recherche de l'arbre où il creusera son nid. Surtout attiré par les arbres morts et les souches trouées de vieux nids, il peut commencer à creuser plusieurs trous dans différents arbres avant que la femelle, dans la plupart des cas, ne fasse un choix définitif. L'entrée de la loge peut se situer entre 1,5 et 18m du sol, mais elle est habituellement entre 3,6 et 9m.

Le couple met de 2 à 3 semaines pour creuser son nid, qui a la forme d'un flacon de 12 à 15cm de largeur sur 20 à 30cm de profondeur. Un col court et étroit au sommet forme l'entrée.

C'est surtout le mâle qui creuse: il y consacre presque la moitié des heures de clarté et s'arrête aux 20 minutes environ pour se reposer et se nourrir. Tout d'abord, il taille un passage juste assez large pour que lui et sa partenaire puissent s'y faufiler. Ensuite, il s'attaque à la cavité intérieure, qu'il agrandit et rend plus profonde en rejetant les copeaux par-dessus son épaule. Lorsque la loge est assez profonde pour qu'il puisse y pivoter librement, il transporte les copeaux dans son bec et les éparpille d'un mouvement brusque de la tête. C'est ordinairement cette loge qui lui servira désormais d'endroit où dormir la nuit.

Pendant ce temps, la femelle survole les environs, se nourrit et chasse les intrus. Lorsque le nid est presque terminé, elle s'y intéresse davantage et commence à travailler à son aménagement avec zèle. Pendant la majeure partie de son temps libre , le couple se fait la cour par des cris, des tambourinages, des poursuites et des parades.

La femelle pond généralement 4 ou 5 oeufs blancs, quelquefois 6 ou 7. Pendant la ponte, le mâle et la femelle se remplacent pour faire la sentinelle à l'entrée du nid. Pendant toute la période d'incubation,qui dure 12 jours, le couple couve presque constamment ses oeufs. Durant le jour, mâle et femelle se relaient au nid.

Une fois l'incubation commencée, le couple se relaie pour couver les oeufs le jour pendant des périodes de 15 à 30 minutes. La plupart des relèves ont lieu directement et immédiatement dans le nid. La nuit, c'est le mâle seul qui veille sur les oeufs, tandis que la femelle dort ailleurs. Ainsi, les oeufs sont couvés presque sans interruption pendant les 12 jours que dure l'incubation.

Oisillons

À l'éclosion des oeufs, les oisillons, minuscules et presque nus, gisent sans défense au fond de la cavité. Pendant quelques jours, les parents les réchauffent comme ils l'ont fait pour les oeufs et ils leur apportent à l'occasion de petits insectes afin de les nourrir.

Lorsque les oisillons deviennent plus robustes, les parents cessent peu à peu de les réchauffer et passent plus de temps à aller leur chercher de la nourriture. À l'arrivée d'un des parents leur apportant la becquée, le bruit des oisillons au nid devient plus intense. Plongeant tête première dans la loge, l'adulte touche de son bec la commissure gonflée du bec de l'oisillon, qui s'ouvre alors, et il peut ainsi lui introduire de la nourriture dans la gorge. La nichée apaisée, l'adulte ramasse la fiente et la transporte à l'extérieur.

C'est ainsi que les oisillons sont nourris et que leur nid reste propre jusqu'à ce qu'ils aient presque la taille des adultes, soit vers l'âge de 17 ou 18 jours. Ils ressemblent à leurs parents, sauf que la couronne des jeunes mâles est teintée de rouge vif, de rouge brique ou de rose, tandis que celle des jeunes femelles est rayée ou tachetée de blanc. Les oisillons sont alors assez forts pour grimper tour à tour jusqu'à l'entrée du nid, d'où ils observent les environs. Comme ils réclament de plus en plus de nourriture, les parents leur en apportent d'énormes quantités aux trois minutes environ. Chacun des quatre oisillons est donc nourri quatre ou cinq fois l'heure.

Lorsque les oisillons sont sur le point de quitter le nid, les parents diminuent la fréquence des repas, ce qui rend les jeunes oiseaux plus actifs et affamés. Le petit qui entre et sort du nid avec vigueur pousse des cris aigus, mais il ne semble pas pressé de s'envoler. Il s'écoulera presque une journée avant que le jeune pic, maintenant aussi gros que ses parents et bien propre, s'aventure assez loin pour déployer ses ailes neuves. Une fois sorti, il pourra voler sur une assez longue distance avant de se poser en toute sécurité.

Lorsque tous les petits ont quitté le nid, ils se cachent parmi les feuilles des grands arbres et crient pour réclamer de la nourriture à leurs parents. En moins d'une semaine, ils suivent leurs parents et demandent la becquée en lançant des cris aigus accompagnés de battements d'ailes. Dès l'âge de trois à quatre semaines, ils sont en mesure de se suffire à eux-mêmes. C'est à ce stade de leur cycle de vie que la mortalité est la plus fréquente, car les jeunes pics ne sont plus protégés par leurs parents vigilants.

Mue

Les adultes commencent à perdre leurs plumes usées et souillées pendant que les jeunes sont encore au nid. Les deux puissantes rectrices centrales se renouvellent seulement lorsque toutes les autres ont été remplacées; sans cela, le pic aurait de la difficulté à grimper pendant la mue. Au cours de cette période d'environ deux mois, l'oiseau vit à peu près isolé, se repose et se nourrit. En septembre, une fois la mue terminée, il arbore la partie blanche de son ses nouveau plumage d'hiver, dont la légère teinte jaunâtre disparaîtra avec le temps.

Les jeunes Pics mineurs renouvellent aussi leur plumage. Ils commencent à muer vers la fin de l'été, et leur livrée devient alors celle de l'adulte. Leur couronne est noir jais, et les jeunes mâles arborent, à l'arrière de la tête, la tache rouge vif caractéristique de l'adulte.

Habitudes alimentaires

Pic mineur en quête de nourriture Pic mineur en quête de nourriture

Au printemps et à l'été, le Pic mineur se nourrit d'insectes qui volent ou qui vivent cachés au fur et à mesure qu'ils se présentent. Une fois les oeufs éclos, il doit chercher pour les petits des proies progressivement plus grosses et plus faciles à capturer, comme des chenilles, des éphémères et des papillons, afin d'augmenter le volume et la fréquence d'alimentation pour suivre le rythme de leur croissance. En saison, les petits fruits sauvages sont aussi au menu.

Après la nidification, le Pic mineur reprend son régime alimentaire spécialisés. Il traque une myriade de petits insectes et de larves qui infestent les arbres et se cachent dans les fentes et les crevasses des branchettes, des rameaux et des troncs. Comme il est petit et léger, il peut aller chercher sa nourriture dans les branches supérieures, tandis que les autres pics, plus gros, doivent se limiter aux parties les plus fortes de l'arbre.

Contrairement à d'autres espèces comme le Pic à tête rouge, le mineur ne fait pas de réserves pour l'hiver. Pendant la période hivernale, un couple de Pics mineurs peut débarrasser complètement un arbre de toutes les cochenilles qui l'infestent. Avec leur bec pointu, les oiseaux percent de petits trous ou ouvrent les fentes où se cachent les insectes pour ensuite les capturer avec leur longue langue agile. Il arrive souvent qu'ils passent la plus grande partie des heures de clarté à fouiller méthodiquement les endroits qui, dans les mêmes arbres, rapportent bien, jusqu'à ce qu'ils aillent dormir, juste avant le coucher du soleil, chacun dans la loge creusée dans le tronc d'un arbre.

Ennemis

Devant le danger, la première réaction du pic consiste à se servir du tronc ou de la branche d'un arbre comme d'un bouclier. Plus d'un Pic mineur a évité les serres d'un faucon ou l'étreinte et le bec d'une pie-grièche en sautant rapidement de côté pour se cacher derrière le tronc d'un arbre.

Bien entendu, la cavité qui sert de nid fournit aux oisillons une bien meilleure protection qu'un nid à découvert. Son entrée étroite, taillée sur mesure, met les adultes et les petits à l'abri de presque tous les prédateurs, sauf des serpents. Même un écureuil aura beau gratter et ronger le bois mou pour atteindre les oisillons, il aura peu de chances de tromper la vigilance de la sentinelle au bec pointu qui garde l'entrée. Cependant, si un prédateur qui peut grimper le surprend la nuit, dans une embrasure en train de pourrir, le Pic mineur est condamné.

Pour l'être humain, peu d'oiseaux ont un dossier aussi irréprochable que le Pic mineur. Son comportement tranquille et sa lutte incessante aux ravageurs, lui valent notre respect et notre attention.

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Fait par Tiffany le 3 décembre 2002

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Mis à jour le 05 décembre, 2002