Appel aux démocrates (Suite 3)
Par Martin
EDZODZOMO-ELA
Depuis
1990, avec l’avènement de la démocratie de la “ paristroïka
mitterrandienne ”, Bongo s’impose par la fraude électorale et par la
corruption de toute la classe politique mise en place, dont les pseudo-partis
dits de l’opposition servent de faire-valoir.
C’est ainsi que Bongo n’a pas eu à craindre le multipartisme qu’il aura
initié lui-même à forte dose de corruption.
Et en cela, il a eu toutes les raisons de ne pas craindre ce
multipartisme qu’il a fini par si bien verrouiller. Au Gabon, si le parti unique qui a prévalu pendant un quart de
siècle, de 1967 à 1990, a été une simple dictature, le multipartisme issu des
assises de mars-avril 1990 n’est pas la démocratie. Bongo s’impose par la fraude
et le détournement du processus électoral : on voit à l'évidence cette vérité
que relève Christine Ockrent, quand elle écrit : "Si les champions de
la démocratie ne savent pas toujours la défendre, ses ennemis en connaissent le
mode d'emploi"[1]. Il s’en
est même fait déclarer “ docteur ” par sa connaissance de son mode
d'emploi, dont il se sert efficacement pour se maintenir au pouvoir et
continuer à ruiner son peuple. Il est d’ailleurs assisté en cela par le système
dont il est un fidèle et efficace serviteur.
Le fait de bafouer à volonté l’opinion populaire, corrompre et
pervertir le vote populaire, équivaut à chaque fois à un casus belli contre
le peuple. C’est là qu’il faut découvrir
la cause des coups d’État militaires (comme récemment au Niger) ou le fondement
de l’instabilité chronique qui conduit à la longue aux guerres civiles
(l’Afrique centrale connaît un tel processus depuis quelques temps). La vie politique gabonaise a donc été
marquée depuis 1990 par une succession de coups d’État électoraux qui ont vu
Bongo se maintenir au pouvoir contre la volonté du peuple.
Reprogrammé
pour un autre mandat de 7 ans en décembre dernier, Bongo fait face aujourd’hui
à une situation de crise aiguë multisectorielle, qui n’est que la conséquence
logique de sa prédation de l’économie gabonaise depuis son imposition par
Foccart à la tête de “ la préfecture gabonaise ” en 1967. On sait que
les 32 ans de gestion économique de ce régime est l’exemple le plus déshonorant
de toutes les ex-colonies françaises en Afrique, non seulement par son
incompétence mais aussi par sa corruption, son ethnicisme exacerbé et ses abus
de pouvoir répétés contre des citoyens croulant sous une misère inacceptable
pour un pays regorgeant de richesses comme le Gabon.
Ainsi, le Gabon est dans une
totale impasse politique. Le processus de démocratisation enclenché en 1990 a
été depuis totalement confisqué par le système mis en place par Foccart avec
les pseudo-indépendances octroyées en 1960.
La preuve en a été donnée par ce que nous avons connu autour, en-dessous
et au-dedans de toutes les
consultations qui ont eut lieu depuis : élections locales, législatives,
sénatoriales et présidentielles. On
constate qu’au lieu d’une consolidation du processus de démocratisation de la
société gabonaise, c’est à la putréfaction du politique qu’on assiste, les
Gabonais parlent de “ pouritique ”. Un certain monde s'est écroulé : des naufrages après des
trahisons des prétendus partis de l'opposition n'en finissent pas de se
succéder, pendant que le parti au pouvoir depuis 32 ans se désagrège par les
luttes souterraines pour la succession.
Il
arrive toujours dans l’histoire des peuples un moment où un homme s’élève de la
masse longtemps méprisée et ignorée, un humble fils du peuple parmi les
humiliés se redresse devant le tout puissant Goliath pour défendre l’honneur
des pauvres et sauvegarder la dignité de son peuple au moment où celui-ci n’a
plus que ses yeux pour voir ses malades mourir sans aucune assistance médicale,
et ses enfants s’éteindre à petit feu dans le mépris et l’indifférence totale
des dirigeants repus et arrogants. Il arrive dans l’histoire des sociétés
humaines un moment où les régimes dictatoriaux qu’on croyait les plus enracinés
croulent comme des fétus de paille sous la vindicte féroce d’un peuple qui n’en
peut plus. Il arrive toujours un temps où, au moment le plus inattendu, un
régime politique dictatorial qui a longtemps méprisé le peuple finit par tomber.
Ce moment, les Gabonais trop longtemps humiliés l’attendent aujourd’hui avec
confiance, calme et dignité. Ils l’attendent car, pour eux, le 1er décembre
1998, ils se sont retrouvés avec leurs espoirs de changement dans un des leurs
: Martin EDZODZOMO-ELA, qui a parlé en leur nom et revendiqué le pouvoir
suprême pour leur compte. En effet,
selon la très grande majorité des gens, et comme le relate l’hebdomadaire
gabonais Le Réveil, du 4 décembre 1998 :
“ Des
cinq novices qui sollicitent les suffrages des Gabonais, Martin Edzodzomo-Ela
est la bonne surprise de cette campagne présidentielle. Se présentant comme un
candidat hors partis, mais surtout comme le candidat des makayas,[2]
il n’a suscité qu’un intérêt de curiosité amusée pour un personnage qui
semblait surgir de nulle part. Son
heure de gloire a sonné le mardi 1er décembre lorsqu’il est passé à l’émission LE
DEBAT où sa présentation a été unanimement saluée comme la meilleure.
Sans verser dans la démagogie, si facile en ces temps de campagne, cet
économiste protestant enraciné dans la culture fang a séduit par le sérieux de
ses propositions qui placent l’homme au centre de l’entreprise du
développement. Il n’était que de voir les mines ébaubies des journalistes sur
le plateau pour mesurer la qualité de la prestation du candidat Edzodzomo-Ela.
Si nous n’étions dans un domaine aussi sérieux que la politique, on eut pu
tirer, au lendemain de cette émission : “ a star is born ”. Mais cette nouvelle étoile, sans appui
militant, a peu de chance d’inquiéter les poids lourds du scrutin.”
Malheureusement, comme cela était
programmé d’avance, le poids lourd de la Françafrique, Omar Bongo, s’est
maintenu au pouvoir, perpétuant une fois de plus “ l’acceptation, en
tant qu'état habituel et normal, d'une irrégularité, d'une chose qui continue
d'apparaître anormale, mais que l'on continue d'accepter ”. Or, comme il n'est pas possible de convertir
en une saine normalité ce qui, dans son essence même, est criminel et anormal,
l'individu décide de s'adapter lui-même à la faute essentielle et de devenir
ainsi "partie intégrante" du crime et de l'irrégularité qu'il
entraîne ”.
Mais,
cette fois-ci, “ cette nouvelle étoile ” dont parle le journaliste,
née dans le ciel politique gabonais en ce 1er décembre, n’aura pas été un
simple météore pour le peuple des “ Makaya ”. Celui-ci a, depuis ce
jour, dans son intime conviction l’espoir et l’assurance enfin que
l’après-Bongo est aujourd’hui tout sauf catastrophique. Le changement désiré
est aujourd’hui possible. Ce n’est donc plus qu’une question de s’y préparer
dans le calme et la sérénité. C’est du moins le message de courage et
d’espérance que nous portons et que le peuple a reçu afin d’accompagner enfin
celui qu’ils désignent désormais comme le “ Président des Makaya ”,
leur président de cœur, comme en témoigne l’intérêt énorme que toutes les
couches de la population gabonaise nous apportent depuis que nous leur avons
été révélés lors de la campagne présidentielle de décembre 1998.
Cet
appui militant, qui se manifeste partout dans le peuple, a cependant besoin
d’être conforté, organisé et surtout canalisé pour qu’il débouche sur une vraie
perspective de développement de la société gabonaise. Il est impératif qu’un
vrai dialogue puisse s’établir entre toutes les couches de la population afin
qu’ensemble le peuple puisse assumer dans l’unité le défi de l’édification
d’une nation moderne.
(à suivre)
continuez la lecture (suite 4 et fin)
[1]dans un éditorial du
journal l'Express (16/11/95).
[2]Le
“ Makaya ” désigne l’indigène gabonais, c’est-à-dire la majorité des
citoyens gabonais exclus de l’abondance de l’Eldorado , au profit du
“ Mamadou ”, qui est lui partie intégrante du système. Membres de la
nomenclature, s’y ajoutent tous les expatriés européens et autres qui tous
profitent largement et à des degrés divers du régime de Bongo. Ce sont les
“ en haut d’en haut ”, et le Makaya est le “ en bas d’en bas ”
de chez nos frères Ivoiriens.