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Voie de fait contre l’Association des Magistrats Tunisiens

Les autorités publiques viennent de franchir un palier supplémentaire dans la persécution des magistrats tunisiens.
En effet le 30 août, l’avocat général près la Cour d’appel de Tunis, mandaté par le ministère de la Justice, a convoqué les responsables de l’AMT pour leur demander oralement de lui remettre les clés du siège de l’AMT sis au Palais de Justice.
Ces derniers ont contesté la légalité de cette démarche en précisant que l’Avocat général n’avait pas qualité pour agir et que seule une procédure judiciaire serait qualifiée pour retirer la jouissance de son local (dont l’AMT dispose depuis 1946) à un bureau démocratiquement élu ; ou alors une décision administrative (attaquable devant le Tribunal administratif) émanant du ministère de l’Intérieur dont relèvent les associations.

Le 31 août, les membres de l’AMT n’ont pu accéder à leur local, les serrures ayant été changées et ont fait constater cela par huissier notaire.

Rappelons que l’AMT est dans le collimateur du ministère de la Justice qui a multiplié les actes de harcèlement depuis l’élection du son nouveau bureau au congrès de décembre 2004 qui a voté une motion présentant des revendications institutionnelles visant à garantir une réelle indépendance de la Justice. Après de nombreuses et vaines tentatives de déstabilisation menées à travers des juges aux ordres, le ministère de la justice a exercé des mesures de rétorsion (mutations disciplinaires) contre les membres actifs du bureau au lendemain de l’adoption d’une nouvelle loi sur le statut des magistrats qui va aux antipodes des aspirations formulées par l’AMT.

Le CNLT,

  • condamne avec la plus grande vigueur ces procédés de délinquants, que l’on ne peut interpréter autrement que comme une voie de fait.
  • Rappelle à l’Etat tunisien ses engagements internationaux en matière d’indépendance de la justice et notamment l’article 1 des Principes fondamentaux relatifs à l'indépendance de la magistrature (1985) des Nations Unies qui stipule « Il incombe à toutes les institutions, gouvernementales et autres, de respecter l'indépendance de la magistrature. »
  • Rappelle que le la liberté d’association est garantie également aux magistrats et notamment l’article 9 des «Principes fondamentaux relatifs à l'indépendance de la magistrature (1985) de l’ONU qui énonce « Les juges sont libres de constituer des associations de juges ou d'autres organisations, et de s'y affilier pour défendre leurs intérêts, promouvoir leur formation professionnelle et protéger l'indépendance de la magistrature. »
  • Il rappelle aux magistrats du parquet leurs devoirs internationaux et notamment l’article 3 des Principes directeurs applicables au rôle des magistrats du parquet (1990) de l’ONU qui dispose « Les magistrats du parquet, en tant qu'agents essentiels de l'administration de la justice, doivent toujours préserver la dignité et l'honneur de leur charge. »
  • Assure les magistrats tunisiens groupés autour de leur association de sa solidarité entière.

Pour le Conseil,
La porte-parole
Sihem Bensedrine
sbensedrine@cnlt98.org