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La mise à jour de cette notice a
été faite par M. Boubacar Issa Abdourhamane, doctorant au CEAN, IEP-Université Montesquieu-Bordeaux IV |
Le Mali offre lexemple dune transition réussie par rupture avec le régime antérieur, en loccurrence le régime du Général Moussa Traoré, au pouvoir de 1968 à 1991. Celui-ci sappuie sur larmée et le parti unique, lUnion démocratique du peuple malien (UDPM). Mais dès la 1990, des voix commencent à sélever pour réclamer la libéralisation du régime. Le Président Traoré sétant prononcé contre le multipartisme, le congrès du parti renvoie en juin la discussion sur la question à lannée suivante. En réponse, la centrale syndicale unique lUnion Nationale des Travailleurs du Mali (UNTM) et un groupe de 175 personnalités demandent en août, lautorisation du multipartisme. A ces revendications, sajoutent dès juillet 1990, des heurts sanglants entre l'armée et les rebelles touareg dans le nord du pays. En décembre, les manifestations et les grèves se développent à Bamako pour la démocratisation et l'amélioration des conditions de vie. A partir de janvier 1991, la situation tourne à la désobéissance civile. L'UNTM (Union nationale des travailleurs du Mali) décrète une grève générale illimitée, lopposition se regroupe au sein dune coordination des associations démocratiques (CAD) et des violentes manifestations suivies démeutes se déroulent quotidiennement à Bamako. Le pouvoir refuse toute concession et ordonne à larmée de tirer sur le foule. En quelques jours, on enregistre plus dune centaine de morts. Le 26 mars, le régime du général Moussa Traoré est renversé à la faveur dun coup dEtat. Le Lieutenant-colonel Amadou Toumani Touré prend la tête dun Conseil National de Réconciliation (CNR) qui suspend toutes les institutions et annonce sa volonté daller rapidement vers un régime démocratique. Avec la coopération de la société civile, le CNR est remplacé par un Comité transitoire pour le salut du peuple (CTSP) composé de civils et de militaires. En avril 1991, un gouvernement de transition est nommé et les partis politiques sont autorisés. Malgré une tentative de coup d'Etat le 15 juillet 1991, la Conférence Nationale prévue se tient du 29 juillet au 12 août 1991. Elle regroupe 36 partis et 1070 associations et adopte notamment un projet de Constitution, une charte des partis et un code électoral. la Constitution de la 3ème République est adopté par référendum avec 98,35 % des voix le 12 janvier 1992. Le 23 février et 9 mars 1992, se déroulent les élections législatives (scrutin uninominal majoritaire à deux tours) qui voient la victoire de l'ADEMA (Alliance pour la Démocratie au Mali), avec 76 sièges sur 116, aucun autre parti natteignant 10 sièges. Cest donc sans surprise que Alpha Oumar Konaré, candidat de ce parti, gagne les élections présidentielles au second tour du 16 avril 1992 avec de 69,03 % des voix devant Tiéoulé Mamadou Konaté, candidat lUnion Soudanaise (US-RDA). Le lieutenant-colonel Amadou Toumani Touré, conformément à son serment, ne sest pas présenté. La gestion quotidienne de lEtat a rencontré de nombreux défis durant ces premières années. Outre le traitement de la rébellion touarègue, compliquée par la constitution dune puissante milice songhaï dautodéfense dans le nord, le Mouvement patriotique Ganda Koy (MPGK), le pouvoir a fait face à des troubles sociaux impliquant élèves et syndicats de travailleurs. La première question est finalement réglée avec la signature à Alger, le 11 avril 1992, du "Pacte national "entre le gouvernement, les différents mouvements et le front unifié de l'Azawad, la signature, le 11 novembre 1994, des accords de paix entre les rebelles et le Mouvement patriotique Ganda Koy mettant un terme définitif à la rébellion touarègue, ainsi quavec la rencontre de Tombouctou entre le gouvernement et les partenaires pour le développement du Nord-Mali du 15 au 18 juillet 1995. Au regard de la domination de lADEMA sur la scène politique, le deuxième gouvernement dirigé par Abdoulaye Sékou Sow, qui remplace celui de Younoussi Touré, est ouvert à l'opposition. Mais lexpérience fait long feu et avec le Premier ministre Ibrahim Boubacar Kéita, les conflits sont quotidiens avec lopposition. Une tentative de coup dEtat impliquant des civils et des militaires est même découverte en octobre 1996. Lopposition radicale, regroupée au sein dun Rassemblement des forces patriotiques (RFP), boycotte ainsi ladoption par l'Assemblée Nationale de la loi électorale en janvier 1997. Elle participe cependant à la Commission électorale nationale indépendante (CENI) et à ladoption de la loi organique du 11 février portant à 147 le nombre de députés à l'Assemblée nationale. Après la dissolution de lAssemblée le 3 mars, le premier tour des élections législatives se déroule le 13 avril. Devant les problèmes manifestes dorganisation, lopposition demande et obtient lannulation du scrutin. Elle se retire finalement de lensemble du processus électoral. Le 17 mai, Alpha Oumar Konaré est réélu sans affronter les principaux leaders de lopposition. Les législatives des 23 juillet et 3 août sont remportées par lADEMA, à lexception de 5 sièges revenus à des petits partis modérés, qui acceptent dentrer au gouvernement, dirigé à l'époque par Ibrahim Boubacar Kéita. Le Mali est certainement aujourdhui, une référence sur la plan de la démocratisation et de lEtat de droit. Cependant, la crise institutionnelle née des désaccords entre pouvoir et opposition plane toujours sur le pays. Une partie de lopposition, notamment le Mouvement patriotique pour le renouveau (MPR), de Choguel Maïga, a ainsi boycotté le processus des élections locales de mai et juin 1999. Avec le Congrès national dinitiative démocratique (CNID) de Maître Mountaga Tall, il refuse de reconnaître la légitimité du pouvoir et poursuit les campagnes de contestation. Le gouvernement malien a entamé un projet de réforme institutionnelle. Un forum national sest réuni pour réfléchir notamment à lélaboration dune charte des partis et dun statut de lopposition, mais aussi sur la révision de la Constitution, de la loi sur la presse et de la loi électorale, afin déviter quun seul parti monopolise la totalité du pouvoir. Le président Konaré étant hors de course pour la prochaine élection prévue pour 2002, la lutte pour sa succession a ouvert une crise au sein de l'ADEMA. Le Premier Ministre Ibrahim Boubacar Keita, également Président de l'ADEMA est remplacé en février 2000 par Mambé Sidibé. Par la suite Boubacar Keita sera contraint d'abandonner son titre de Président de l'ADEMA alors qu'il était perçu comme un très probable "dauphin" de Alpha Oumar Konaré, le Président sortant. Le Congrès extraordinaire du parti tenu en novembre 2000 à Bamako désigne Diacounda Traoré pour le remplacer. Ce changement au sein de l'ADEMA marqué par le déclin de l'ancien Premier Ministre, ouvre aussi aux partis d'opposition qui avaient boycottées les dernières présidentielles de nouveaux espoirs pour mettre un terme à l'hégémonie de l'ADEMA sur le champs électoral malien lors présidentielles prévues pour 2002. La Constitution de la IIIème République crée un régime semi-présidentiel où le Président dispose de larges pouvoirs assortis de garde-fous. Le Président de la République est élu au scrutin majoritaire à deux tours pour un mandat de 5 ans, renouvelable une seule fois. Il dispose du pouvoir de dissoudre l'Assemblée nationale. Le président Konaré a utilisé ce droit le 3 mars 1997. Le Président de la République nomme le Premier ministre et met fin à ses fonctions selon la lettre de la Constitution, mais le régime étant semi-présidentiel, la possibilité de cohabitation existe et le Premier ministre est responsable devant l'Assemblée nationale. L'Assemblée nationale est composé de 147 membres élus pour un mandat de cinq ans. Elle contrôle l'action du gouvernement et a linitiative des lois concurremment avec le Président de la République. Elle peut renverser le gouvernement par une motion de censure ou en lui refusant sa confiance lorsque le Premier ministre engage sa responsabilité sur une question de politique générale. La domination de lADEMA au Parlement fait coïncider majorité parlementaire et majorité présidentielle. La Cour constitutionnelle comprend neuf membres nommés à égalité par le Président de la République, le président de l'Assemblée nationale et le conseil supérieur de la magistrature pour un mandat de sept ans renouvelable une fois. Elle est juge de la constitutionnalité des lois et garante des libertés publiques ainsi que des droits fondamentaux de la personne humaine. Cest elle qui tranche les conflits dattribution entre les institutions de lEtat et qui connaît du contentieux électoral. Un Haut Conseil des collectivités est créé pour montrer la détermination du pays à décentraliser l'Etat. Il existe aussi un Conseil économique social et culturel ainsi quun Haut Conseil des Maliens de l'extérieur. Le Président Alpha Oumar Konaré a annoncé la tenue au cours du premier trimestre 2001 d'un référendum pour approuver une révision constitutionnelle destinée à garantir plus de démocratie au Mali. L'appareil judiciaire est en rénovation avec le programme décennal de développement de la justice (PRODEJ). La Cour Suprême est l'instance judiciaire supérieure du pays. Elle comprend une chambre administrative, une chambre judiciaire et une chambre des comptes. Le président et le vice-président de la Cour Suprême sont nommés par le Président de la République qui est lié par les propositions du Conseil supérieur de la magistrature. Celui-ci est censé garantir lindépendance des magistrats. Il est cependant présidé par le Président de la République. La justice malienne est entrée dans une phase active dans la lutte contre la corruption lancée par le Président Konaré. La révision constitutionnelle proposée au référendum en 2001 prévoit une réforme des institutions judiciaires. La libre administration des collectivités territoriales est prévue par la Constitution. La politique de décentralisation a été instituée par la loi 93-008 du 11 février 1993 déterminant les conditions de la libre administration des collectivités territoriales. Un arsenal juridique adopté le 10 octobre 1996 est venu compléter cette loi, en prévision des élections locales. Il sagit de la loi 96-050 sur la constitution et la gestion du domaine des collectivités; la loi 96-051 déterminant les ressources fiscales des communes ; la loi 96-058 déterminant les ressources fiscales du district de Bamako et des communes qui le composent ; la loi 96-059 portant création des communes. Outre le district de Bamako, le Mali compte 8 régions administratives, des cercles et des communes rurales qui viennent sajouter à des communes urbaines. Le processus de communalisation, qui nest possible aussi que parce que la rébellion armée touarègue dans la nord du pays a pris fin, se fait progressivement. Le pays a organisé par étapes les élections locales ; le 2 mai 1999 dans quatre premières régions (Koulikoro, Ségou, Sikasso, Kayes, soit 492 communes) et le 6 juin 1999 dans quatre autres régions (Gao, Tombouctou, Kidal, Mopti, soit 190 communes). Au terme de ce processus, 682 nouvelles communes administrées par des conseils élus ont été créées. Le multipartisme est désormais inscrit dans la Constitution. Le pays compte plus de 47 partis déclarés. Parmi eux, environ 20 sont représentés dans les conseils municipaux, 5 sont au gouvernement et 8 à l'Assemblée nationale (11 à l'Assemblée nationale précédente). Les deux institutions sont toutefois largement dominées par le parti au pouvoir, lAlliance pour la démocratie au Mali. Cependant, 4 sont des partis à dimension nationale qui sont : - l'Alliance pour la Démocratie au Mali/Parti Africain pour la Solidarité et la Justice (ADEMA/PASJ) qui est le parti présidentiel. Il dispose de la majorité absolue à l'Assemblée avec 128 des 147 sièges. Dirigé d'abord par l'ancien Premier ministre Ibrahim Boubacar Keita, le parti a pour actuel Président Diacounda Traoré désigné par le Congrès extraordinaire tenu en novembre 2000. - le Comité National d'Initiative Démocratique/Faso Yiriwa Ton (CNID/FYT), conduit par Mountaga Tall, un des opposants radicaux. - l'Union Soudanaise/Rassemblement démocratique africain (US/RDA). C'est le plus vieux parti du Mali. Il a connu aussi des scissions internes ayant abouti à plusieurs tendances (dont le Bloc démocratique pour l'intégration africaine, BDIA, de feu Tiéoulé Konaté). - le Mouvement Patriotique pour le Renouveau (MPR), dirigé par Choguel Maïga, qui se réclame de lancien Président Moussa Traoré. D'autres partis sont plus ou moins importants comme lUFD (Union des forces Démocratiques, le RDT (Rassemblement pour la Démocratie et le Travail), le RDP (Rassemblement pour la démocratie populaire), le PDP (Parti pour la Démocratie et le Progrès), le PARENA (Parti pour la Renaissance Africaine), etc. Le parlement malien a adopté une loi sur le financement des partis politiques en juillet 2000. La Constitution reconnaît le pluralisme syndical et le droit de grève. Le poids politique des syndicats est important. L'Union nationale des travailleurs du Mali (UNTM) reste la plus grande centrale syndicale suivie du Syndicat national de l'éducation et de la culture (SNEC) et de la Fédération de l'éducation nationale (FEN). On compte aussi des syndicats de magistrats, davocats, de journalistes, etc. Le mouvement estudiantin est structuré autour de l'AEEM (Association des élèves et étudiants du Mali) qui est le plus contestataire des mouvements syndicaux maliens. Ses actions sont à la base de la "révolution" qui a renversé la dictature. Ses récentes actions de revendication risquent de compromettre lannée académique 1998-1999. La Constitution malienne du 25 février 1992 affirme lattachement du pays à la déclaration universelle des droits de lhomme de 1948 et à la charte africaine des droits de lhomme et des peuples du 27 juin 1981. Elle fait aussi référence " aux martyrs tombés sur le champ dhonneur pour lavènement dun Etat de droit et de démocratie pluraliste ". Il existe un ministère des Droits de lhomme et des Relations avec les institutions. Il existe plusieurs organisations luttant pour les droits de l'homme : à côté de l'Association Malienne des Droits de lHomme(AMDH) qui reste le plus grand mouvement, il faut signaler le Club Mandela qui depuis la fin de l'apartheid, s'est converti dans la défense des droits de l'homme et de la démocratie et un Bureau de coordination dAmnesty International. Depuis la fin de la dictature de Moussa Traoré, le Mali sest construit une des meilleures réputations sur le plan des droits de lhomme en Afrique. Cependant, les troubles politiques consécutifs aux manifestations ou aux désaccords entre gouvernement et opposition sur les élections générales de 1997 ont donné lieu à des arrestations régulières depuis 1995. Amnesty a qualifié les personnes arrêtées de prisonniers dopinion. Notons aussi que lancien Président Moussa Traoré a été condamné à mort, mais le Président Konaré qui est opposé à la peine capitale, a commué sa peine. D'autre part, plusieurs organisations de défense es droits de l'homme s'inquiètent de la lenteur judiciaire qui conduit à un surpeuplement des prisons par des détenus en attente d'être jugés. Depuis la chute du président Moussa Traoré et la Conférence nationale, on assiste à une multiplication des titres de la presse écrite. On en dénombre actuellement plus d'une cinquantaine. A côté du quotidien gouvernemental l'Essor, les principaux titres sont : Le Républicain, Le Malien, LObservateur, Les Echos, L'Aurore, Kabako, Le Tambour, Le Soir, Info-Matin, Sud-Info, Le Courrier, LIndépendant, Le Scorpion, Le Carcan, La Cigale muselée, Nouvel Horizon, etc. Certaines organisations relèvent quelques excès policiers à lencontre de la presse, mais la presse malienne est certainement lune des plus libres sur le continent comme on peut le constater à travers les articles et caricatures défavorables au président Konaré dans des journaux comme LAurore, Le Soir, Sud-Info, Le Scorpion. Ce dernier, qui a fondé le journal Les Echos dans les années 80, envisage au terme de son deuxième mandat, de créer un journal. Lors de la réunion de la presse privée tenue à Bamako à la fin 98, il a été salué par les journalistes pour son fair-play. Lespace radiophonique est également libre et connaît une multiplication des stations à côté de lorgane gouvernemental et des radios internationales qui émettent en FM notamment à Bamako. On note une originalité, les radios locales et communautaires. L'Assemblée Nationale malienne a voté en juillet 2000 une loi sur la presse qui réduit les peines appliquées aux délits de presse. |