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Au moins 7 colons portant le nom de famille Prou émigrèrent au Canada, tout au long du régime français. Ils venaient presque tous du Poitou, région des hommes valeureux. C'est à Poitiers que Charles Martel brisa le croissant de l'Islam en 732. Prou, selon Dauzat, signifie preux ou, si vous voulez, brave, vaillant et rusé.
Limitons nos recherches à Jean Prou, aujourd'hui Proulx, fils de Jean et de Louise Vallée, de la paroisse de Notre-Dame de Nantilly, autrefois le coeur de la ville de Saumur, à mi-chemin entre Tours et Angers.
Notre-Dame de Nantilly possède une cathédrale romane qui conserve des tapisseries du 15e et 16e siècle dont l'arbre de Jessé et le Bal des Sauvages. De ce coin du beau pays de France, nous sont venus les ancêtres Chouinard et Lemay, connus de nos lecteurs. Saumur est de nos jours une petite ville de près de 20,000 habitants, célèbre depuis trois siècles par son industrie concernant les médailles et les chapelets. Ce chef-lieu d'arrondissement du département de Maine-et-Loire, centre de communications très important sur la rive gauche du fleuve Loire et au confluent de la rivière Thouet, a beaucoup souffert de la guerre en juin 1940.
C'est de ce coin de vignobles, 80% de la production vinicole angevine, de cette terre qui écoule ses eaux et ses routes vers l'Atlantique, qu'est parti pour la Nouvelle-France, Jean Prou.
Humble arrivant
Jean Prou, plus que bien d'autres, eut une vie calme, pacifique et tenace: aucun fracas, aucune dispute. S'il fallait lui décerner une médaille, ce serait celle de l'humilité.
Son arrivée au pays se fit sans bruit. Personne n'a encore trouvé son contrat d'engagement. Son nom apparaît pour la première fois dans notre histoire nationale au recensement de 1667, février ou mars. Conclusion: Jean était au pays depuis l'été précédent, du moins avant la fermeture de la navigation.
Que dit ce recensement au sujet de l'ancêtre Prou? Peu de choses et beaucoup! Jean était domestique chez Louis Couillard, sieur de L'Espinay, écuyer, seigneur de la Rivière du Sud (Montmagny). Louis Couillard semble demeurer à la Basse-Ville de Québec, rue Notre-Dame. Dans sa maison vivent 5 enfants de 2 à 14 ans, Geneviève Després, reine du foyer, 2 domestiques portant le prénom Jean. En effet, Jean Prou avait un compagnon de son âge, 22 ans, un homme tranquille comme lui, un gars de La Rochelle qui ne se mariera qu'en 1681 avec Marie Hayot, Jean Marchand, menuisier. Les serviteurs travaillaient ensemble pour le compte du seigneur. Ils accomplissaient leur 36 mois d'engagement, selon la coutume de l'époque.
Ces quelques renseignements fixent l'arrivée de Jean Prou en 1666; sa situation sociale: domestique; son âge, 22 ans.
Colon temporaire
En 1669, Jean pouvait légalement, comme citoyen à part entière, mettre ses pieds dans la terre canadienne. Le 23 juin, en présence du notaire R. Becquet, à la maison de son maître et seigneur Louis Couillard, il écoutait attentivement la lecture de son contrat d'achat d'une terre à la rivière à la Caille, aujourd'hui Montmagny trois arpents de terre consistante en haut bois, c'était un défi à ses bras et à son courage. De plus, chaque année au premier octobre, Jean devait payer à Couillard 1 sol de cens, 3 chapons vivants et 9 livres en argent de rente, valeur de 9 jours d'ouvrage, un maximum à l'époque. Il acquérait bien le droit de pêche sur le fleuve, devant sa propriété, mais avec l'obligation de donner au seigneur le dixième de tout poisson qui se peschera.
Jean Prou prit sa grande hache et au bois il alla, déserta une pointe de terre, construisit une cabane. Deux ans plus tard, il possédait déjà un bien qui avait une certaine allure. Évidemment, en ces temps-là, la fumée des abattis constituait un capital investi à long terme mais creusait le gousset de son investisseur. Le 22 février 1671, Guillaume Fournier de la Rivière St-Charles à Québec lui offrit 150 livres pour sa propriété dont 30 en argent comptant. Jean s'empressa d'accepter l'offre devant le notaire Becquet et se chercha de l'ouvrage un peu plus rémunérateur aux alentours de la capitale.
Seigneurie St-Luc
L'année suivante, nous retrouvons Jean Prou travaillant demeurant en cette ville de Québec.
Noël Morin,(2) époux de Hélène DesPortes, père de la première religieuse canadienne de l'Hôtel-dieu de Montréal; Marie (1649-1730), et du premier prêtre canadien, Germain (1642-1702), devint seigneur de Saint-Luc à Montmagny, le 15 novembre 1663. Cet arrière-fief Saint-Luc, un quart de lieue de front sur une demi-lieue de profondeur, côtoyait la seigneurie de La Couillardière ou Lespinay, à l'ouest de la rivière à la Caille. Les édifices religieux de St-Thomas se trouvent construits dans le fief St-Luc et sur un terrain concédé gratuitement à Mgr de Laval par Noël Morin lui-même. Jean Prou, 22 août 1672, accepte de Noël Morin une concession en tout semblable à sa première mais à des conditions un peu moins onéreuses. Jean avait le droit de pêche mais il devait avoir quatre arpents de bois abattu et débité... avant la fin de l'hyver prochain et d'y tenir feu et lieu (Rageot).
C'est sur cette propriété que Jean Prou installa ses pénates pour toujours, dans le fief St-Luc, en bordure de la seigneurie de Louis Couillard. En 1681, Jean déclarera posséder 1 fusil, 12 bêtes à cornes et 6 arpents en culture.
Les épousailles
Depuis quelques temps, Jean fréquentait Jacquette Fournier, fille de Guillaume, habitant de la Rivière-du-Sud, aujourd'hui St-François. Jean lui-même dans son contrat de mariage se dit habitant du même lieu. Peut-être travaillait-il pour le compte de son futur beau-père? A Québec, le 2 juin 1673, devant Becquet, notaire, les parents et amis de sa belle: Noël Morin, Hazeur et Denys Belleperche, Jean promettait d'épouser Jacquette, ce qui fut fait 3 jours plus tard, à l'église N. Dame de Québec, devant l'abbé Louis Ango. Témoins qui ont signé: Guillaume Fournier, Gilles Rageot et Pierre Soumande.
Jacquette Fournier née le 9 avril 1659 et baptisée à Québec le 10 par le Jésuite François Le Mercier, avait atteint ses 14 ans d'âge. Jean en avait 29.
Imbroglio
Le 16 juin 1673, Jean Prou seyeur de long et son compagnon Pierre Jallet s'engagent pour le compte de Noël Morin, charron. entrepreneur pour la monture de l'artillerie de canon de Québec. Les engagés doivent faire cinquante flasques pour faire les affûts marchants dud canon. Salaire 150 livres.
Ce Jean Prou, scieur de long, demeurant au logis dud Caddé, parait être cet autre ancêtre de même nom, veuf de Jeanne Chanot, qui épousera Jeanne Pinel, le 2 novembre 1676, à Québec; il s'établira à Neuville.
Lutte pour la vie
Louis Couillard, le 24 juillet 1674, promet s'acquitter une dette de 50 livres envers Jean Prou, qui sans doute avait travaillé pour le dit seigneur. Et, l'année suivante, 3 août 1675, Jean refile le compte du pauvre Couillard, qui ne l'a pas encore payé, à Pierre Blanchet, son beau-frère. Blanchet avait fourni son Beaupré à Prou. S'agit-il d'un mât de chaloupe ou d'une chaloupe baptisée Beaupré? Rien ne le précise.
L'on dirait que notre ancêtre se cache tellement il est difficile de le suivre à la trace. Le 6 octobre 1676, il accepte une autre concession de Louis Couillard, seigneur de la Rivière-du-Sud, de trois arpents de front.... sur quarante de profondeur, aux conditions habituelles du seigneur de Lespinay. Voisins: Pierre Joncas et Maurice Pasquier. Jean devait aller vivre sur sa concession... sans plus de précision. L'année suivante, 7 juillet 1678, Jean Prou, habitant de la Rivière à la Caille (Rageot), s'associa à Alphonse Morin dit Valcour, fils du seigneur. Ensemble ils feraient leurs labeurs, leurs semailles et cultiveraient leurs terres. Chaque propriétaire fournira ses 2 boeufs et ses voitures, etc. Valcour fera plus en prêtant sa charrue bien astiquée.
Puis, aucune mention de Jean Prou dans les papiers civils officiels pendant 20 ans. Le 14 août 1701, Jean Prou tout fourbu se rend à Québec où l'attend M. Anne Fortin, veuve de Jean Picard vivant marchand. La veuve exige devant le notaire Chambalon que Jean honore ses comptes avant trop longtemps... Le débiteur Prou admet devoir 700 livres et 16 sols pour l'achat de différentes marchandises et promet payer. Pareille dette ne sera acquittée qu'après sa mort avec les biens de sa succession.
Jean, honnête travaillant, malchanceux peut-être, n'avait certes pas la bosse des affaires.
Treize à table
Jean et Jacquette élevèrent 13 enfants: 6 filles et 7 garçons, tous nés et baptisés à Montmagny. L'aîné, mis au monde en mai 1676, reçut son prénom de son parrain Denys Belleperche. L'abbé Thomas Morel le baptisa à la Rivière-du-Sud, dit l'acte inscrit dans le registre de N.-D. de Québec. Catherine décéda le jour même de sa naissance. Denis, Jean-Baptiste, Pierre, Thomas, Joseph et Louis s'allièrent aux familles Gagné, Rousseau, Picard-Des Troismaisons, Caron, Bouchard et Dufresne. Louise, M.-Anne, M. Barbe, Angélique, Marie et Françoise épousèrent Pierre Gagné, Jacques Thibault, Louis Isabel, J.-Frs Thibault, Henri Ruel et Alexandre Gagné.
La cadette Françoise, née le 18 décembre 1701, connut à peine son père qui fut inhumé le 1er mars 1703, à Saint-Thomas. Jean n'avait que 59 ans mais se perpétuerait dans des descendants sans nombre jusqu'à nos jours.
Succession
Jacquette Fournier, veuve de deffunct Jean Proust vivant habitant demeurant à la pointe à la caille seigneurie saint Luc, mit ordre à ses affaires. Elle vendit la moitié de sa ferme à Charles Gagnon, citoyen de la Côte de Beaupré, pour payer Marie-Anne Fortin, maintenant remariée à Étienne Mirambeau. Sur l'arpent et demi de terre vendu, il y avait la maison et une portion de grange. Jacquette recommençait sa vie avec bien peu de biens.
Il semble que la famille se soit transportée chez le fils Pierre, voisin de la propriété restante. Le 13 juillet 1722, Jacquette se donne à son fils Joseph, célibataire de 24 ans. Mais Pierre et Joseph se partageront chacun pour moitié les biens maternels. Sur la ferme, il y avait 1 cheval, 1 boeuf, 1 vache, 25 poules, 3 moutons et quelques biens meubles: 4 fusils, 3 faucilles, etc., ces derniers donnés à Joseph.
Jacquette Fournier vivra jusqu'à l'âge de 76 ans. Elle fut inhumée à Montmagny, le 25 jan 1736. Joseph, selon sa promesse écrite, s'empressa de faire dire 36 messes basses pour le repos de sa belle âme.
Telle est en abrégé la vie attachante, pour ne pas dire édifiante, de Jean Prou et de Jacquette Fournier.
PROULX(3)
Jean Prou, premier ancêtre au pays est originaire de Notre-Dame de Nantilly, ville de Saumur, diocèse d'Anger de la province d'Anjou. Aujourd'hui cette province fait partie du département de Maine-et-Loire. Les Prou d'Anjou, lieu d'origine du premier ancêtre venu au Canada, portent à leurs armoiries: "D'or à une bande d'azur chargée de trois croissants d'argent.".
A Québec en 1667, Jean est établi chez un colon, Louis Couillard de Lespinay; il est alors âgé de 22 ans. En 1673, il épouse à Québec, Jacquette Fournier, petite-fille de Louis Hébert, le premier cultivateur Canadien. Ses descendants se multiplient principalement dans la région de Rimouski par l'arrivée de Pierre, petit-fils de Jean et époux de Madeleine Lévesque. Dès 1751, il est censitaire du Seigneur Lepage.
Les frères Proulx: Anselme, Athanase, Antoine et Martial, fils de Martial, sont vraiment les pionniers de la première heure à Ste-Blandine. Martial, installé au troisième rang de Rimouski, vient alors avec ses fils pour les établir chacun sur un lot. Par les bois, ils se fraient un chemin à la hache, la nourriture sur le dos, pour venir à "La Montagne". Dès 1840, la paroisse est déjà habitée et l'on y retrouve avec les frères Proulx: Prudent Soucy, Célestin Brisson, Noël Ross, Anthime Fiola et Prime Duchesne. au cours de la petite histoire de la paroisse, d'autres "branches" vinrent s'ajouter à la famille déjà nombreuse des Proulx.
Bien des noms pourraient être mentionnés ici, mais l'espace manquant, nous nous contenterons de n'en citer quelques-uns et vous vous ferez un plaisir à découvrir à quelle "branche" ils appartiennent.
Jules, époux de Alphéda Lepage, est gérant de la ferme du Dr. Moreault pendant sept ans puis achète sa propre ferme dans le Nord-Est. Il a cinq enfants, tous nés à Ste-Blandine.
Ernest, cultivateur puis contracteur forestier de 1921 à 1953. son territoire comprend: la rivière Sifroi, les lacs Côté, des Echos, Touladi, etc....
Michel, fils d'Anselme et époux de Marie Proulx, est entrepreneur forestier en 1913, commerçant de bois, propriétaire depuis 1927 du magasin général aujourd'hui opéré par son fils Rodrique. Après la mort de son frère Léon, il se porte acquéreur de la Cie André du Village Brisson; il en est le président. Il est élu maire de la municipalité de 1933 à 1935 et constable pendant vingt ans.
Agnus, fils de Pierre et d'Alphéda Lepage, marié à Lydia Proulx, est membre-fondateur de l'U.C.C., de la Caisse Populaire et de la Coopérative Agricole dont il est le secrétaire-Gérant. De plus, il est maire de la municipalité et remplaçant au décès de son frère Romuald, au poste de Commissaire d'école. Agnus et Lydia sont parents de dix-huit (18) enfants et tous les deux sont décorés de la Croix St-Germain.
Moïse, né en avril 1868, au début de la colonisation, fut baptisé à Rimouski. A chaque printemps, la rivière du Bois-Brulé inondait "Les Fonds", la seule issue pour se rendre à la ville. Tout le groupe du voyage faillit se noyer, c'est-à-dire, le parrain, la marraine, la porteuse ainsi que le père et le bébé. Arrivés à l'église, secoués par la peur, on ne se souvient plus du nom que la mère voulait donner à l'enfant. A la suggestion du curé, on décide de l'appeler Moïse, c'est-à-dire "sauvé des eaux".
Alfred, fils de Xavier et d'Emma Côté a épousé Ernestine Brisson, fille de Louis et de Delvina Proulx. Ils sont les parents de huit (8) enfants. Alfred apprend à lire et à écrire à l'âge de quarante (40) ans, ce qui ne l'empêche pas d'être contracteur pour la Cie Price Brothers dans les limites de Rimouski. On le retrouve aussi pour "faire chantier" à l'Ile d'Anticosti, à Godbout, Franquelin, Forestville et Baie-Comeau. Pendant qu'il travaille avec ses fils Gabriel et Lucien, en 1948, il déménage sa famille à Rimouski et y opère une épicerie-boucherie sur la rue Rouleau avec l'aide de deux autres fils, Roland et Lauréat. Il décède en forêt à Baie-Comeau, en 1943, terrassé par une crise d'angine.
Parmi les conscrits de la dernière grande guerre (1939-45), nous retraçons le nom de Marcel Proulx, fils d'Ernest, Aurèle, fils d'Alphonse à "Sen".
Des anecdotes "succulentes" méritent d'être racontées ici. L'épouse de Romuald, fils Pierre, nous rappelle que son époux, lorsqu'il travaillait dans les chantiers eut un accident. Un jour qu'il était à bûcher à la hache, il se donna un coup sur le pied. Il se rend alors au camp, il enlève sa botte et les deux orteils restant dedans, il les prend et les jette dans le poêle à bois. Un de ses amis, Baptiste Thibeault, avait peur des morts et deux orteils pour lui valaient autant qu'un corps, il ne voulut point dormir ce soir là. Un autre de ses amis, Isidore Proulx lui dit "Mais, Romuald, tu te coupes les ongles trop courts".
1. 0 Nos Ancêtres, de Gérard Lebel, Vol 3, pp. 143-148.
2. 0 Ce Noël Morin est l'ancêtre d'Alice Morin, fille de Chrysostome Morin et d'Élizabeth Durand, ma grand-mère maternelle.
3. 0 Généalogie et Histoire des Pionniers, Ste Blandine 1881-1981, pp. 201-203.
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Un document en provenance des Archives Nationales du Québec sous le numéro de référence ANQ GN BECKET; 12-11-1671 dit que Jean Proul, Pierre Jalet et Laurent Lomier doivent 129 livres à Jean Dubuc pour des Marchandises en date du 12 novembre 1671. Jean Dubuc étant un fermier et ayant loué la terre de feu Jean Bourdon.