Le cas français, un système archaïque et intenable
Par Jean Guisnel dans le cahier multimédia de Libération
(Vendredi 23 février 1996)
Le cryptage demeure soumis à autorisation en France. Les logiciels doivent être
agréés par le Service central de sécurité des systèmes d'informations (SCSSI),
dépendant du secrétariat général de la Défense nationale.
Cet organisme ne délivre ses autorisations, au compte-goutte, qu'aux procédés
de chiffrement qu'il est certain de pouvoir lire à livre ouvert.
Particulièrement restrictive, cette législation empêche les personnes de protéger
l'intimité de leurs communications par courrier électronique et les entreprises de protéger
leurs transactions commerciales. La France, comme Singapour, la Russie, et tous les états
totalitaires, interdit le cryptage au nom de la sécurité de l'Etat. Les Etats-Unis et les autres
pays européens l'autorisent.
Parmi les logiciels de chiffrement, le PGP de Phil Zimmerman est devenu une norme de fait
sur la planète. Aucun ordinateur au monde n'est capable d'en percer les secrets, et cela
devrait durer encore longtemps. Pour cette raison, en contradiction avec la loi française,
mais pas avec leurs intérêts, nombre d'entreprises de notre pays utilisent sans presque
sans cacher ce procédé efficace.
La situation française est désormais intenable. Il n'est plus sérieusement envisageable
de faire perdurer un système archaïque, contradictoire avec les intérêts
élémentaires du citoyen et de l'entreprise évoluant en démocratie.
Le mouvement qui se fait jour en Europe, et que la France ne pourra pas
éternellement bloquer, converge donc avec les solutions préconisés aux Etats-Unis.
Il s'agira, pour les personnes désirant crypter leurs communications,
de déposer leurs clés de cryptage chez un "tiers de confiance"
qui la détiendrait confidentiellement. Pour permettre l'action de la police,
qui craint l'emploi du cryptage par les criminels, les clés lui seraient
remises en cas de problème mais uniquement sur ordre de la justice.
Tel est le cadre vers lequel l'Europe s'oriente, mais qui laisse bien des questions
ouvertes. La personnalité juridique des "tiers de confiance"
(privée, étatique) est l'une des questions majeures à laquelle, pour l'instant
, personne ne sait répondre.
Pour toutes ces questions, voir sur le Web, la revue
Netizen
( URL de cette page = http://www.oocities.org/Paris/4206/refl000.htm )