Protection de l'environnement, écologie et libération animale


La libération animale est parfois associée à la protection de l'environnement. Les médias parlent d'écoterrorisme à propos du front de libération animale (ALF). Certaines associations de protection de l’environnement jouent sur la sympathie qu’on peut avoir pour la Nature et les animaux, comme si protéger un orang-outang revenait à protéger un arbre. D’autres mouvements (hardline,...), même s’ils rompent avec l’anthropocentrisme ambiant, renforcent encore l’amalgame. Pourtant, il me semble que considérer la libération animale comme une forme de protection de l’environnement est injustifié et même franchement néfaste, parce que la protection de l’environnement et l’écologie ne s’intéressent pas au intérêts individuels des animaux mais à la valeur écologique qu’ils présentent.

Spécisme et protection de l’environnement

Le problème avec la protection de l’environnement, c’est son spécisme : elle ne tient compte que des intérêts des humains, intérêts à avoir un environnement propre, équilibré, à avoir des ressources durables et diversifiées. Ainsi, même quand des animaux sont protégés, ce n’est pas dans leur propre intérêt mais parce qu’ils présentent une utilité écologique pour les humains. Ca explique pourquoi un koala, par exemple, et protégé et pas un vulgaire rat d’égout : ce n’est pas vraiment parce qu’il vaut mieux, d’un point de vue moral, tuer un rat qu’un koala ou parce que celui-ci ressemble à un gros nounours (quoique…) mais parce que l’espèce koala est en voie de disparition et qu’il convient de préserver un certaine diversité des espèces dans l’environnement des humains. En fait, dans la protection de l’environnement, ce n’est même pas l’animal en lui même qui est protégé, car un seul animal n’a pas grand intérêt, mais l’espèce ou l’écosystème auquel il appartien. C’est parce que l’espèce " koala " est menacée qu’elle est protégée : s’il y avait autant de koalas que de rats qui traînaient dans les égouts, ils ne seraient pas privilégiés et se feraient " dékoalaisés " tout aussi légalement que les rats se font dératisés.

L’intérêt, anthropocentrique, à conserver les écosystèmes ou les espèces, explique pourquoi Greenpeace, par exemple, dépense des millions pour sauver quelques baleines mais ignore totalement le sort des milliards d’autres animaux tués inutilement chaque année. Ils vont même jusqu’à vendre des chaussures en cuir dans leur catalogue! Mais comment oser s’appeler " Paix verte " en tirant profit de la souffrance et de la mort d’êtres sensibles? Ben, simplement parce que les victimes n’ont pas eu la chance d’être nés avec l’étiquette " homo sapiens ", or, dans le cadre de la protection de l’environnement, comme dans le reste de notre société, le spécisme règne : seul le bien-être humain importe et celui des autres animaux est négligé.

Face à ce mépris systématique envers les animaux non-humains, certains, soit par réel intérêt, soit pour ridiculiser la libération animale, se demandent si, tant qu'à exiger des droits pour des êtres non-humains, on ne devrait pas aussi tenir compte des intérêts des végétaux. Je pense que non, parce que, justement, des intérêts, les plantes n'en ont pas : contrairement aux animaux, elles n'ont pas de système nerveux et n’éprouvent ni souffrance ni plaisir (on est jamais sûr de rien, mais bon…).. Elle ne peuvent, par conséquent, pas avoir d'intérêt ou de préférence à propos de ce qu'il leur arrive. Il me semble donc absurde d’avoir des états d’âmes quand on coupe un arbre (sauf s’il y a un nid dessus!).

Cependant, il est clair que la protection de l’environnement n’est pas mauvaise en soi. Je crois juste qu ’il ne faut pas la confondre avec la libération animale dont les objectifs sont différents. Je pense que cette différence tient dans la prise en compte de la sensibilité : Il s'agit d'une part de défendre des êtres sensibles qui ont une vie à eux et qui sont capables d'être heureux, de leur donner des droits dans leurs propres intérêts. D'autre part, c’est un environnement, un ensemble de ressources, un milieu de vie qui n’ont pas de valeur en eux-mêmes, mais qu’on protège parce qu’ils en ont pour nous et notre avenir. Si je trouve qu’il est important de bien faire cette distinction, c’est, premièrement, pour trancher avec le spécisme de la protection de l’environnement actuelle, qui ne considère les animaux que par l’utilité écologique qu’ils ont, comme de simples ressources, sans tenir compte de leurs propres intérêts. Mais aussi pour éviter l’assimilation de la libération animale à l’écologie.

La Nature, ce merveilleux paradis…

Il faudrait y consacrer plus que ces quelques lignes, mais les idées écologistes sont souvent imprégnées d’un naturalisme-humaniste-spéciste dont je ne pense que du mal. Un exemple parmi d’autres (cfr. le premier texte) : pour un écologiste, une épidémie terrassant 300 lièvres n’a rien de négatif en soi, au contraire, même si l’agonie des lièvres est lente et douloureuse, elle sera vue comme bénéfique, car c’est une manière “harmonieuse”, naturelle de réguler la population d’un écosystème, ou plus globalement de l’Equilibre Naturel. Car selon l’écologie, ce qui importe est la préservation de la Nature : vous savez cette sorte de Tout bienfaisant et sacré, ce merveilleux paradis où les animaux s’entretuent pour tenter de survivre, où l’équilibre est conservé à coup d’épidémies, de prédations, de famines ou autres fléaux naturels. Que les lièvres souffrent ou pas, peu importe, ce qui compte c’est l’Equilibre écologique, la survie des espèces, les individus en eux-mêmes n’ont pas d’importance. Sauf évidemment, spécisme oblige, ceux des êtres humains : préserver l’Ordre Naturel, OK, mais il ne faudrait tout de même que ça nuise à l’Humanité ! Les lois naturelles (prédation, sélection naturelle,…) c’est bien mais pour les animaux ! Enfin, c’est déjà ça, même s’ils sont spécistes, les écologistes ne vont quand même pas jusqu’à trouver bien la propagation du SIDA, les famines ou les tremblements de terre, alors que ça me semble des façons assez naturelles et efficace de diminuer la surpopulation (quoique apparemment, certains, les écologistes profonds, seraient plutôt d’accord: ils sont pour une réduction de 90% de la population mondiale! ). Cette volonté des écologistes de vouloir maintenir l’équilibre naturel, sauf quand il contrarie l’Humanité, est bien pratique, ça permet aux humains de conserver leur domination sur le reste de la nature, en prétextant qu’elle est naturelle, sans avoir à subir de contrainte de cet Ordre Naturel. Tu parles d’un équilibre, une dictature, oui !

Cette manière de s’extraire de la Nature pour mieux la dominer est souvent justifiée par des arguments humanistes du genre : “oui, mais les humains, c’est pas comme les animaux, nous sommes des êtres de culture alors que les animaux sont des être de nature”. Ca ne me convainc pas, d’une part, parce que cette distinction est vraiment plus que discutable (il existe une continuité de plus en plus mise en évidence par la science entre humanité et animalité). En plus, je ne vois absolument pas en quoi, je reprend mon exemple, le fait que les lièvres soient des être de nature rende l’épidémie meilleure en soi, moins douloureuse pour les lièvres ou plus “harmonieuse”. Il y a aussi ceux qui affirment que, comme nous, humains, sommes naturellement supérieurs aux animaux, il est naturel pour nous de les exploiter. Ce n’est qu’une justification de la loi du plus fort, utilisée, par exemple, par les sexistes ou les nazis: comme les hommes (ou les blancs) sont naturellement supérieur aux femmes (ou aux juifs), il est naturel pour ces dernières de se faire exploiter. Je ne me donnerai même pas la peine de discuter ce genre d’arguments.

Pour terminer, je veux quand même insister sur le fait que je pense que la protection de l’environnement est évidemment une bonne chose. Seulement, elle ne devrait pas se limiter à garantir le bien-être des humains en considérant les autres animaux uniquement comme des ressources et en ignorant systématiquement leurs intérêts. Elle ne devraient pas non plus se contenter de protéger les espèces ou les écosystèmes . Elle devrait plutôt prendre en compte le bien-être de chaque individu et protéger, sans le sacraliser, le milieu de vie de tous les êtres sensibles de la terre, sans faire de distinction d'espèce, sans donner la priorité à l'une ou à l'autre.


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