Introduction
En mai 1684, plusieurs dizaines flibustiers, sous le commandement général du capitaine Bernanos, attaquent San Thomé de La Guayana, petite ville espagnole sur l'Orénoque (voir documents relatifs à des flibustiers de Saint-Domingue portant la commission du gouverneur de l'île de Sainte-Croix). La nouvelle de cette attaque n'est pas sans inquiéter les voisins des Espagnols, les Néerlandais de la colonie de la rivière Essequibo, d'autant plus que pour ce raid les Français ont reçu l'aide d'une tribu d'Indiens Caraïbes, qui sont allés jusqu'à menacer ouvertement les Néerlandais. C'est ce que rapporte ici le commandant d'Essequibo, Abraham Beekman, dans l'extrait d'une lettre adressée à la Compagnie néerlandaise des Indes occidentales. Alliée de l'Espagne, les Provinces Unies ont en effet beaucoup à craindre des Français. Mais la majorité des flibustiers impliqués dans la descente sur La Guayana retireront peu de butin de cette entreprise comme le remarque d'ailleurs ici l'officier néerlandais (voir aussi le mémoire conjoint de Saint-Laurent et Bégon, de janvier 1685). Et ils s'engageront bientôt dans une expédition en mer du Sud qui durera jusqu'à la veille d'une autre guerre officielle entre la France et les Provinces Unies. Pour la participation de la majeure partie de ces flibustiers dans le voyage à la mer du Sud, consulter le début du chapitre d'Exquemelin traitant des entreprises ayant précédé la prise de Campâche.
Le commandant [Abraham Beekman] à la Compagnie des Indes occidentales [extrait] Essequibo, 18 août 1684. (...) En suite de quoi, par Abraham Baudaart, qui garde le poste de Pomaroon, et divers Indiens, j'ai eu avis, il y a quelque temps, que les Français, qui sont en guerre avec les Espagnols, et sont apparemment (comme j'ai entendu indirectement) sur le point d'en venir aux prises avec notre nation, se sont, voilà maintenant deux ou trois mois, rendus maîtres du fort sur l'Orénoque après résistance de ceux qui s'y trouvaient, et après la perte de leur commandant et de plusieurs personnes de chaque côté; et ils ont fait prisonnier le gouverneur de Trinidad alors qu'il était en route pour ledit Orénoque, mais fait peu de butin, puisque la nouvelle de cette descente parvint alors que l'on y portait l'argent. L'on ne sait pas encore si lesdits Français ont abandonné ou non le fort.. Ils ont eu l'assistance de plusieurs Caraïbes, de Copename, chassés par Son Excellence, le baron de Sommelsdyk, et ayant trouvé refuge ici à notre grande inquiétude. Peu de temps auparavant, le capitaine Gabriel Bishop, avec sa barque venant de Surinam et Berbice, entrant dans la Barima avec l'intention d'y faire la traite, étant surpris et rejoint par les susdits Caraïbes, lui, avec quinze de ses hommes, fut massacré; et la barque fut mise en pièces et coulée par le fond, avec menaces à quelques autres Indiens avec lesquels nous sommes amis, qu'ils viendraient, conjointement avec les Français, probablement pour détruire toutes les plantations hors du fort à Essequibo. Ainsi nous devons apparemment nous attendre à être attaqués bientôt... Toutes ces mauvaises rumeurs m'ont fait résoudre de faire une maison forte sur l'île Stamper, en forme de redoute avec deux palissades... d'autant que le commerce sur l'Orénoque est, en raison de cette invasion, venu à un terme, duquel commerce un rapport détaillé vous sera soumis qui partira par le prochain navire. (...) source: Archives de la West-Indische Compagnie. Traduction française d'une copie anglaise comptant parmi une série de documents d'époque relatifs à l'histoire de la frontière occidentale de la Guyane réunis et présentés par le Dr. Odeen Ishmael, actuel ambassadeur de Guyane aux États-Unis d'Amérique et représentant permanent de la Guyane à l'OAS, et qui est traduit ici avec la permission de ce dernier. |
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