121
- Je n'ai que quelques questions à vous poser, si vous le permettez, suggéra Boudedieu.
- Je vous en prie, fit Théo, souriant. Pour qu'un homme comme vous prenne le temps de venir m'interroger, j'imagine que l'affaire doit être sérieuse...
Le détective décrivit succintement l'objet de sa visite. Il rappela à son hôte la rencontre qu'il avait eu avec sa femme, rencontre dont elle devait l'avoir entretenu.
- Monsieur, venons en aux faits... invita l'entrepreneur du ton de l'homme qui n'a rien à cacher.
- Vous avez accompagné Biel au moment où il a quitté votre appartement du Château Bay, le matin du 2 juillet ?
- Accompagner... oui, dans un certain sens.
- Vous avez bien promené votre beau-frère quelque part, ce matin-là ?
Théo Beaumin hésita...
- Enfin, reprit Boudedieu, c'est bien votre femme qui m'a dit que vous étiez allé avec Biel...
- En réalité, mon beau-frère n'a pas voulu me suivre...
- Comment ça ?
- Ecoutez... ma femme était surexcitée... Je lui ai bien dit que j'avais amené mon beau-frère quelque part...
- Mais il n'en fut rien, conclut Boudedieu.
- Il y avait une profonde animosité entre lui et tout ce qui touchait de près ou de loin à la famille.
- Vous avez tout de même quitté l'appartement ensemble ?
- Sans aucun doute. J'avais insisté pour que Biel m'accompagne. Sitôt dehors, il m'a dit:" T'es un maudit cochon ! Au lieu de m'appuyer, tu t'es associé à cette gang de crisses..." Je me souviens d'avoir essayé de le raisonner...
- En gros, qu'avez-vous dit à Biel ?
- Je lui ai conseillé de boire moins. C'était un gars qui ne raisonnait plus à partir d'un certain moment, quand il en avait trop pris. Il changeait de personnalité. Remarquez: il n'était pas pire que les autres... J'ai dû congédier de bons ouvriers à cause de ça...
- Biel menaçait-il sa belle-famille ?
- Vous savez ce que c'est qu'un homme en boisson... Il est sous la domination de forces instinctives... J'ai connu des ivrognes qui battaient leur femme... D'autres ont des idées fixes...
- Biel était de ceux-là ?
- Il se sentait persécuté... " Elle me provoque " aimait-il à répéter, à chacune de mes tentatives pour l'amener à la raison. " Elle me veut l'esclave des Antoniche. Ça, jamais !"
page précédente
