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Ch. XIV

vendredi soir.

Lanchard accueillit Boudedieu à qui il remit une missive.

- Comment va Bozo ? Je croyais que tu m'avais appelé à son sujet.

- Il se remet lentement de sa commotion cérébrale. Quelques jours de repos et tout devrait bien aller. Les intubations ont disparu comme par enchantement. Le gars est fatigué mais bien gaillard. Il t'envoie ses salutations.

La missive venait du coroner qui s'informait des résultats de l'enquête. Il formulait le voeu de clore l'affaire le plus tôt possible.

- Bon! bon! fit Boudedieu. Notre enquête, sur le terrain, est à peu près terminée. As-tu obtenu les derniers renseignements ?

Lanchard lui remit les feuilles contenant la programmation musicale exécutée ce soir-là. La voiture de Biel ne fournissait pas de renseignements sur les empreintes.

- Qu'est-ce qu'on dit des Antoniche dans leur entourage ?

- Suite à la disparition du beau-fils, le vieux aurait fait un infarctus. Le médecin que j'ai rencontré a été fort réticent... Le secret professionnel est de rigueur et j'ait dû présenter l'ordre du juge pour avoir accès aux documents.

Lanchard reprit son souffle et ajouta:

- J'ai réussi à lui faire dire que le vieux avait manifesté un syndrome d'infarctus... qui serait survenu avant la découverte du corps de la victime. " Le vieux, m'a dit le médecin en riant, a trop sauté durant la noce de sa petite-fille..." Il n'est même pas allé à l'hôpital:" Je l'ai soigné à domicile. À notre âge, on ne se fait pas trop d'illusions ! L'habitat naturel demeure encore la meilleure médecine!"

- Les habitants de l'entourage de la famille ?

Personne n'avait revu Anton Antoniche dans Ville-Bélair depuis la journée de la Confédération. Ses concitoyens éprouvaient une certainre nostalgie devant l'absence du bonhomme qui avait l'habitude de marcher dans les rues de la ville, une heure ou deux, matin et après-midi... Quant à la vieille, elle trottine entre le cabinet du médecin, la pharmacie et le presbytère, presque à chaque jour.

- On semble cependant éprouver une certaine gêne à parler de la famille Antoniche. Ce sont des notables, dans la place... tu comprends ? ajoutait Lanchard. On ne peut pas dire qu'on les aime mais on manifeste de la considération à leur endroit.

Les deux policiers travaillèrent tard, ce soir-là. Ils analysèrent les étapes de leurs recherches. Ils avaient formulé les observations suivantes:

Le suicide tout comme l'accident était impossible à cause de la présence des éclats de verre dans la tête de Biel, du marché conclu avec la famille et des sommes considérables qu'il devait en soutirer; le tempérament et le caractère de la victime allaient à l'encontre de l'hypothèse. Restait à vérifier la provenance du tartrate.

- Advenant le cas où Biel ne consomme pas, ce sera au père Antoniche à expliquer la présence du médicament dans ses tripes.

-L'autopsie n'a relevé que les blessures externes. La proposition sera faite au coroner pour l'exhumation du cadavre et une nouvelle autopsie, après vérification auprès du médecin de l'armée .

- Je vérifierai la médication de Biel, auprès des militaires, fit Boudedieu.

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