- Monsieur le policier, c'est Monsieur De La Ribambelle. C'est un homme instruit, Emma. Il est capable de comprendre ce que j'ai à dire...J'ai dit dix maisons. C'est plutôt cent, à bien y penser. Imaginez, Monsieur, que le corps humain, mettons un corps de 60 kg comme le mien contient deux mille fois dix-huit grammes. Ça fait ça trente-six-mille grammes. Si je divise par dix-huit, soit le nombre de grammes dans une mole de molécules d'eau , ça fait trois-mille-trois-cent-trente-trois-point-trois-trois-etc. le nombre de maisons dont je vous parlais tout à l'heure. Continuons de manière à ce que ce soit plus facile à voir: au lieu d'un grain de sable, supposons que chaque molécule est grosse comme un cube de sucre... Oui, oui exactement de la grosseur de ceux que vous voyez dans le sucrier... Eh bien, selon cette agrandissement, il vous faut voir votre corps comme ayant le siège représenté par la terre et la tête située dans la lune... Voyez-vous, maintenant, à quelle échelle de grandeur les maudites petites bibites qui s'infiltrent à travers les molécules pour venir nous ronger les cartilages doivent être observées ?
- Je vous avoue que j'ai du mal à me représenter le corps humain dans ces dimensions-là, répondit Bozo dont les efforts d'attention pour suivre Anton Antoniche ne réussisaient pas à amener une compréhension suffisante à une claire discussion. Ainsi, Bozo, de temps à autre, jetait un regard vers Martine ou sa mère dans l'espoir qu'elle pourraient l'aider en apportant quelques points d'éclaircissement à l'exposé du vieux monsieur.
Mais ce fut peine perdu, Anton Antoniche poursuivait en énonçant diverses théories médicales applicables à son échelle de grandeur. Il avait entendu parler de particules radio-actives qui s'appliquaient dans le traitement du cancer... Il avait aussi entendu des choses sur la chimiothérapie... Mais, ces traitements n'étaient pas applicables aux maladies arthritiques...
- Ça n'en vaut pas la peine, soupira-t-il à la fin... Mais, dites-moi, vous, Monsieur De La Ribambelle, à Montréal, est-ce qu'on traite ces maladies-là mieux qu'ici?
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- Je vous avoue, Monsieur, n'en connaître pas grand-chose, répondit Bozo dont les connaissances médicales se limitaient aux traitements de premier soins appris dans l'école de la police.
- Allons, allons, papa. Nous en sommes au dessert et il n'y a que toi qui a parlé. Donne une chance aux autres d'aborder d'autres sujets... Allons, papa... implora Martine avec un sourire qui avait le don d'émouvoir le paternel.
- Bon ! bon ! Allez-y, je me tais... Mais vous, Monsieur De La Ribambelle, entendez-vous rester à Québec pour longtemps ?
- Peut-être un ou deux jours encore... Mais, je vous promets bien d'y revenir, ajouta Bozo en regardant Martine.
- C'est un souhait que je formule aussi, ajouta Dame Antoniche à l'adresse de Bozo...
- Laissez-moi vous complimenter, chère Madame, du bon goût de vos plats... Québec ne se fait pas valoir seulement par la grâce de ses dames mais aussi par le fumet de ses plats...
- Permettez-moi de mettre un peu de musique durant le temps du café. Me permettez-vous, papa ?
- C'est ça, ma fille,mets-nous du Mozart, tu sais cet air dont je me délecte...
- Vous aimez Mozart, Bozo, fit Martine en jetant un clin d,oeil complice vers son invité.
- Nous adoront tous Mozart, dit Dame Antoniche qui invita les convives au salon.
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