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- Tu n'as pas monté une bourrique, un canasson! C'est la meilleure coursière de l'écurie...C'est une pouliche pur-sang dont l'allure est très fière. Elle connaît ceux qui l'ont monté. Toi, elle a senti ton caractère. Elle t'aime déjà...
La jument me regardait en effet et donnait des coups de tête, comme pour m'inviter à une nouvelle randonnée. Elle se laissa faire quand je lui caressai les joues, avant de faire mes adieux. Je me promis alors de revenir la voir... Sans savoir pourquoi, je savais que nous nous aimions.
Mes émotions s'évanouirent, du moins, celles qui étaient négatives. Et je partis avec le gang, nous enfonçant toujours plus avant dans la fôrêt!
Abordant une clarière transversale où les copains stopèrent leur voiture, nous descendîmes tout près d'un ruisseau qui traversait la route. On la nommait " La Cugnette ". Morel et Françoise se mirent à pêcher de petites truites. Ange-Aimée fit le feu. Je m'occupai à écouter le chant des oiseaux qui se faisait de plus en plus rare avec la montée de la fumée. Un orignal passa tout près...
- C'est un mâle! Attention, de le distraire!
Le panache immense disparut dans les broussailles bordant la rivière.
On mit à cuire les poissons sur le feu sans même prendre la peine de l'étriper...
Je bouffai de la petite truite, avalant tout. C'était pas pire que la sardine qu'on bouffait en entier, dans mon enfance, quoi!
La fumée avait chassé et les oiseaux et les moustiques. Après une bonne bouffée, nous prîmes des couvertes dans la voiture, les étendîmes pour nous endormir jusqu'à tard dans l'après-midi.
Nous quittâmes la forêt, à la tombée du jour, pour nous rendre chez un aubergiste appelé Pistoulache, du côté de Québec.
Il fallut aller nous changer. C'est Morel qui amena chacun chez lui et les reprit, un à un, avant le début de la nuit.
J'ai déjà décrit ce genre d'établissement auparavant. Mais à l'époque où j'en parlais, il était beaucoup plus sophistiqué. Je me souviens encore que c'était plus qu'une bibine, un bouchon, un simple bistrot où les gens solitaires venaient se distraire. L'esprit du bouchon y régnait contrairement à la simple brasserie; il y avait du buffet en abondance, des espaces pour la buvette, c'était le style cabaret,un peu caboulot, un genre de café tirant sur la guinguette,un hôtel, quoi!
Morel y fut reçu à bras ouverts. Il parla très simplement devant nous et nous invita à le suivre... Ce ne fut pas long qu'il demanda à Morel ce qui était advenu de la journée. Je fus fort reconnaissant du récit du copain qui ne cacha aucun détails de ce qui s'était passé la nuit précédente.
- Ça été court et simple... J'avais, lors de mon entrée dans le presbytère, tout l'attirail nécessaire à ma survie. De la main gauche, une bonbonne de CO2. De l'autre, une bonbonne de H2 émettant un petit jet de flamme à chacune des pressions que j'exerçais. J'ai demandé au curé de me remettre tout l'argent qu'il possédait, faisant ruisseler devant ses yeux quelques jets de flammes. Il me remit tout ce qu'il y avait de disponible, connaissant bien tout les lieux où il cachait vin et argent, y ayant déjà été enfant de choeur. Puis, le tout ayant été disponiblement mis en ma possession, Françoise le ligotta sur son lit en laissant libre sa main droite.
- Monsieur le Curé, je vous demande l'absolution. Je sais que j'ai péché contre un commandement de Dieu. Je sais que vous pouvez m'aboudre.
- Il est de mon devoir de t'absoudre si tu es convaincu de ta faute. Remets les biens de l'église!
- Monsieur le Curé, si j'avais tué quelqu'un et que je vous aurais demandé de m'entendre en confession, vous m'auriez accordé le pardon et absout de mon crime, vous auriez été obligé de garder le silence. J'ai été votre enfant de choeur. Je ne me suis pas caché le visage.Je vous demande de m'entendre en confession.
- Libérez - moi de ces attaches! Agenouille-toi
- Je connaissais bien le Curé. C'était un homme soumis aux règles!
- Tout comme les nôtres! remarqua Françoise¡
- Le Curé m'entendit en confession. Il entendit aussi Françoise. Notre vol était pardonné. Un ou deux jets de flammes avaient été nécessaires!
- Le curé est-il un homme honnête ?
- Sa réponse est formelle. La confession absout tous les crimes dont les gens viennent s'accuser, ils sont soumis aux lois du silence, sous peine de damnation, car hors de l'Eglise, point de salut! Tout est permis.