![]() |
![]() |
![]() |
La fontaine médicis Il est au Luxembourg une vieille fontaine; J’aime ce monument d’origine incertaine; Et près d’un banc de bois où chacun vient s’asseoir, Un vague sentiment m’y ramène le soir. Des imitations de floconneuse mousse Pendent le long des murs; le nénuphar y pousse; Une vénus en pierre, au doux sourire humain, Cache pudiquement son ventre avec sa main; Deux grands fleuves couchés, prenant des airs superbes, De leur urne tarie épanchent des flots d’herbes, Car l’eau ne coule plus; dans l’aride bassin La coquette de vénus ne mire plus son sein; Un cresson altéré grimpe sur les rocailles; À peine si la pluie, en tombant des murailles, Vient à bout de remplir, entre les verts roseaux, Le fond de cette coupe où boivent les oiseaux. Vénus abandonnée, ô fille de Cythère! Vous êtes triste et sombre en ce lieu solitaire, Mais au moins triste pourtant, à la chute du jour, O fontaine sans eau, que mon coeur sans amour. |
La plage des sables blancs Oubliettes des châteaux de sable Meurtrières fenêtres de l’oubli Tout est toujours pareil Et cependant tout a changé Tu étais nue dans le soleil Tu étais nue tu te baignais Les galets roulent avec la mer Et toujours toujours j’entendrai Leur doux refrain de pierres heureuses Leur gai refrain de pierres mouillées Déchirant refrain des vacances Perdu dans les vagues du souvenir Déchirants souvenir de l’enfance Brûlée vive par le désir Merveilleux souvenir de l’enfance Eblouie par le plaisir. |
J’écris pour que le jour… J’écris pour que le jour où je ne serai plus On sache comme l’air et le plaisir m’ont plu, Et que mon livre porte à la foule future Comme j’aimais la vie et l’heureuse Nature. Attentive aux travaux des champs et des maisons, J’ai marqué chaque jour la forme des saisons, Parce que l’eau, la terre et la montante flamme En nul endroit ne sont si belles qu’en mon âme ! J’ai dit ce que j’ai vu et ce que j’ai senti, D’un cœur pour qui le vrai ne fut point trop hardi, Et j’ai eu cette ardeur, par l’amour intimée, Pour être, après la mort, parfois encore aimée, Et qu’un jeune homme, alors, lisant ce que j’écris, Sentant par moi son cœur ému, troublé, surpris, Ayant tout oublié des épouses réelles, M’accueille dans son âme et me préfère à elle… |
![]() |
Les amours O doux plaisir plein de doux pansement, Quand la douceur de la douce mêlée Etreint et joint l’âme mêlée, Le corps au corps accouplé doucement. O douce vie, ô doux trépassement, Mon âme alors de grande joie troublée, De moi dans toi s’écoulent à l’emblée, Puis haut, puis bas, quiert son ravissement. Quand nous ardents, Méline, d’amour forte, Moi d’être en toi, et toi d’en toi tout me prendre, Par cela mien, qui dans toi entre plus, Tu le reçois, me laissant masse morte; Puis vient ta bouche en ma bouche le rendre, Me ranimant tous mes membres perclus. |