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Bilan et contre-bilan (15)


Le Crime De L'ultra-Gauche

Autoliquidation, dernier acte. Les radicaux trop malins se retrouvent déguisés en épouvantails fascistes, faire-valoir d'une gauche qu'ils imaginaient attaquer au point faible.

Aujourd'hui, rien de ce qui tourne autour du PS et du PC, les refondés, rénovés, verts rouge., trotzkystes enfin assis en bout de table, marxistes raisonnables ( lire : qui acceptent la totalité de Marx, sauf la révolution ), rien de tout cela ne croit plus au socialisme, au communisme, à un « prolétariat » porteur d'un autre monde. Contre ces partisans du capitalisme à visage humain, de futurs affrontements verront émerger une minorité contestataire, sans aucune continuité organisationnelle avec une défunte ultra-gauche, mais qui lui reprendra, ainsi qu'aux libertaires, nombre de ses thèmes. Le flirt ( et pour quelques-uns l'union libre ) d'une fraction de l'ultra-gauche avec le révisionnisme offre dès maintenant une recette idéale pour discréditer ceux qui revendiqueront une opposition irréductible à ce monde et ses partis.

A bien écouter les pourfendeurs de radicaux, on s'aperçoit qu'ils en ont moins après le révisionnisme supposé ou réel de certains que contre tout ce qui l'aurait préparé. Bordiga père de Faurisson... procédé un peu gros, usé, mais qui va resservir ( vers 1965, 25 ans après l'assassinat de Trotzky, les militants de base du PC racontaient encore qu'il s'était fait l'agent des nazis, « objectif » ou « subjectif », on n'était plus très sûr, en tout cas quelque chose entre les deux ). Ce qu'on reproche à l'ultra-gauche, c'est d'avoir été ce qu'elle était : pour la révolution, donc aussi contre PC, CGT, PS, etc. Ces organisations étant les adversaires officiels homologués de Le Pen, leur être hostile équivaut à renforcer Le Pen. CQFD.

Les dossiers des calomniateurs valent ce que vaut leur politique, mais peut-être se trompent-ils de période. Personne n'oublie qu'entre 1930 et 1950, la quasi-totalité des militants et dirigeants des partis de gauche et d'extrême, ainsi qu'une foule de dissidents des PC, se faisaient généreusement traiter de fascistes par les staliniens. Avant leur exécution, les anciens compagnons de Lénine ont même avoué leur appartenance au fascisme, et plus d'une bonne âme occidentale a cautionné cette sanglante comédie. Après 1945, Lefort, Castoriadis et tant d'autres devenus respectables depuis leur rejet du marxisme, signaient alors des textes dont la moindre page leur valait l'étiquette « fasciste ». A repérer des nazis partout, on se discrédite aussi sur ce plan-là.

En 1996, dans le débat truqueur de la gauche intellectuelle dominante, toute opinion est recevable, et le micro baladeur peut même entendre les thèses les plus hérétiques, y compris sur l'antifascisme ! à condition de ne pas remettre en cause la place et l'autorité des représentants reconnus du peuple travailleur. Notre tort est irréparable : dire que si Le Pen est contre-révolutionnaire, PC et PS le sont aussi. De ce crime nous plaidons coupable.


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