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DOSSIER : l'interprétation (Mai 1999)
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Parcours
d'une jeune diplômée Article de Patricia Fournié, membre AAE-ESIT. Une fois son diplôme en poche, le jeune interprète, tout frais émoulu de l'ESIT, entame sa campagne de prospection. Par certains aspects, ses démarches ressemblent à celles de tout jeune diplômé : mailing, relance téléphonique, entretien. C'est l'approche classique, celle qui est utilisée à l'égard des institutions, qui ont des gros besoins en recrutement et veulent étoffer leur base de données d'interprètes free-lance. Pour ceux dont la combinaison linguistique comporte des langues européennes, et notamment pour les francophones avec l'allemand, les institutions européennes constituent des interlocuteurs privilégiés. Là, la transparence est reine, la démarche de recrutement systématique, mais la lenteur des opérations devient parfois désespérante. Le jeune diplômé devra s'armer de patience et attendre pendant des mois une convocation à un examen. Cette attente est d'autant plus difficile à vivre que le jeune interprète à conscience de son manque de pratique professionnelle. Plus la date des tests est éloignée de celle du diplôme, plus il craint de perdre son niveau "théorique" (delui du diplôme) sans pour autant pouvoir compenser par son expérience terrain "pratique", puisqu'il travaille peu. Il faut donc, pendant cette période charnière, veiller à maintenir l'émulation professionnelle, en organisant au besoin des groupes de travail comme au temps de l'école. Par d'autres aspects, les démarches du jeune diplômé n'ont rien à voir avec une recherche d'emploi classique. Les interprètes, c'est bien connu, sont le plus souvent recrutés sur la base du bouche-à-oreille. L'inscription à un secrétariat et à l'Association des Anciens Elèves permet d'entrer en contact avec des "anciens". Ses premières missions, le jeune diplômé les doit à des collègues expérimentés qui, "surbookés", lui demandent d'assurer une prestation à leur place, ou le recommandent à un recruteur. Ainsi, il pourra faire preuve de ses qualités professionnelles sur le terrain, lesquelles lui vaudront d'autres recommandations de la part de ses collègues de réunion. L'interprète débutant, tout imprégné d'éthique ESIT, aura le souci de bien préparer ses conférences. Hélàs ! Il constatera avec angoisse que les documents de réunion lui sont remis bien tard, ou sont insuffisants pour permettre une préparation ciblée. Son inquiétude sera d'autant plus grande, qu'elle ne lui paraît pas être partagée : les collègues de l'équipe, expérimentés et bardés de glossaires constitués au fil des années, ne comprennent pas toujours son désarroi. Le collègue "bon samaritain", qui a conservé les documents de la réunion précédente, sera une véritable planche de salut ! Lorsque, armé d'une petite expérience, le jeune interprète, ému, traite directement avec son premier client, il se promet bien de lui faire comprendre l'importance de la préparation. Mais il se trouve alors confronté à ce qui, à mon sens, constitue la partie la plus difficile de sa mission : la communication en amont. Il doit comprendre les besoins de son client. Que veut-il communiquer ? A qui ? Quel est l'effet recherché ? Quelle forme d'interprétation (simultanée/consécutive) est le mieux adaptée à sa réunion ? Très souvent, son interlocuteur, débordé par les aspects logistiques, accorde très peu d'importance à l'interprétation. Lorsqu'on entend : "Je n'ai pas les documents maintenant, mais vous les aurez en réunion", "vous verrez, c'est facile, il n'y a rien de technique" ou "just do your job", il faut être pédagogue et opiniâtre pour faire comprendre à son interlocuteur que la réussite de sa réunion dépend d'une bonne organisation logistique de l'interprétation et de la familiarité des interprètes avec les sujets abordés. Si la difficulté la plus grande est rencontrée en amont, c'est au cours de la réunion que l'interprète ressent les plus grandes satisfactions. C'est le miracle, toujours renouvelé, du sujet a priori "barbant", qui devient d'heure en heure plus passionnant, au fur et à mesure que l'intérêt des participants gagne l'interprète. Et ce qui, à la lecture des documents, semblait difficile parce que peu familier, devient facile à exprimer dans un contexte naturel de communication. Face à ceux qui l'écoutent et dépendent totalement de lui, l'interprète renonce instinctivement à tout verbiage inutile et ressent le besoin de transmettre un message clair. Rien de bien surprenant somme toute, puisque c'est là que réside précisément la pédagogie de l'école. Mais ce que la raison, en situation artificielle d'apprentissage, a parfois du mal à appréhender, l'instinct, lui, le saisit immédiatement en situation réelle. C'est là son meilleur allié, que le jeune interpréte découvre lorsqu'il est confronté au terrain. © Copyright 1998 - Association des Anciens Elèves de l'Ecole Supérieure d'Interprètes et de Traducteurs de l'Université de Paris - Tous droits réservés.
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