Comme le feu sous la neige : René Char Nous verrons le soleil

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Comme le feu sous la neige






René Char



La lucidité est la blessure la plus rapprochée du soleil.

Fureur et mystère, Oeuvres complètes,
Gallimard (Pleiade), 1983, p. 219.








La reproduction en couleur du Prisonnier de Georges de La Tour que j'ai piquée sur le mur de chaux de la pièce où je travaille, semble, avec le temps, réfléchir son sens dans notre condition. Elle serre le coeur mais combien désaltère ! Depuis deux ans, pas un réfractaire qui n'ait, passant la porte, brûlé ses yeux aux preuves de cette chandelle. La femme explique, l'emmuré écoute. Les mots qui tombent de cette terrestre silhouette d'ange rouge sont des mots essentiels, des mots qui portent immédiatement secours. Au fond du cachot, les minutes de suif de la clarté tirent et dilluent les traits de l'homme assis. Sa maigreur d'ortie sèche, je ne vois pas un souvenir pour la faire frissonner. L'écuelle est une ruine. Mais la robe gonflée emplit soudain tout le cachot. Le Verbe de la femme donne naissance à l'inespéré mieux que n'importe quelle aurore. Reconnaissance à Georges de La tour qui maîtrisa les ténèbres hitlériennes avec un dialogue d'êtres humains.

Fureur et mystère, Oeuvres complètes,
Gallimard (Pleiade), 1983, p. 218.








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