Transphénoménologie de l'amour.

page30

Journal

5 juillet.

Réveil assez brutal: un bruit de métal et de bois qui brise la paix du sommeil. Nathalie et Christian passent en courant devant la porte de notre chambre à coucher... Thérèse se lève en sursaut. Je les suis, presque au pas de course. Dans le solarium, la cage de Cui-Cui est tombée par terre dans un désordre indescriptible de graines, d'eau, d'écailles de cacahuètes et de crotin...

- Ce n'est rien, papa, dit Nath.

J'essaie de voir l'oiseau à travers les barreaux de la cage tordus...

- Couik! couik!

Cui-Cui, la perruche, est perchée sur le manche de la raquette de badgminton accrochée aux solives...

J'examine le lieu de l'accident. Pourtant rien... Du coin où la porte s'appuie sur le mur, Poussy II,notre chatte, sort de la pénombre et frôle le mur jusqu'à la cuisine...

- Tiens, regarde, Albert...

La fenêtre de la cuisine est entr'ouverte. Poussy II a trouvé là un excellent tremplein pour sauter jusqu'à la cage qui a glissé du clou-à-finir tout croche...

- Sauvée une fois encore! s'exclame Christian...

Le garçon a un air mystérieucx, presque souriant...

Thérèse ramène la cage sur le comptoir de la cuisine.

Je nettoie le dégât tout en ayant soin de tenir les portes fermées car la silhouette menaçante de Poussy II se promène sur le rebord intérieur de la fenêtre que Nath a eu soin de refermer. Cui-Cui se tient immobile sur la raquette, incertaine du sort qui l'attend.

Cet incident me rappelle quelque chose d'indécis, comme une menace. Je tiendrai la décision prise hier soir...

L'abstention des verres apiritifs de 10.30h et de 11.00h est particulièrement difficile. Je bois du jus et de l'eau réfrigérée. L'eau me rappelle celle des sources de mon enfance où, après une journée de travail au sommet des montagnes, sans boire, nous arrêtions, le soir, pour nous désaltérer. C'est le paysage de Félix-Antoine Savard qui rentre en moi, plus que l'eau...

6 juillet.

Journée assez illuminée. C'est l'euphorie de sentir que je ne bois pas de gin. C'est la prise de conscience que j'ai été toute une journée, celle de la veille, sans rouler dans l'ornière. Mais le temps coule très doucement, les heures sont longues et je ne sais quoi faire de moi. J'absorbe des jus, tout comme la veille. Je grignotte.

Thérèse me suggère d'aller passer quelques heures chez ma soeur où ma mère est en promenade. Le risque de boire est trop grand. Je m'en abstiens.

Dans l'après-midi, nous nous allongeons l'un près de l'autre sous le soleil qui rôtit notre peau. Nous nous aspergeons d'eau, à tour de rôle au moyen d'un vaporisateur qui ressemble à l'un de ceux qui se vendent au marché et qui contiennent du nettoie-vitres.

Je continue de fumer au rythme d'une cigarette à l'heure. Ce n'est pas si difficile...

Je continue la lecture de "Le temps de la recherche", très peu à la fois.

Une nouveauté: je reprends goût aux choses: j'arrose le potager, hume le parfumn des roses... Je mange beaucoup, principalement des fruits frais...

page précédente

page suivante