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- La neige ondulait, déroulait ses tresses en faisceaux lumineux, voltigeait délicatement avant d'atteindre les danseurs. La foule, parée de costumes carnavalesques, valsait maintenant plus silencieuse. C'était comme un champ de fleurs que berce un doux zéphirs.
- Nous nous sommes retrouvés bientôt séparés de nos compagnons de soirée. Voulant aller à leur recherche, tu m'avais souri et posant un baiser chaud sur mes lèvres, tu m'avais attiré, secrète, mystérieuse. Je t'avais suivi heureux de notre complicité. Du haut de la côte, le palais de glace et les édifices aux enseignes fluorescentes avaient disparus sous la neige qui tombait. Nous distinguions parfois une partie de la foule se détachant des murs, confondue dans l'obscurité, apparaissant et disparaissant au rythmes de la musique qui nous parvenait assourdie.
- Laissons-les s'amuser. J'ai froid, m'étais-je plainte.
- Tu t'en souviens, fais-je, émerveillé du fait qu'elle se rappelle encore.
- Comme si c'était d'hier, répond-elle souriante. Nous avions alors avalé ce qui restait de la réserve d'alcool, échangeant alternativement la gourde, entre deux étreintes, avançant bras dessus, bras dessous dans l'épaisse neige, sans attention pour les couples épars qui nous croisent.
- Tu m'avais dit qu'il faisait chaud chez toi, que nous y serions bien. Tu désirais trouver une certaine quiétude en-deça du monde que tu aimais bien, une fois par-ci, une fois par-là, mais dont tu te lassais, le moment venu. Tu n'avais plus arrêté de parler. Je t'avais écouté, disant oui, disant non, attentif au doux babillage d'une compagne adorable. Arrivés à ta demeure, j'avais hésité. Tu m'avais pris par la main, m'entraînant dans l'escalier, tout étonné de m'aventurer si tard dans un appartement où une femme vivait seule Le confort de ton salon m'avait intimidé. Tu monologuais, disparaissais, revenais...
- J'attendais que tu fasses un pas dans la bonne direction! Tu t'ennuyais tellement à l'époque...
- Comment le savais-tu ? Fais-je en souriant.
- Une femme sent les choses. D'ailleurs on lisait facilement dans ton visage, à travers tes yeux sombres, empreints de douceur, dans ton visage souvent absent du monde; tes airs un peu sauvage te distinguaient des autres... Tout ceci et bien d'autres choses m'avaient attirée, dès le premier soir...Mais, dis-moi: ce n'est pas par hasard que tu es ici ce soir...
Nous avalons lentement, nos yeux glissent de l'assiette aux yeux de l'autre. Je lui raconte qu'après notre séparation, j'étais retombé dans l'idéalisme duquel elle m'avait tiré, ce soir-là. Malgré que la vision du partage ait été tout juste à portée de main, que la romance m'ait temporairement fait soupçonné une stabilité que je n'avais pas connue, que tous les avantages possibles dans une vie à deux aient été soulignés, je n'avais pu, alors, m'adapter aux promesses de ce nouveau style de vie.