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Refus de la misère
Il faut le comprendre, le mettre dans nos têtes : nous avons été bâtis, façonnés par des communautés qui n'ont pas été édifiées pour les pauvres. Plus grave encore, les intérêts de ces communautés ont été, dès le départ, contraires aux intérêts des pauvres. Cela aussi, il faut le mettre dans nos têtes. Il faut bien réfléchir à ce fait que nous avons été bâtis en état de méfiance par rapport aux pauvres. (…)
C'est parce qu'elle s'est bâtie sur la peur des pauvres, que notre aumône est devenue toujours moins une manière d'accorder des droits, comme le voulaient les Pères de l'Eglise, toujours plus un moyen simplement de faire survivre. Nous ne pouvions pas faire autre chose que de les nourrir, nous ne pouvions pas les laisser mourir de faim. (...)
Le drame est que lorsque nous faisons quelque chose pour eux, nous nous inscrivons dans une attitude qui n'est sans doute pas celle de la bonne conscience - là n'est pas la question - mais qui est celle de l'assurance de nous-mêmes. C'est d'être si sûrs de nous qui fait barrière entre les pauvres et nous. Nous nous disons : "Allez ! ne nous frappons plus la poitrine inutilement, ne nous abaissons pas non plus à mépriser, faisons quelque chose !". Malheureusement, ce que nous avons appris à faire, ce ne sont pas les pauvres qui nous l'ont appris. Nous sommes d'une société, nous sommes de communautés qui n'ont rien appris des pauvres, puisqu'elles ne se sont pas bâties avec eux, qu'elles n'ont rien à faire avec eux et que leur intérêt fondamental n'est pas les pauvres mais leur propre survie, leur développement à elles. Tout ce que nous avons appris fait barrage entre les pauvres et nous.
Ecrits et Paroles, tome 1,
éd. Quart Monde/Saint Paul, 1992, pp. 480-481, 485.
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