A. du 10/05/2002
A. du 03/05/2002
A. du 27/04/2002
A. du 16/04/2002
A. du 09/03/2002
A. du 23/02/2002
A. du 10/02/2002

POURQUOI CETTE IMPUISSANCE DE L'O.U.A. A RESOUDRE LA CRISE POLITIQUE QUI SEVIT A MADAGASCAR


On se perd en conjecture devant l'attitude prise par l'O.U.A. face à la crise politique qui dure depuis le mois de janvier 2002 à Madagascar.

I - RETROSPECTIVE

Lorsque des millions de Malgaches, ayant voté pour Ravalomanana le 16 décembre 2001 ont manifesté pendant des semaines contre les résultats officiels de ces élections proclamés par la H.C.C. le 25 janvier 2002, la communauté internationale, par le biais de l'O.U.A. s'est positionnée en faveur de la décision de cette même H.C.C. de renvoyer Ratsiraka et Ravalomanana à un second tour, prétextant que c'était la légalité.
Le peuple malgache, décidés à défendre leur vote ont manifesté de plus belle. Ils ont expliqué avec force détails sur les lois, les articles de la Constitution portant sur nomination des membres de la H.C.C. que :
1 - Les membres de cette H.C.C. ont été nommés d'une façon illégale et anticonstitutionnelle.
2 - Cette H.C.C. a prêté serment devant Ratsiraka le 22 novembre 2001, alors que ce dernier était déjà candidat aux présidentielles, ce qui était un acte anticonstitutionnel donc illégal.
3 - Cette H.C.C. a commis un déni de justice en refusant de confronter les procès verbaux qu'elle détenait avec ceux entre les mains des candidats et ceux détenus par les observateurs agréés, à la demande des pro-Ravalomanana.
Les mouvements de protestations ont pris de l'ampleur. La communauté internationale s'en est certes inquiétée mais pas dans le sens favorable à la majorité de la population, mais avec un parti pris flagrant par l'Amiral Ratsiraka.
Monsieur Amara Essy, S.G. de l'O.U.A. est venu à Madagascar pour amener l'amiral et Ravalomanana autour d'une table de négociation. En repartant, il a laissé derrière lui une mission de l'O.U.A. dont le but a été d'arriver à faire adopter un consensus par les deux candidats. L'O.U.A., à cette époque déjà, ne s'est pas du tout préoccupée des aspirations réelles des Malgaches. Pour l'O.U.A., l'essentiel a été d'amener Ravalomanana à accepter un second tour alors qu'il savait qu'il était, en réalité, élu au premier tour.
Lorsque les Malgaches, déçus par le parti pris de l'O.U.A. en faveur de Ratsiraka, ont poussé Ravalomanana à prendre le pouvoir - ce qui a eu lieu le 22 février 2002 - l'O.U.A. a crié au scandale, a accusé Ravalomanana de l'avoir trompée, a refusé de le reconnaître comme Président de Madagascar bien qu'il le fût déjà légitimement. Toute la communauté internationale a fait chorus. Aucune délégation étrangère n'est allée à Mahamasina pour assister à l'investiture de Ravalomanana. Une manière très claire de lui faire comprendre qu'elle ne l'a pas cautionné. Elle a continué de considérer Ratsiraka comme Président de la République arguant en cela sa volonté de n'accréditer que ce qui est légal.

II - RATSIRAKA, TERRORISTE CHERI DE LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE

       Ratsiraka érige des barrages anti-économiques, assiège Antananarivo, cherche à l'asphyxier en lui coupant de tous ses ravitaillements en carburants, en médicaments, en matières premières etc. ... Il paie et arme des milices pour persécuter les pro-Ravalomanana ainsi que les originaires d'Antananarivo - les Merina - en province, on perquisitionne chez eux, on les arrête arbitrairement, on les torture : On les traîne sur des kilomètres, on leur fait boire leur propre urine, on leur pèle la peau des genoux, on les tue... Mais la communauté internationale malgré ces actes terroristes commandités par Ratsiraka se contente de protester pour la forme mais évite de condamner sévèrement le responsable de ces crimes contre l'humanité. Sous d'autres cieux, de tels actes auraient été vite jugés terroristes sans autre forme de procès par la communauté internationale et leurs auteurs pourchassés. Bizarrement, ces actes ne l'ont pas été dans le cas de l'Amiral Ratsiraka. Bien au contraire !

III - L'ACCORD DE DAKAR

       Le 18 avril 2002, Ratsiraka et Ravalomanana, l'O.U.A., les chefs d'Etat africains facilitateurs, ont signé ensemble l'Accord de Dakar pour résoudre le problème malgache. D'après l'article premier de cet accord, un décompte des voix obtenus par les candidats aux élections de décembre 2001 doit être fait. Ce même article stipule que : "... dans l'hypothèse où aucun candidat n'a obtenu la majorité requise pour être élu au premier tour de scrutin, un référendum populaire portant sur le choix entre les deux candidats sera organisé avec l'assistance des Nations Unies, de l'O.U.A., de l'Union Européenne et de la Communauté internationale dans un délai de six mois maximum."
       Autrement dit, si un candidat obtient la majorité requise, il est élu président de la République au premier tour de scrutin et le référendum populaire n'aura pas lieu.
       D'autre part, les signataires de l'Accord de Dakar, cités plus haut, ont avalisé la H.C.C. désignée par la Chambre Administrative de la Cour Suprême de Madagascar par son arrêt du 16 avril 2002, et lui ont, par conséquent, assigné la tâche de faire le décompte contradictoire des voix obtenues au cours de ces élections du 16 décembre 2001. En outre, les négociations de Dakar ont pris comme base de départ cet arrêt prononcé par la Chambre Administrative le 16 avril 2002.
       La H.C.C. s'est donc attelée au recomptage des voix. Elle a, au cours de ses travaux, confronté les procès-verbaux qu'elle détient avec ceux qui sont entre les mains du consortium des observateurs, des candidats et du Conseil National des Elections. Curieusement, Ratsiraka n'a pas voulu mettre à la disposition de la H.C.C. les procès-verbaux qu'il détient.
       Le 29 avril 2002, cette H.C.C., conduite par le Haut Conseiller Mananjara, a proclamé les résultats de ce décompte contradictoire :
       51.46% des suffrages exprimés pour Marc Ravalomanana,
       35,...% pour Didier Ratsiraka.
Marc Ravalomanana a donc "obtenu la majorité requise pour être élu au premier tour" pour reprendre les termes de l'article premier de l'Accord de Dakar.
       Cette proclamation a été faite devant une nombreuse assistance, dont tout le corps diplomatique - hormis l'ambassadeur de la France. La H.C.C. a tenu a expliqué dans les détails :
1 - les lois en vigueur, les termes de la Constitution, les arrêts de la Chambre Administrative de la Cour Suprême, l'Accord de Dakar, conformément auxquels elle a pu siéger, et faire le décompte contradictoire.
2 - les méthodes par lesquelles elle a procédé dans ses travaux dans le respect des lois et de la Constitution.
3 - que son site web peut être consulté par tous ceux qui désirent vérifier de près les résultats de ces élections, résultats qui sont d'ailleurs affichés bureau de vote par bureau de vote au siège de la H.C.C. à Ambohidahy. Comme transparence, on ne peut demander mieux, disons-le tout net.

IV - REACTIONS D'AMARA ESSY, SECRETAIRE GENERAL DE L'O.U.A. APRIS LA PROCLAMATION DE LA VICTOIRE DE RAVALOMANANA

       Cette fois-ci, les Malgaches se disaient que la communauté internationale allait reconnaître le pouvoir octroyé à Ravalomanana, pouvoir réunissant la légitimité et la légalité tel que l'ont souhaité l'O.U.A.,l'O.N.U., l'Europe, les U.S.A., le Japon, le monde entier ... Hélas, non! Cette fois-ci encore, la communauté internationale, à commencer par l'O.U.A., a trouvé à y redire. Voici une partie du communiqué du SG de l'O.U.A. à ce sujet :
       "... Le S.G. de l'O.U.A. ... tout en réitérant son respect pour les institutions judiciaires du pays, notamment la H.C.C. chargée de statuer en dernier ressort sur les résultats des élections présidentielles, prend note avec préoccupation de la décision de cette dernière, qui pourrait porter préjudice à la gestion de la mise en oeuvre de l'Accord de Dakar du 18 avril 2002".
Les propos d'Amara Essy sont ambigus car :
       1 - D'une part, il reconnaît que les actions de la H.C.C. sont légales.
       "... son respect pour les institutions judiciaires du pays, notamment la H.C.C.... ", par conséquent, s'il est logique avec lui-même, il devra reconnaître que ce verdict prononcé par la H.C.C. est légal et le pouvoir qu'elle a accordé à Ravalomanana l'est aussi. Mais ce n'est pas le cas puisque :
       2 - D'autre part, Monsieur Amara Essy ne fait pas preuve de beaucoup d'enthousiasme à l'endroit de ce verdict de la H.C.C. :
       "... prend note avec préoccupation de la décision de cette dernière,".
Il l'accuse même de ne pas respecter l'Accord de Dakar :
       "... qui pourrait porter préjudice à la gestion de la mise en oeuvre de l'Accord de Dakar du 18 avril 2002". il l'accuse, par conséquent d'être à l'origine de troubles possibles, faisant suite à la proclamation de la victoire de Ravalomanana ! Comme mauvaise foi, on n'en trouve pas mieux ! La H.C.C. ne fait que se plier à l'article premier de l'Accord de Dakar en faisant ce décompte et en publiant ces résultats. Mais Monsieur Amara Essy ne veut pas le reconnaître.

V - L'APPUI DE L'O.U.A. A RATSIRAKA

       L'Amiral Ratsiraka, lors de son séjour en France, après avoir quitté Dakar, annoncé qu'il ne reconnaissait pas cette H.C.C. désignée par l'arrêt de la Chambre Administrative. Par conséquent, il rejetait d'ores et déjà tous les verdicts qu'elle pourrait prononcer. Ce qui signifie qu'il renie l'Accord de Dakar qu'il a signé lui-même. A ces déclarations de Ratsiraka, le S.G. de l'O.U.A. aurait pu répliquer par des reproches. Mais rien de cela n'est arrivé. L'article 5 de l'Accord de Dakar stipule que tous les barrages anti-économiques doivent être levés et les actes de violences doivent cesser dès la signature du dit Accord. Ratsiraka n'a donné aucun ordre dans ce sens à ses partisans. Au contraire, ces derniers ont refusé de se conformer à l'Accord de Dakar sous prétexte qu'ils s'attendaient le retour de l'Amiral. Or, celui-ci a pris grand soin de s'attarder à l'extérieur pour arriver à Madagascar seulement après 15 jours. Pendant son absence, ses partisans s'en donnaient à cœur joie dans leurs actions terroristes : les arrestations, les persécutions et les tortures contre les pro-Ravalomanana ont repris de plus belle dans le nord de l'île ; les barrages anti-économiques ont été renforcés, les dynamitages des ponts ont été repris etc. ... Mais l'O.U.A. n'a fait le moindre rappel à l'ordre à l'Amiral devant ces actes qui non seulement semaient la terreur mais en plus étaient purement et simplement une violation de l'article 5 de l'Accord de Dakar ! Bien au contraire, par le biais de son responsable de la communication, de passage à l'île Maurice le 30 avril 2002, l'O.U.A. a annoncé qu'elle ne reconnaissait que l'Amiral Ratsiraka comme Président de la République Malgache ! Ratsiraka annonce sa décision de faire sécession, de briser l'unité nationale car il refuse d'accepter sa défaite, il s'enfonce de plus en plus dans l'illégalité et la première chose que la mission de l'O.U.A. fait à son arrivée en terre malgache est d'aller lui manger dans les mains à Ambodiatafana - Toamasina, dans le palais qu'il a construit avec l'argent des contribuables malgaches. Pour l'O.U.A., en somme, si troubles il y aura, ce sera à cause de la H.C.C. et de Ravalomanana. Ratsiraka n'est qu'une pauvre victime innocente ! L'O.U.A. ferme les yeux sur les actes criminels commandités par Ratsiraka, elle ne l'en condamne pas ! On ne l'a pas entendue le faire une seule fois ! Au contraire, elle le cautionne !
       Les choses sont dorénavant claires :
       1 - L'article premier de l'Accord de Dakar a été écrit pour leurrer les Malgaches.
       2 - L'O.U.A. veut écarter Ravalomanana par tous les moyens et favorise le maintien de l'amiral à la tête de Madagascar.
       3 - La mise en place d'une période de transition de six mois pour préparer la tenue d'un référendum tend à un seul but : permettre à l'amiral de prendre assez de recul pour gagner la victoire et ce, avec la bénédiction de Monsieur Amara Essy !
       Mais comment donc un homme qui s'est adonné à la persécution; à la torture, à l'assassinat de ses opposants, comment un homme qui s'évertue à diviser la Nation, à saccager le pays en dynamitant ponts sur ponts ; comment un homme qui s'est amusé à assiéger toute une province, à pourchasser des gens qui en sont originaires, etc. .. Comment un tel homme ose-t-il encore espérer que les Malgaches votaient pour lui quelques soient les manœuvres de séduction qu'il fera auprès d'eux ?
       Qu'est-ce qui le pousse à avoir l'outrecuidance de croire qu'il est encore digne d'être Président de la République ? La réponse est on ne peut plus nette : l'appui de la communauté internationale par l'O.U.A. interposée.

VI - POURQUOI CE SOUTIEN DE L'OUA A RATSIRAKA ?

A - RATSIRAKA ET LA LYBIE

       Monsieur Amara Essy se trompe énormément, s'il croit que les Malgaches sont dupes ! Ici, il est utile de dire qu'après avoir quitté Dakar, Ratsiraka a rejoint Tripoli. On connaît l'amitié de longue date liant Ratsiraka à Mu'ammar Al Kadhafi. On sait aussi le désir du Chef d'Etat libyen de faire de Madagascar un bastion de l'Islam par l'entremise de Ratsiraka auquel il continue de verser des fonds considérables. Mais on se rappelle aussi qu'à une époque récente encore où on a parlé d'Etats-Unis d'Afrique, Mu'ammar Al Kadhafi a tenu à financer généreusement l'O.U.A. Assurément, Monsieur Amara Essy ne tient pas à mécontenter un bailleur de fonds aussi prodigue ! Or, se positionner en faveur de la vérité des urnes après les présidentielles du 16 décembre 2001 à Madagascar signifie accepter le départ de Ratsiraka et donc froisser irrémédiablement Mu'ammar Al Kadhafi. Monsieur Amara Essy, lui, ne le veut pas car il veut assurer à l'O.U.A. - du moins pendant son mandat - certains appuis financiers pour assurer le succès de ses différentes missions et veut par conséquent éviter de déplaire à un généreux donateur tel que Kadhafi. Son entêtement à forcer Ravalomanana à négocier une troisième fois avec Ratsiraka tend à un but : la tenue d'un référendum qui verrait la victoire de Ratsiraka et de ce fait, plaire à Kadhafi - référendum qui, à son avis très personnel et qui n'engage que lui d'ailleurs - aplanirait la crise malgache et par la suite ajouterait un autre succès à son palmarès de "négociateur émérite"!
       Milles excuses, El Hadj Amara Essy, mais ce sont des vérités qui doivent être dites car le droit le plus absolu du peuple malgache à disposer de lui-même est sérieusement mis en jeu ! Ni l'O.U.A. ni la communauté internationale n'ont à choisir leur propre président à la place des Malgaches et encore moins à leur en imposer un contre leur propre gré !
       Madagascar est un pays libre ! L'indépendance de Madagascar ne sera jamais sacrifiée ni aux caprices d'un politicien sur le retour trop longtemps habitué à imposer son diktat ni aux ambitions démesurées d'un diplomate trop longtemps habitué à prendre grand soin de sa carrière et à croire à ses propres succès !
(à suivre)

I. RANDRIA