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La mystification démocratique - suite


5.3.4. LA DOMINATION RÉELLE DU CAPITAL SUR LA SOCIÉTÉ.

Cette phase se réalise vraiment après 1945, mais pas de façon simultanée partout. On a donné comme caractéristiques : rajeunissement du capital; le capital va au-delà de ses limites ( problème des formes du capital fictif ); la technique est totalement capitalisée, c'est du capital autonomisé; ce dernier est la forme autonomisée. Ce dernier caractère se retrouve sur le plan intellectuel, théorique. Impossibilité de distinguer une infrastructure d'une superstructure; il y a un continuum totalitaire. L'Etat devient société; formation de la classe universelle qui correspond presque à l'humanité asservie.

Peut-on se poser : y a-t-il une impasse ? Mais cela n'implique-t-il pas encore l'idée de progrès ?

La démocratie devient un élément dépassé dans l'idéologie généralisée. Elle n'est plus suffisante pour représenter les hommes dans leur totalité sociale. Faut mettre en évidence que la mystification parachevée réelle consiste en l'esclavage des hommes.

Plus de parti formel; dans la mesure où l'on ne peut plus parler de classe, il n'est plus possible de parler de parti même dans son sens historique. Il est important de mettre au premier plan la communauté. Les partis deviennent des rackets; rapport entre ceux-ci et le management, la technostructure, les bandes.

Bordiga disait qu'à la suite de la guerre de 1939-45 le fascisme avait gagné, c'est-à-dire que son contenu s'était généralisé a toutes les puissances en conflit. Mais ceci n'est pas assez rigoureux parce qu'il est toujours possible de mettre en évidence l'absence de répression contre le prolétariat due à l'absence de menace de la part de ce dernier. On peut préciser en indiquant le contenu du phénomène : la démocratie sociale. Mais il y a le risque d'accorder trop d'importance à un phénomène somme toute secondaire et accorder trop d'importance à la démocratie. Celle-ci est dépassée parce que le capital englobe les contradictions en particulier celle entre politique et société en laquelle apparaissait l'opposition fascisme-­démocratie politique. Le capital englobe la démocratie mais ne la supprime pas, de même pour le fascisme. Mieux vaut parler de domination réelle du capital enfin réalisée et du mode du capital d'organiser les hommes en fonction de son procès de valorisation. L'individu resurgit dans le bande en même temps qu'il y ait nié ( il est sujet d'échange dans le métabolisme du capital ); l'Etat est médiateur entre les bandes.

Toutefois : « Le rapport de l'échange a complètement disparu ou n'est plus qu'un simulacre. » ( Marx : Grundrisse, t.1, p. 422 ).

Cette remarque de Marx permet de penser le totalitarisme du capital. La domination réelle est négation de toutes les antiques présuppositions en même temps que celles-ci réapparaissent fondées, présupposées par le capital.

La question de la domination du mode de production capitaliste en URSS et en Chine pose celle de la convergence : comment ce mode devient semblable au mode de production asiatique ?

Dans les pays africains, pays nouvellement parvenus à l'indépendance, il est encore possible de parler de classes, le capital n'a pas encore recomposé la société.

Remarque :

Le fascisme correspondit à un moment historique précis : celui de l'affirmation de la menace prolétarienne; nécessité pour le capital de s'emparer de tous les rouages de la société. La théorie du parti unique est liée à celle de la communauté nationale, populaire. Elle indique un moment de faiblesse du capital. Il y eut alors emprunt au prolétariat du parti, de la planification, de la pratique de la formation de militants, etc.. Le capital ne domina pas selon ses propres lois, puisqu'il eut besoin d'une organisation qui découlait encore d'une intervention politique.

Avec le développement de la communauté matérielle, l'organisation est sécrétée par les déterminants économiques eux-mêmes. La société n'est plus en porte à faux; elle a un substrat homogène, cohérent; il y a intégration de toutes les vieilles contradictions et donc de la démocratie ( de même que de la religion : tu travaille ras à la sueur de ton front ) de la politique : on a le bipartitisme qui n'exprime plus un antagonisme, une antinomie, mais un épiphénomène ( y a-t-il nécessité d'être antiparlementaire ? ). Intervention de l'Etat mais d'une Etat conquis par le capital ( quel rapport avec cela l'entreprise-plan de Chaulieu ? ). On a dans une certaine mesure réalisation de ce que disait Marx dans sa critique à la philosophie de l'Etat de Hegel : l'Etat devient folklore populaire. Il tend à nier sa différenciation d'avec la société civile ( en ce sens l'Etat a été repris par l'activité réelle; on a une espèce de réalisation similaire à celle de la Commune ) ; il devient la société civile en tant qu'agent du capital.

En conséquence plutôt que de généralisation du fascisme nous préférons parler de celle de la domination du capital après la seconde guerre mondiale. Car le fascisme comme le libéralisme ne sont que des formes approchées de l'idéologie du capital. L'essence de cette dernière c'est la valorisation, la capitalisation. Il serait important de mettre en évidence pourquoi la science est une expression idéologique plus adéquate pour le capital.

Au niveau du mouvement ouvrier, de ses restes, quel retard tout de même que cette polémique de Bordiga contre la démocratie. Elle fut utile mais qu'elle existât et surtout qu'elle ait été traitée au niveau où elle le fut, témoigne du retard considérable pris par le mouvement révolutionnaire ( de son recul ). Aux USA, le mouvement révolutionnaire noir parvint à un certain dépassement de la démocratie mais sur une base très faible.

Variante conclusive :

Le fascisme fut la généralisation du despotisme de fabrique a l'intimité du tissu social. Il exprime au mieux le passage à la domination réelle du capital, donc la subordination de toutes les composantes sociales ou politiques au capital. Il fut le réformisme actif, c'est-à-dire qu'il utilisa la révolte des masses et put se parer du masque révolutionnaire pour triompher. En même temps il représente une certaine perception consciente de l'insuffisance des schémas libéraux et donc de la réalité économico-sociale qui est la négation des principes au nom desquels se fit la révolution bourgeoise. Il est donc l'expression de la révolte de la maturité du capital contre sa base étroite sur laquelle il s'est édifié. En fin il tendit à réaliser la démocratie sociale, la démocratie dont la présupposition est le capital qui accorde un salaire à quicon­que accomplit une fonction pour le capital. Sous une forme caricaturale c'est la vraie réalisation de la démocratie prolétarienne.

Il y a un essai de comprendre le devenir social ce qui se traduit par l'incorporation du marxisme comme idéologie de la croissance, du développement. Il y a confluence entre le mouvement social-économique et la conscience : mouvement d'intégration du prolétariat, donc fin du rôle de celui-ci.

Le communisme ne peut se poser qu'au-delà de tout ça.

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