Deuxième génération : 1970-1980
![]() La deuxième génération (de loin la plus nombreuse) est celle qui est née dans les années 1930 et qui va être inspirée dans sa démarche par Paul Rassinier ou Thies Christophersen. Ces négationnistes vont apparaître sur le devant de la scène dans les années 1970. ![]() En France : en tout premier lieu, Robert Faurisson bien sûr. Né en 1929, il est, à partir te 1974, maître de conférence en littérature lorsque son nom fait irruption en France à propos de la polémique négationniste. Selon Faurisson lui-même [2] , il a commencé à réfléchir sur les chambres à gaz dès 1960 après avoir lu P. Rassinier (Faurisson se définissant soit comme un homme de gauche, soit comme un apolitique). S'étant vu ouvrir indirectement les colonnes du Monde dès le 14 août 1974 par la publication d'une lettre privée, il essaya de se faire publier par le journal du soir grâce à un échange de lettres polémiques, tentative qui échoua. Cela l'amena à frapper à d'autres portes, en l'occurrence Défense de l'Occident [3] ce qui finalement lui donna accès au Monde le 29 décembre 1978 sous le titre : « La rumeur d'Auschwitz ». Acte de naissance de la polémique autour du négationnisme en France, l'article fut suivi d'autres à la fois dans le Monde et dans Libération et d'une série de procès en 1981 et 1982. Depuis cette date, le parcours de R. Faurisson n'est plus qu'une suite à la fois d'activisme négationniste et d'« affaires », qu'elles soient judiciaires ou polémiques. Les moyens financiers de ce milieu lui permettent par ailleurs une mobilité digne d'un courtier en assurances, les invitations en Suède (par Ahmed Rami), en Allemagne (par le NPD ou Ewald Althans), en Suisse (par Roger Würthrich, leader d'extrême-droite et en présence de G.-A. Amaudruz) étant extrêmement nombreuses. ![]() A l'étranger : né en 1921, Arthur R. Butz (USA), professeur d'informatique à la Northwestern University, est l'auteur en 1976 du principal ouvrage de référence du négationnisme : L'imposture du XXe siècle. Edité aux USA, le livre a été diffusé en Grande-Bretagne par la maison d'édition du National Front. ![]() En terme de réputation, Wilhelm Stäglich est sans doute le deuxième négationniste allemand. Ancien magistrat de Hambourg, il publie ce qui constitue son « grand-oeuvre » en 1979 : Le mythe d'Auschwitz. Si W. Stäglich ne s'est occupé que du camp d'Auschwitz, sa prose n'est guère différente des autres négationnistes. Motivé par le souci de « rendre sa fierté à l'Allemagne », il rejoint les préoccupations de l'extrême-droite allemande d'après-guerre. Depuis, W. Stäglich jouit du même prestige que Thies Christophersen. ![]() John Bennet est une figure particulière, l'Australie n'étant pas en outre un bon terreau pour le négationnisme. Avocat, il a longtemps été secrétaire d'une ligue de défense des Droits de l'Homme (le Victorian Council for Civil Liberties) et s'est particulièrement illustré dans la défense d'une station de radio palestinienne menacée d'interdiction par certains milieux sionistes. Mais dès 1978, il commence à glisser vers le négationnisme et se met à diffuser le livre de Butz The Hoax of the Twentieth Century ainsi qu'un mémorandum de son cru rendu public par le National Times de Melbourne en février 1979. Il participe ensuite à la convention de l'IHR de septembre 1979 alors même que la polémique gagne toute la presse australienne (de façon similaire à la France à la même époque). Cela amène le CVC. à exclure J. Bennet qui se rapproche alors de l'extrême-droite australienne. Il crée également sa propre ligue de défense (ACLU : Australian Civil Liberties Union). ![]() Richard Harwood (Grande-Bretagne) est l'auteur en 1974 d'une brochure intitulée Did six millions really die ? Épais de 36 pages, cet opuscule entendait démontrer que son auteur possédait toutes les preuves que la shoah était un mensonge et de fait, Did six millions really die ? est relativement exemplaire dans la mesure où il réunit l'ensemble des techniques utilisées par la suite par les différents auteurs négationnistes : négation de la politique d'extermination au profit d'une politique d'émigration hors du Reich avant guerre puis d'une politique d'intégration dans l'effort de guerre pendant celle-ci (d'où les camps de concentration). En particulier, il affirme qu'une politique de déportation et d'extermination, alors même que l'Allemagne était en guerre, n'est pas rationnelle et qu'elle est donc impossible. Tous les documents prouvant le contraire sont par conséquent réfutés par R. Harwood comme faux. Comme d'habitude, le livre est bien sûr bourré de témoignages, références, chiffres, et l'hommage à P. Rassinier est très appuyé. ![]() Par la suite, les opinions politiques de R. Harwood sont devenues plus claires puisqu'il s'est vu confier la rédaction en chef de Spearhead, journal du National Front tout en étant membre du comité directeur de ce parti. ![]() Né en Allemagne en 1939, Ernst Zündel s'installe en 1957 au Canada et prend peu à peu sa place au sein du mouvement nazi nord-américain : il devient directeur des Publications Samizdat qui produisent un abondant matériel négationniste, il participe sous le pseudonyme de Christof Friedrich à des revues antisémites et est l'un des co-fondateurs du mouvement White Power. Le premier accroc judiciaire de E. Zündel a lieu en janvier 1985 avec la plainte de Mme Sabrina Citron, ancienne déportée, qui l'attaque pour « publication de fausses informations destinées à porter atteinte à l'intérêt public et ce en toute connaissance de cause ». L'habileté de Zündel a bien sûr été de gonfler le retentissement médiatique du procès, s'assurant ainsi une vraie tribune dont ont profité les témoins de la défense : R. Faurisson, Thies Christophersen. E. Zündel a été reconnu coupable de propagande antisémite et condamné à 15 mois de prison. Relâché sous caution en février 1985, il obtint que le jugement soit cassé pour vice de procédure. Mais c'est surtout le deuxième procès Zündel, en 1988, qui est intéressant puisqu'il voit l'entrée en service de Fred Leuchter [4]. Outre l'aspect tristement cocasse du paradoxe (des individus niant l'assassinat de centaines de milliers de personnes s'associant à un autre individu dont le métier est la mise à mort légale de ses semblables), l'intervention a représenté un nouveau stade dans le développement des thèses négationnistes. Les faiblesses de la tactique des parties civiles sont apparues immédiatement, le jargon scientifique de F. Leuchter ne rencontrant comme opposition que le vide. Le verdict du jugement qui condamnait de nouveau E. Zündel à de la prison ferme a été cassé par la Cour Suprême pour atteinte à la liberté d'expression. Par ailleurs, ses énormes moyens financiers lui ont permis d'alimenter le mouvement néo-nazi allemand après la réunification et d'aider celui-ci à se reconstruire. Il est clair qu'Ernst Zündel est le néo-nazi qui actuellement occupe une situation-clé dans les contacts internationaux de cette mouvance. ![]() Notes ![]() [2] Le Monde, 16 janvier 1979. ![]() [3] Défense de l'Occident, no. 198, juin 1978 art. « Le problème des chambres à gaz ». ![]() [4] Fred Leuchter a pris une importance énorme au sein tu courant négationniste depuis 1988 (cf. supra). Les deux expertises qui lui ont été commandées par E. Zündel pour son deuxième procès ont assuré sa réputation et il est actuellement le principal atout et argument des négationnistes dans le monde. Sa force vient bien évidemment de sa qualité de bourreau et de spécialiste en exécution capitale par gaz. Il ne semble cependant pas qu'il ait été négationniste avant d'être contacté par R. Faurisson et ses positions politiques sont peu connues, même si le fait de prononcer des conférences devant des parterres de néo-nazis ne semble pas l'indisposer... Depuis Fred Leuchter, les apprentis-analystes se sont multipliés : l'allemand German Rudolf (1992), 1'autrichien Walter Lüftl (1993), etc. |