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Refus de la misère
( 1 ).Après avoir passé le certificat d'études, le jeune Joseph fait un apprentissage de pâtissier. Il dit avoir pris quelque distance avec l'Eglise. Puis il rencontre la JOC (Jeunesse ouvrière chrétienne) : c'est là que "j'ai recommencé à prier, à songer à libérer mes frères. C'est alors que j'ai pensé devenir prêtre" (p. 44). Et il continue : "Prier dans l'Eglise, offrir l'Eucharistie, c'était vouloir apporter l'Evangile à mes frères, à tous ceux qui avaient vécu la même vie que ma mère. Et combattre pour eux, pour que jamais plus une famille ne fût semblable à la mienne, c'était devenir prêtre de Jésus Christ mort et ressuscité" (p. 44). Sur son image d'ordination, il fait inscrire ces mots : "J'ai pitié de cette foule."
Entré au séminaire, il vit dans un climat où ses compagnons parlent de "s'enfouir dans la masse". L'idéal que recherchaient ces jeunes hommes était la présence au "peuple des souffrants" : "Nous voulions aller à la recherche de la brebis égarée (...). Nous voulions descendre toujours plus bas dans l'humanité souffrante. (...) Nous ne voulions pas seulement rejoindre le monde ouvrier mais communier au monde de la misère" (p. 60). Le Père Joseph dira plus tard que cela l'avait beaucoup inspiré.
Ordonné prêtre dans la cathédrale de Soissons, le 29 juin 1946, il est nommé vicaire à Tergnier. Puis, en 1948, il demande à son évêque de passer un temps au séminaire de la Mission de France, alors à Lisieux. Il tombe malade : méningite, tuberculose. Après sa guérison il demande à son évêque "une paroisse où les signes de la misère soient visibles" (p. 60). "Je n'ai pas ce que tu demandes, lui répond Mgr Douillard, mais je peux te proposer une paroisse qui, sans toi, n'aura plus de prêtres" : Dhuizel, dans la région de Braine.
Mûrit en lui, de plus en plus, cette "inquiétude incessante d'aller vers de plus pauvres encore, vers ceux qui demeurent intouchés, comme inaccessibles, en raison de leur trop grande misère" et cette conviction qui l'habitera jusqu'à la fin de sa vie que "l'Eglise ne peut avoir de repos avant d'avoir rejoint les plus pauvres, étant condamnée à aller toujours plus loin, plus bas" (p. 62).
Connaissant la quête du Père Joseph, son évêque lui propose, en 1956, de rejoindre un camp, créé par l'Abbé Pierre en 1954, à Noisy-le-Grand, dans la région parisienne. Environ deux cent cinquante familles sans logement y sont hébergés, d'abord sous des tentes marabout, puis dans des abris en fibrociment.
Comme tous ceux qui s'y aventurent, le Père Joseph rencontre comme l'envers du monde : désordre et poussière, bruit et fureur, regards fuyants, visages qui se détournent, cris, nervosité, larmes... Et il se reconnaît lui-même, quarante ans plus tôt, en ces enfants qui l'assaillent. Il devine la peur, la honte, l'enfermement qui les oppressent. Il reconnaît sa propre famille.
Parce qu'il en puise la conviction dans sa propre expérience, il peut affirmer que tous ces gens, parqués comme le rebut de l'humanité, "au plus profond d'eux-mêmes, ne (veulent) pas vivre ainsi. Qu'ils n'attend(ent) pas non plus la charité publique, l'entraide des secours catholiques ou autres, mais la reconnaissance de leur dignité. Cela malgré leur apparence et leurs comportements d'hommes façonnés par la misère"
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