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Tirage
de tête est un manuscrit qui a été
volé à son auteur. Et nous sommes tout à fait d'accord
avec lui pour reconnaître que ce n'est pas correct. Mais il semblait
primordial, à beaucoup de ceux qui ont connus Michel Touchalon,
de faire vivre ce portrait autrement que dans un tirroir, ou au creux
d'une disquette. C'est chose faite. |
Au
SOMMAIRE de Chapitre
1er
1er
extrait:
La naissance Chapitre
2 4e
extrait: au Flore Chapitre
3 6e
extrait: Fils de pub
9e
extrait: Chapitre
5 10e
extrait:
|
4e extrait : au Flore II Dans l'émoi de Mai
Ce vendredi-là, le pseudo-bachotant remontait à pied le Boul' Mich' sans autre projet que d'aller prendre un verre à la Closerie des Lilas près de laquelle il avait garé sa voiture quand il vit une foule galopante foncer vers lui. On le dépassa sans le renverser. Il constata, intrigué, que tous ces gens avaient les larmes aux yeux, de grosses larmes, la sclérotique généralement injectée... De curieuses silhouettes s'agitaient à la hauteur de la place de la Sorbonne, il perçut des détonations, d'espèces de longues boîtes de conserve tombèrent autour de lui... Ses yeux se noyèrent alors qu'il se sentait tout joyeux, riche, adoré... "Reste pas là, lui conseilla en passant un grand type qui riait en pleurant, les cognes, ils vont t'ouvrir la tête!" Il fit demi-tour, pressa le pas et décida de rejoindre le Café de Flore pour avoir des nouvelles. Il n'y trouva personne qu'il connaissait mais aucune trace d'agitation n'était perceptible, heureusement. Il laissa un moment ses sensations dériver dans son whisky... Il remonterait la rue d'Assas, tout simplement, pour récupérer sa voiture, il dînerait à Montparnasse... S'il avait pu joindre une de ses petites amies de l'Institut catholique... mais comment faire?... Le gros problème, dans la France de mai 1968, c'était le téléphone... Pas facile d'avoir une ligne dans une chambre d'étudiante... Peut-être qu'un jour... Ce qui serait formidable, il suffirait d'y penser un téléphone pas trop lourd qu'on emporterait avec soi sans fil, bien sûr. Quatre types entre deux âges s'installèrent non loin de lui, l'un d'entre eux sortit un petit transistor de sa poche, le posa sur la table et ouvrit le son. Du jamais vu au Flore! Mais, après un instant de stupéfaction, tous les consommateurs, interrompant leurs conversations, se mirent à écouter. "Je suis sur place, affirmait un reporter, la police évacue la Sorbonne, les étudiants sont dirigés vers des paniers à salade, seules les filles ne sont pas interpellées " La police évacue la Sorbonne Quelle étrange proposition! mais plus bizarre encore l'attitude de tous ces gens qui avaient l'air de s'intéresser à l'affaire Touchalon commanda un autre whisky en espérant qu'un ami surviendrait. Las! ce fut une bande de jeunes gueulards scandant : "Libérons nos camarades! Libérons la Sorbonne!" Camarades drôle de vocabulaire qui paraissait ne choquer personne. Quelle époque! songeait à part soi Touchalon. Le lendemain, il acheta un transistor, le plus compact qu'il put trouver, avant de filer à Deauville. Sara et l'enfant en Ecosse pour quelques jours, il se croyait sûr de flâner là au moins en bonne compagnie. * Après un week-end réparateur, il se retrouva égal à lui-même mais, avant de prendre le volant, eut le mauvais réflexe d'ouvrir son petit transistor. Deauville n'aurait été que ce faux répit qu'il était venu y chercher : dès 11 heures du matin, l'émeute menaçait de nouveau Paris! Il sentait de bizarres torsions dans l'arbre de direction, au vrai dans sa cervelle, se dirigeant vers un lieu où il ne souhaitait plus se rendre, et sa tête tournait à l'envers de ses roues. Rentré dans le somptueux appartement familial, il ne put joindre ni son ami Jean-Louis Lauzun ni aucun des jeunes élèves inspecteurs avec qui ils sortaient souvent, entre garçons. Il s'insupporta à écouter les nouvelles toujours plus alarmantes des radios, qui paraissaient lancées dans une féroce concurrence pour clamer la réussite du désastre! N'y tenant plus, et doutant des racontars radiophoniquea, il décida de se rendre à Saint-Germain-des-Prés pour boire un verre, tout simplement, mais il préféra s'y faire conduire en taxi, pour ménager sa 203.
" Quel bordel!
non mais quel bordel! éructait Touchalon, indigné. Tu ne
sens rien, Jean-Edern? Ils buvaient paisiblement en regardant agir l'émeute, ces deux garçons qui avaient su épouser des milliardaires et qui se tenaient là, comme d'habitude, au centre de leur monde, sûrs de leur bon droit et de la police... Touchalon laissa éclater sa joie quand les forces de l'ordre, sous la protection diluvienne de deux motos-pompes, libérèrent enfin la place Saint-Germain-des-Prés. Il battait bruyamment des mains. " Ça
leur rafraîchit les idées, jubilait-il. Ils allèrent
dîner à Montmartre après cet apéritif mouvementé
de manière à ne pas être dérangés. En
grimpant la rue Lepic, Touchalon commenta : |
Nous
sommes désolés de l'aspect affreux de cette page,
trop inspirée du gris Touchalonien... |